L’Assemblée nationale examinera aujourd'hui en dernière ligne droit le projet de loi sur le terrorisme, avant le Sénat la semaine prochaine. Comme la loi de programmation militaire, le texte risque d’échapper au contrôle a priori du Conseil constitutionnel. Les membres de l’Asic, association des acteurs du web, indiquent dès à présent que la voie de la QPC ne sera pas délaissée.
C’est cette semaine que les députés voteront le projet de loi sur le terrorisme, avant les sénateurs la semaine prochaine. Le texte, durci en Commission mixte paritaire, sera passé tel un rouleau compresseur malgré la pluie de critiques. Aux plus hautes responsabilités, le PS a en effet délaissé son opposition manifeste au blocage administratif des sites, au motif que nombreux d’entre eux feraient de l’apologie ou de la provocation au terrorisme. Au contraire, Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, a ajouté au dispositif le déréférencement administratif, une première dans l’histoire du droit des nouvelles technologies.
Le projet de loi est riche, prévoyant encore de sanctionner le vol informatique, tout en facilitant la mise au clair des informations chiffrées ou les moyens d’enquêtes sous pseudonyme ainsi que les interceptions sur les flux arrivant ou sortant d’un ordinateur. Il compte également sanctionner l’entreprise individuelle terroriste en scrutant notamment les habitudes de connexion des internautes sur les sites considérés comme terroristes.
Problème : ni le gouvernement, ni la majorité, ni l’opposition n’ont exprimé le souhait de trainer ce texte devant le Conseil constitutionnel avant sa publication au Journal officiel. Un silence radio inquiétant avec une alternative simple : ou bien ils considèrent que le texte est constitutionnellement carré. Cette saisine ne serait alors pas un luxe puisqu’elle permettrait de blinder ces dispositions tout en rassurant les nombreux opposants (CNCDH, Commission des libertés numériques, le Conseil national du numérique, le Syndicat de la Magistrature, la Quadrature du Net, etc.). Ou bien, craignant une censure, l’exécutif et le législatif optent alors pour la politique de l’autruche. Un choix loin d’être glorieux.
La solution de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC)
Dans tous les cas, il existe un recours : la question prioritaire de constitutionnalité. Elle permet de faire jauger la conformité d’un texte déjà publié, à l’occasion notamment d’une action devant les juridictions civiles ou administratives. C’est très exactement ce sur quoi table l’Asic, l’association des sites Internet communautaires, laquelle regroupe Google, Microsoft, Dailymotion, Facebook, Priceminister, Skype, Yahoo ou encore Ebuzzing.
Comment se fera cette action ? Simple : « au cours des prochains mois, le Gouvernement publiera les décrets d’application de ces lois portant une atteinte sans précédent, aux libertés. L’ASIC sera vigilante à ce que ceux-ci fassent l’objet d’un contrôle de leur légalité par le Conseil d’État et puissent être soumis à l’examen du Conseil constitutionnel par l’intermédiaire de la procédure de la Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) ». L’association rappelle d’ailleurs que « le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de rappeler la nécessité de limiter les atteintes à la liberté de communication. Celle-ci inclut notamment la liberté d’accéder à des informations ». Or, « le blocage de sites internet, tout comme leur déréférencement, constitue par nature une atteinte à cette liberté. »
Que chaque parlementaire agisse en conscience
De son côté, la Quadrature du net demande à chaque parlementaire d’ « agir selon sa conscience », avec un effet simple : « chaque député, chaque sénateur qui rejettera ce texte prendra date comme étant l'un de ceux qui se seront opposés à l'instrumentalisation des risques terroristes pour porter atteinte aux droits fondamentaux et à l'État de Droit, dans des domaines qui vont très au-delà de la seule lutte antiterroriste ». Dans ce dernier souffle parlementaire, elle invite 60 députés ou 60 sénateurs à saisir le Conseil constitutionnel « afin qu'il puisse juger, avant l'entrée en application de ce projet de loi, des graves menaces que ce dernier fait peser sur les libertés publiques. »
Commentaires (24)
#1
à noter que lors des lectures précédentes, seule le groupe GDR et EELV ont votés contre.
#DirectAN " />
#2
Ce serait rigolo une invalidation.
Dans le cas contraire beaucoup moins " />
#3
LQDN ils se croient chez les bisounours ? Ils pensent sincèrement que nos élus en on quelque chose à battre d’être éventuellement cité dans le futur comme ayant été des défenseur des libertés individuelles ?
L’instrumentalisation du risque, elle existe depuis un bail, on vous fait passer les pires lois liberticides sous couvert de lutte contre le terrorisme ou de protection de l’enfance…
PS : y’a d’ailleurs un joli dessin humoristique où on voit Obama qui a une loi (une boite) liberticide dans la main et le “vendeur” lui demande avec quoi il lui l’emballe et y’a justement les deux papiers cadeau correspondants.
#4
Tain les modifs qui ne fonctionnent pas …
Je précise donc.
Bien que le groupe GDR est voté pour en première lecture à l’assemblée.
Seul le Groupe Communiste Républicain et Citoyen ainsi que Europe-Ecologie les vert ont voté contre au sénat.
#5
Je sens venir l’inflation du nombre de noms de domaines, déjà que les spameurs et les sites de c… avaient pas mal bossés dans ce sens. On finira peu-être par tomber à cours de noms disponibles.
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#6
C’est consternant.
C’est l’ASIC qui regroupe des multinationales qui se place en défenseur des droits et libertés contre une loi votée par des élus qui devrait, en tant que représentants du peuple, être préoccupés de les protéger .
Quand les politiques abandonnent les idéaux de la républiques….
#7
On est fichu " />
Quand la loi sera voté, ils vont obliger Next Inpact à mettre la clé sous la porte " />
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#9
Article avec un id 666 sur le site de l’ASIC " />
Que pense Cazeneuve de cette QPC, notre cher ministre qui est « choqué par les propos » d’une élue, mais pas de la mort d’un manifestant ?
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Tu parles d’un bien… Je dirais plutôt que tout ce que tu viens de citer c’est du poison pour tous.
j’approuve totalement ce genre de destruction, pour le bien de tous.
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Le pire ?
Il n’y a aucune comparaison possible a ce niveau.
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Un principe dit que deux torts ne font pas un bien. À bon entendeur…
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Et donc parce que quelqu’un fait quelque chose que tu perçois comme nuisible, on est justifié de lui nuire ?
Ça s’appelle du vigilantisme, et ça finit toujours mal. La justice personnelle, malgré son nom, n’est pas de la justice.
Et ce n’est pas comme si les actions violentes de Bové avaient arrêté les OGM. Ça tient plus de la mesquinerie que l’acte héroïque.
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Je ne reproche pas de lutter contre les OGM, la mondialisation, la biodiversité, ou quelque cause que ce soit. Ce qui me gêne, ce sont les méthodes et la perception auprès du public. La glorification qui est faite de la “justice” personnelle, et des actes de violence. C’est une dérive absolument inacceptable, quelque en soit la motivation et la cible.
Quand quelqu’un décide unilatéralement “ce qui profite à tous” et agi de manière destructive sur cette base, on sort de l’état de droit pour entrer dans la loi du plus fort. Ce n’est définitivement pas quelque chose de souhaitable.
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La Quadrature du net demande à chaque parlementaire d’ « agir selon sa conscience »
Peut-on en déduire que seule Isabelle Attard dispose d’une conscience ? " />
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La différence entre le vandalisme et tabasser quelqu’un n’est que d’image. Castrer un violeur ne le tuera pas (moyennant des soins médicaux adaptés), et “profitera à tous alors que lui laisser sa capacité reproductive ne sert qu’à une poignée”. Et le vandalisme peut tuer des gens, comme ces tarés qui dynamitent des hôpitaux pratiquant l’avortement, aux USA. Ils ne visent pas les gens (du moins pas toujours), mais des gens sont impliqués et meurent. Et ils utilisent exactement la même logique de “on fait ça pour le bien commun”.
Si la violence est réellement le seul moyen, c’est que le système empêche tout recours. Donc le système est mauvais et doit être changé. Soit il peut être changé sans violence, soit il nécessite une révolution.
Le premier cas invalide le postulat de la violence nécessaire ; le second cas applique une violence ponctuelle à une position qui permet d’éviter la violence future. Détruire un champ ne fait qu’appeler à plus de violence quand le champ sera replanté, il n’empêche pas le replantage, n’impose pas la biodiversité, ne donne pas de recours futur à des problèmes similaires. C’est au mieux de la vision très court terme, au pire de l’hypocrisie publicitaire.
D’une manière plus générale, le problème de ce genre d’action est double :
TL;DR : quelque soit la cause, quelque soit la cible, exprimer ouvertement “je suis heureux que quelqu’un ai nuit volontairement et illégalement à tel individu/groupe/cause que je n’aime pas” ne me semble pas sain.