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RSF attaque le décret sur l’accès administratif aux données de connexion

Nouveau front contre la LPM

RSF attaque le décret sur l'accès administratif aux données de connexion

Le 02 mars 2015 à 14h50

Le 19 février, la Quadrature du Net, FDN et FFDN annonçaient leur procédure conjointe contre le principal décret d’application de la loi de programmation militaire. Ce front s’enrichit d’une nouvelle action en annulation, à l’initiative cette fois de Reporters sans Frontières (RSF).

Le gouvernement, la majorité tout comme l’opposition parlementaire n’avaient pas jugé utile de faire examiner la loi de programmation militaire (LPM) par le Conseil constitutionnel. Ses nombreux adversaires décelaient pourtant dans ce dispositif de graves dangers pour la vie privée, en raison de trop nombreux flous dans le marbre de la loi.

Après la Quadrature du Net, FDN, et FFDN, c’est autour de RSF de finalement passer à l’attaque. Le 24 février 2015, l’association a déposé devant le Conseil d’Etat un recours en annulation contre le décret d’application de cette loi. « Cet article, relatif à l’obtention de données personnelles et la surveillance des communications téléphoniques et internet en temps réel par l’administration française, porte gravement atteinte aux droits fondamentaux des citoyens et en particulier à la vie privée, à la liberté d’information et aux secrets des sources » considère-t-elle.

Elle décèle « trois motifs d’inquiétudes », à savoir « l’absence de contrôle du juge tout au long de la procédure de mise sous surveillance, des objectifs justifiant la surveillance trop larges, et un spectre des données recueillies trop étendu ». Ces défauts seraient autant de contrariétés avec la législation française, mais également européenne, dont le secret des sources journalistiques.

Pour mémoire, l'article 20 de la LPM et ce décret permettent aux autorités d’aspirer en temps réel, sur sollicitation du réseau, tous les « documents » et « informations » détenues par les opérateurs au titre des métadonnées (notre actualité détaillée). Il suffit que les autorités justifient de la recherche de renseignements intéressant la sécurité nationale, la prévention du terrorisme, la criminalité et la délinquance organisées ou « la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France ». Des hypothèses qui seraient trop floues selon les détracteurs de ce mécanisme. 

Une violation du droit européen

Sur ce point, RSF considère que Paris n’a fait que trop peu de cas de l’arrêt – fondamental – rendu par la Cour de justice de l’Union européenne le 8 avril 2014 Dans cette décision, dite Digital Rights Ireland, C-293/12, la CJUE a invalidé la directive sur la rétention des données, considérant que ce texte « comporte une ingérence dans [les] droits fondamentaux d’une vaste ampleur et d’une gravité particulière dans l’ordre juridique de l’Union sans qu’une telle ingérence soit précisément encadrée par des dispositions permettant de garantir qu’elle est effectivement limitée au strict nécessaire. »

Où est le respect des sources journalistiques ?

Destinée à harmoniser la collecte et la conservation des données de connexion chez tous les opérateurs européens, le législateur européen avait oublié de prévoir des règles de base pour éviter les abus. Seul détail, ni la LPM ni le décret d’application ne reposent sur cette directive. Cependant, pour RSF, comme pour la Quadrature, FDN et FFDN, cette jurisprudence condamne par défaut toutes les dispositions équivalentes qui ne prévoient pas d’encadrement suffisant des aspirateurs à vie privée. « La directive ne prévoyait pas d’exception concernant les personnes soumises au secret professionnel, rappelle RSF. Or, le décret ne prévoyant pas non plus d’exception pour les personnes soumises au secret professionnel, il permet, sans aucune restriction particulière, d’accéder aux données de connexion des journalistes, et ainsi aux informations permettant d’identifier leurs sources. Il est donc comme la directive contraire au droit de l’UE. »

Un contrôle trop mou, trop tardif et trop secret

Enfin, Reporters sans frontières condamne le manque de contrôle dans les procédures d’accès aux informations de connexion. « Le seul contrôle extérieur à l’administration stricto sensu revient à la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), qui n’intervient qu’à posteriori ». Son contrôle n'est pas seulement mince (ce n’est qu’une recommandation faite au premier ministre), il est aussi tardif : il peut intervenir jusqu’à neuf jours après l’atteinte aux secrets des sources journalistiques. Pire, regrette RSF, « à aucun moment l’intéressé n’est informé du fait qu’il fait l’objet d’une procédure de surveillance et que ses données sont collectées. Il n’a donc aucun moyen de contester les décisions prises par l’administration ni devant elle ni devant un juge. Le droit au recours à un juge est donc vicié. »

Dans une consultation ouverte par le Conseil national du numérique, RSF avait également épinglé la largeur du spectre couvert par l'article 20 de la LPM. Un flou particulièrement inquiétant, « notamment dans l’interprétation qui peut être faite des termes de “sécurité nationale” et de “prévention”. En l’absence de juge, la disposition est doublement dangereuse, car elle ne comprend à aucun moment un jugement indépendant sur la cohérence entre la demande, les objectifs prévus par la loi et la proportionnalité des mesures par rapport à cet objectif. »

Commentaires (15)

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Allez ,ils n’ont qu’à mettre le mot “terrorisme” et “sécurisé nationale” et tout sera plié …

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” trop nombreux flous dans le marbre de la loi”



je ne suis pas juriste mais on m’a dit que les flous permettent justement de faire dire ce que l’on veut aux textes de loi … l’interprétation qui disent les juristes !!!

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on est tous des pédonaziterroriste <img data-src=" />

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Il serait bon de prioriser les objectifs de cette loi et de définir plus clairement certains d’entre eux.



La “sécurité nationale”, ça vise quoi ? Les biens, le public… les actionnaires, les dirigeants ?



Et combattre la criminalité et la délinquance organisées, OK, mais si on tombe sur des gros poissons, genre “Les dirigeants” qui font partie du volet “sécurité nationale”, on donne la priorité à quoi ? (je me doute de la réponse <img data-src=" /> )

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La sécurité nationale est un concept nébuleux où tout et rien peuvent être amalgamé avec des méthodes indignes pour arriver à ses fins.



Avec la l’ouverture des frontières, la nationalité est désuète. La sécurité “nationale” n’a plus lieu d’être. Je ne veux pas ‘bénéficier’ des ‘services’ imposés d’hommes en armes ‘à mon écoute’ sans mon autorisation.



Le simple fait que cette loi soit passée sans provoquer de scandales parlementaires ou d’émeutes publiques montre s’il en était encore besoin l’ignominie de la classe politique et l’avachissement de ses électeurs.

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tmtisfree a écrit :



Avec la l’ouverture des frontières, la nationalité est désuète. La sécurité “nationale” n’a plus lieu d’être. Je ne veux pas ‘bénéficier’ des ‘services’ imposés d’hommes en armes ‘à mon écoute’ sans mon autorisation.





Ouverture des frontières ?? Ce n’est pas ce que disent les gens qui meurent noyé au large de l’empelusa.


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ledufakademy a écrit :



“ trop nombreux flous dans le marbre de la loi”



je ne suis pas juriste mais on m’a dit que les flous permettent justement de faire dire ce que l’on veut aux textes de loi … l’interprétation qui disent les juristes !!!





Mwouais, enfin… Y a flou et flou, hein.



Par exemple,&nbsp; il y a le flou de “tous les véhicules motorisés” dans le code de la route qui permet d’inclure toute catégorie de véhicule à moteur, sans être obligé de nommer chacune des catégories existantes (camion, voiture, motocyclette, tuk-tuk, etc…), et d’y inclure ceux qui n’existent pas encore: ça permet d’avoir une délimitation claire, nette et d’éviter que des petits malins tentent de se soustraire à la loi, avec l’intervention d’un juge en cas de difficulté.

&nbsp;

Et il y a le flou de ce texte, particulièrement flou, avec une définition obscure, une délimitation quasi-inexistante qui permet d’y inclure tout et n’importe quoi, et bien évidemment sans aucun juge pour contrôler le tout, éviter les abus et remettre les parties dans leurs droits.


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Soriatane a écrit :



Ouverture des frontières ?? Ce n’est pas ce que disent les gens qui meurent noyé au large de l’empelusa. Lampedusa





Quelle idée de louer un bateau désuet avec un capitaine incapable aussi?

Y a d’autres ferrys plus sécurisés que ça (la sncm par exemple, même s’ils ont une chance sur 2 de ne jamais partir à cause d’une grève)


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Soriatane a écrit :



Ouverture des frontières ?? Ce n’est pas ce que disent les gens qui meurent noyé au large de l’empelusa.







Oh je suis bien d’accord, ce n’est pas moi qu’il faut blâmer d’avoir tracé une zone artificielle où ceux qui sont à l’intérieur sont plus ou moins prisonniers d’hommes en cravate et en armes sur un navire qui coule, et ceux à l’extérieur attirés par les dernières lueurs qui font ce qu’ils peuvent pour le rejoindre sans connaitre son état douteux. Les frontières sont un archaïsme criminel.


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tmtisfree a écrit :



Avec la l’ouverture des frontières, la nationalité est désuète. La sécurité “nationale” n’a plus lieu d’être. Je ne veux pas ‘bénéficier’ des ‘services’ imposés d’hommes en armes ‘à mon écoute’ sans mon autorisation.





À mon avis, la sécurité nationale aura toujours lieu d’être dans que les états existerons.

La sécurité n’est malheureusement pas quelque-chose d “évident” de “naturel”, d’ “universel”. 

La sécurité n’a pas le même sens selon le pays et les états doivent de fait, penser à l’éventualité qu’on cherche a les attaquer.

Au vus des scandales Prism, de la possibilité d’un éventuel coup d’état, je pense qu’au contraire, la question de sécurité nationale, est aujourd’hui toujours d’ actualité.



Après, il est vrai qu’on utilise ce principe au moins 80% du temps pour justifier l’ injustifiable, mais je vois mal comment un état pourrait être “neutre” vis à vis de la remise en cause de son existence ou des ses fondements.



Autrement par rapport aux frontières en europe, la situation est assez effrayante.


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tmtisfree a écrit :



Les frontières sont un archaïsme criminel.





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hurd a écrit :



À mon avis, la sécurité nationale aura toujours lieu d’être dans que les états existerons.

La sécurité n’est malheureusement pas quelque-chose d “évident” de “naturel”, d’ “universel”. 

La sécurité n’a pas le même sens selon le pays et les états doivent de fait, penser à l’éventualité qu’on cherche a les attaquer.

Au vus des scandales Prism, de la possibilité d’un éventuel coup d’état, je pense qu’au contraire, la question de sécurité nationale, est aujourd’hui toujours d’ actualité.



Après, il est vrai qu’on utilise ce principe au moins 80% du temps pour justifier l’ injustifiable, mais je vois mal comment un état pourrait être “neutre” vis à vis de la remise en cause de son existence ou des ses fondements.



Autrement par rapport aux frontières en europe, la situation est assez effrayante.







Tu fais le triste constat de la situation actuelle, mais comme a si bien répondu E. Snowden à la question What’s the best way to make NSA spying an issue in the 2016 Presidential Election? It seems like while it was a big deal in 2013, ISIS and other events have put it on the back burner for now in the media and general public. What are your ideas for how to bring it back to the forefront?

“This is a good question, and there are some good traditional answers here. Organizing is important. Activism is important.



At the same time, we should remember that governments don’t often reform themselves. One of the arguments in a book I read recently (Bruce Schneier, “Data and Goliath”), is that perfect enforcement of the law sounds like a good thing, but that may not always be the case. The end of crime sounds pretty compelling, right, so how can that be?



Well, when we look back on history, the progress of Western civilization and human rights is actually founded on the violation of law. America was of course born out of a violent revolution that was an outrageous treason against the crown and established order of the day. History shows that the righting of historical wrongs is often born from acts of unrepentant criminality. Slavery. The protection of persecuted Jews.



But even on less extremist topics, we can find similar examples. How about the prohibition of alcohol? Gay marriage? Marijuana?



Where would we be today if the government, enjoying powers of perfect surveillance and enforcement, had – entirely within the law – rounded up, imprisoned, and shamed all of these lawbreakers?



Ultimately, if people lose their willingness to recognize that there are times in our history when legality becomes distinct from morality, we aren’t just ceding control of our rights to government, but our agency in determing thour futures.



How does this relate to politics? Well, I suspect that governments today are more concerned with the loss of their ability to control and regulate the behavior of their citizens than they are with their citizens’ discontent.



How do we make that work for us? We can devise means, through the application and sophistication of science, to remind governments that if they will not be responsible stewards of our rights, we the people will implement systems that provide for a means of not just enforcing our rights, but removing from governments the ability to interfere with those rights.



You can see the beginnings of this dynamic today in the statements of government officials complaining about the adoption of encryption by major technology providers. The idea here isn’t to fling ourselves into anarchy and do away with government, but to remind the government that there must always be a balance of power between the governing and the governed, and that as the progress of science increasingly empowers communities and individuals, there will be more and more areas of our lives where – if government insists on behaving poorly and with a callous disregard for the citizen – we can find ways to reduce or remove their powers on a new – and permanent – basis.



Our rights are not granted by governments. They are inherent to our nature. But it’s entirely the opposite for governments: their privileges are precisely equal to only those which we suffer them to enjoy.



We haven’t had to think about that much in the last few decades because quality of life has been increasing across almost all measures in a significant way, and that has led to a comfortable complacency. But here and there throughout history, we’ll occasionally come across these periods where governments think more about what they “can” do rather than what they “should” do, and what is lawful will become increasingly distinct from what is moral.



In such times, we’d do well to remember that at the end of the day, the law doesn’t defend us; we defend the law. And when it becomes contrary to our morals, we have both the right and the responsibility to rebalance it toward just ends.”





Je ne l’aurais pas mieux écrit moi-même.



Sinon concernant ton petit lien final, les Suisses font exactement pareil avec nous. <img data-src=" />


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Oui , il est vrai que la Suisse exécute des plans d’actions de défense du territoire contre une insurrection dans l’Union Européenne, ils ne se sont pas arrêté à la France mais tout les pays voisins.&nbsp; Pour en venir là , c’est que de leur oeil extérieur ont doit donner une bonne image de

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ça date de quand ?

parce que ça ressemble furieusement à la tirade de l’héroine de Psycho Pass 2 dans les derniers épisodes…

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WereWindle a écrit :



ça date de quand ?

parce que ça ressemble furieusement à la tirade de l’héroine de Psycho Pass 2 dans les derniers épisodes…







https://np.reddit.com/r/IAmA/comments/2wwdep/we_are_edward_snowden_laura_poitras…


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