Volet numérique de la loi Travail : quel texte en sortie de l’Assemblée ?
Travail et fines herbes
Le 13 mai 2016 à 15h00
7 min
Droit
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À défaut d’adoption de la motion de censure déposée par les députés de l’opposition, le projet de loi Travail a été adopté hier par l’Assemblée nationale. Retour sur les principales mesures « numériques » de ce texte, telles qu’elles seront bientôt débattues par le Sénat.
Avec l’utilisation du 49 - 3, le gouvernement de Manuel Valls a engagé sa responsabilité sur un texte modelé à souhait, puisqu'il a pu conserver les amendements auxquels il était favorable (un peu plus de 450 au total, sur quasiment 5 000).
Instauration d’un « droit à la déconnexion »
À partir du 1er janvier 2017, toutes les entreprises seront tenues d’organiser avec leurs employés, au titre de la négociation annuelle sur la qualité de vie au travail, des discussions sur « les modalités du plein exercice par le salarié de son droit à la déconnexion et la mise en place par l’entreprise de dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques ». L’objectif : « Assurer le respect des temps de repos et de congé » des salariés, et protéger par la même leur « vie personnelle et familiale ». De nombreuses solutions pourront être envisagées à cette fin, en fonction des besoins de chaque structure : blocage de mails durant certaines plages horaires, simples engagements mutuels de la part des employés et de leurs supérieurs hiérarchiques, etc.
En cas de désaccord ? L’employeur aura le dernier mot... Il définira, seul, de quelle manière le droit à la déconnexion sera appliqué dans son entreprise. Unique exception : dans les structures d’au moins 50 salariés, ces modalités devront obligatoirement se matérialiser par une charte élaborée après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. Ce texte prévoira notamment la mise en œuvre « d’actions de formation et de sensibilisation à un usage raisonnable des outils numériques », précise le projet de loi adopté de facto par l'Assemblée nationale.
Pour arriver à l’élaboration d’une sorte de « guide de bonnes pratiques » en la matière, les députés ont également souhaité en commission qu’une expérimentation portant « sur l’articulation du temps de travail et l’usage raisonnable des messageries électroniques par les salariés et les agents publics » soit menée au niveau national, pendant une durée d’un an. Le gouvernement devra autoriser sa mise en place par décret, « au plus tard un an après la promulgation de la présente loi ».
Sans grande surprise, l’amendement soutenu par l’aile gauche du PS afin de reconnaître plus facilement les burn-out en tant que maladie professionnelle (à titre expérimental dans la région de Toulouse) n’a pas été retenu par l’exécutif.
Les partenaires sociaux invités à relancer le télétravail
Afin de relancer le télétravail, exercé par ces salariés qui travaillent à leur domicile, grâce à Internet, le projet de loi Travail invite les partenaires sociaux (« [s’ils] le souhaitent ») à ouvrir des négociations avant le 1er octobre. Ces discussions pourraient notamment porter sur le droit à la déconnexion. Le gouvernement a également « adopté » un amendement PS prévoyant que cette concertation permette de dresser un état des lieux du « taux de télétravail par branche selon la famille professionnelle et le sexe », ainsi qu’une liste des métiers « potentiellement éligibles au télétravail ».
L’exécutif devra ensuite remettre au Parlement, avant le 1er décembre 2017, un rapport présentant les éventuels « aménagements » nécessaires sur le plan législatif pour encourager le développement du télétravail en France.
Aucun des amendements déposés pour faciliter le recours au télétravail – en cas de pic de pollution, de grossesse ou d’arrêt maladie par exemple – n’a en revanche été sélectionné par le gouvernement (voir notre article).
Des bulletins de paie dématérialisés accessibles via le CPA
Le projet de loi El Khomri définit les contours du « compte personnel d’activité » (CPA) dont devrait bénéficier chaque actif, tout au long de son parcours professionnel, progressivement à partir de 2017. Celui-ci sera constitué du « compte personnel de formation », qui permet depuis 2015 de jouir de ses droits à la formation – même en cas de changement d’employeur ; du « compte personnel de prévention de la pénibilité », qui sert depuis l'année dernière à faire valoir ses droits lorsqu’on travaille dans des conditions particulièrement difficiles (départ anticipé à la retraite, passage à un temps partiel sans perte de salaire...) ; ainsi que du « compte engagement citoyen », un nouveau dispositif qui recensera « les activités bénévoles ou de volontariat » (service civique, réserve militaire, certaines activités associatives...), desquelles découleront des droits à la formation notamment.
Chaque titulaire d’un compte personnel d’activité pourra consulter ses droits et les utiliser « en accédant à un service en ligne gratuit ». Ces dispositions devront être précisées par décret, mais le législateur souhaite pour l’instant qu’il soit ainsi possible d’obtenir via ce service numérique :
- Une « information sur ses droits sociaux et la possibilité de les simuler ».
- Un espace de consultation de ses bulletins de paie, lorsqu’ils auront été transmis par l’employeur au format dématérialisé.
- Un accès à des « services utiles à la sécurisation des parcours professionnels ».
À partir du 1er janvier 2017 et « sauf opposition du salarié », l’employeur pourra « procéder à la remise du bulletin de paie sous forme électronique » – par mail et/ou via le CPA. L’objectif du gouvernement : inverser les règles qui prévalent aujourd’hui, en faisant du bulletin de paie dématérialisé la solution de principe.
Introduction d’une « responsabilité sociale » des plateformes de type Uber
En commission, les députés ont souhaité intégrer des dispositions en faveur des « travailleurs indépendants recourant, pour l’exercice de leur activité professionnelle, à une ou plusieurs plateformes de mise en relation par voie électronique ». L’ombre d’Uber n’est bien évidemment pas loin... À partir du moment où le service d’intermédiation « détermine les caractéristiques de la prestation de service fournie ou du bien vendu et fixe son prix », celui-ci verra sa « responsabilité sociale » engagée sur plusieurs fronts : prise en charge de l’assurance volontaire en matière d’accidents du travail et contribution à la formation professionnelle notamment.
Le gouvernement a toutefois tempéré les velléités des députés en conditionnant ces nouvelles obligations à la réalisation, par le travailleur indépendant, d’une « activité significative ». Ce nouvel article ne sera donc applicable qu’au profit des personnes générant un chiffre d’affaires supérieur à un seuil (fixé ultérieurement par décret).
Conventions et accords d'entreprise réunis dans une base en Open Data
On notera enfin que le projet de loi El Khomri prévoit que les « conventions et accords de branche, de groupe, interentreprises, d’entreprise et d’établissement » devront être « rendus publics et versés dans une base de données nationale dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable », conformément aux principes de l’Open Data.
Volet numérique de la loi Travail : quel texte en sortie de l’Assemblée ?
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Instauration d’un « droit à la déconnexion »
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Les partenaires sociaux invités à relancer le télétravail
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Des bulletins de paie dématérialisés accessibles via le CPA
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Introduction d’une « responsabilité sociale » des plateformes de type Uber
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Conventions et accords d'entreprise réunis dans une base en Open Data
Commentaires (14)
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Abonnez-vousLe 13/05/2016 à 16h34
J’ai hâte de voir à quoi ça ressemble des données sur des accords de branche.
Le 14/05/2016 à 00h35
Le contraste entre la réalité de ce texte franchement raisonnable et les gesticulations scandalisées des opposants illustre bien le blocage politique complet du pays.
Quelque soit le sujet, catégorisation idéologique immédiate et sans nuance (gauche/droite), puis attaque aveugle du “camp” opposé, c’est très fatiguant et détruit les idéologies en question.
Le 14/05/2016 à 09h14
“En cas de désaccord ? L’employeur aura le dernier mot… Il définira, seul, de quelle manière le droit à la déconnexion sera appliquée dans son entreprise…”
ça va être TRÈS facile au patron : “il lui suffira de “proposer” une chose, dont il sera SÛR
que le salarié va la refuser une 1ère fois, puis ……………………" /> " />
Le 14/05/2016 à 09h29
Le 14/05/2016 à 11h52
Le 14/05/2016 à 12h54
HS
je suis “curieux de voir ” (en Juin) comment la GB va se décider (pour/contre)
lors “du Brexit” ?
si…….elle s’en va, d’autres Pays* n’attendent que “ça” !
* dont, la France " />
HS
Le 14/05/2016 à 20h03
Le 15/05/2016 à 03h04
Qu’ils aillent se faire mettre.
Soit tu es de repos, soit tu es d’astreinte, et donc payé.
On ne rase pas gratis.
Le 17/05/2016 à 06h35
C’est bien vrai ça, un texte qui autorise l’entreprise ne rencontrant pas de difficultés financières particulières à t’augmenter tes heures et à te baisser ton salaire, avec licenciement pour cause réelle et sérieuse pour tout salarié s’y opposant, je ne vois vraiment pas de quoi être scandalisé. Si on rajoute à ça des temps de repos fractionnables et décomptés des temps d’astreinte, on n’est pas loin de l’utopie !
Et si avant de tomber dans la mauvaise foi caractérisée, certains lisaient vraiment ce texte ? Et si quelqu’un m’expliquait par quel miracle un texte pareil va faire baisser le chômage ?
Le 17/05/2016 à 06h39
Il est arrivé plusieurs fois qu’on m’appelle sur mon portable (perso !) en dehors de mes heures de travail pour résoudre un incident que l’astreinte n’arrivait pas à résoudre. Bien évidemment, le paiement en heures supp’ allait de soi. Mais on peut trouver le procédé franchement limite…
Le 17/05/2016 à 10h40
Le 17/05/2016 à 11h39
Le 17/05/2016 à 11h52
Ne parlons pas des facilités d’imposer des heures sup’ moins majorées aux esclaves salariés.
Aucun doute, ça va créer de l’emploi! (ou du moins faire baisser le chômage, y a qu’a trafiquer les chiffres ou changer la methode de calcul)
Le 17/05/2016 à 13h18