Pour la Cour des comptes, le fonctionnement actuel du vote par Internet « n’est pas satisfaisant »
I can't get no...
Le 11 janvier 2017 à 15h30
6 min
Droit
Droit
Les Français résidant à l’étranger sont les seuls à pouvoir aujourd’hui voter par Internet, notamment lors des législatives. La Cour des comptes, qui estime qu'un recours accru à cette solution pourrait être bénéfique au Trésor Public, juge toutefois que son fonctionnement n’est pas encore « satisfaisant ».
L'organisation des élections pour les Français établis hors du territoire national coûte cher. Trop cher même, estime la Cour des comptes dans un référé rendu public mardi 10 janvier. Chaque inscrit a en effet occasionné une dépense de 20,5 euros à l’étranger (lors des présidentielles et législatives de 2012), contre 7,45 euros en France.
Au total, les magistrats de la Rue Cambon évaluent à 34,3 millions d’euros le budget consacré à l'organisation des élections pour les Français de l’étranger, au titre des quatre scrutins qui se sont déroulés entre 2011 et 2014 : législatives, présidentielles, consulaires et européennes.
Des élections qui coûtent cher et mobilisent peu
Dans une analyse avant tout financière, la Cour des comptes souligne que « diverses faiblesses » alourdissent le coût de ces scrutins. Le tout sans grand effet, son référé pointant la « faible participation des Français de l'étranger aux élections, malgré les nombreuses facilités offertes ».
En raison de l’éloignement des bureaux de vote (en principe dans les quelques consulats du pays en question), les citoyens résidant hors du territoire national peuvent effectivement voter par correspondance, voire par Internet – uniquement pour les élections législatives et consulaires. La Cour des comptes s’arrête tout particulièrement sur ces deux dispositifs, jugeant notamment qu’il conviendrait de supprimer le premier.
Ce « système abandonné depuis 1975 pour les votants présents sur le territoire national se heurte aux nombreuses défaillances des systèmes postaux étrangers », argumente l’institution. Résultat, de « nombreux Français » ne reçoivent pas leur « matériel de vote » en temps et en heure. « Cette faculté, conditionnée à une inscription préalable, provoque un travail supplémentaire pour les services consulaires, obligés de consacrer des locaux au dépouillement de ces votes pour une participation minime (moins de 2 % des électeurs avaient fait ce choix en 2012). » Le vote par correspondance est enfin jugé trop coûteux : « 25,50 € par votant en 2012 et 120 € par votant pour les législatives partielles de 2013 ».
La Cour voudrait plus de garanties pour le vote par Internet
Quant au vote par Internet, la Cour des comptes juge que son fonctionnement « n'est pas satisfaisant ». Le choix du prestataire « n'a pas été entouré de toutes les précautions souhaitables », affirment les magistrats. « Des difficultés techniques, déjà identifiées en 2011, n'ont pas été entièrement surmontées, ni en 2012 ni en 2014 [on se souvient à cet égard des problèmes avec Java, ndlr]. S'y sont ajoutés des problèmes concernant l'accès au portail de vote : difficile durant les dernières heures du scrutin consulaire de 2014, cet accès a été impossible au cours de la dernière heure. »
Pour les juges, ces incidents « posent la question de la capacité des serveurs à absorber un flux pourtant restreint de votes (7 % des inscrits avaient fait en 2014 le choix du vote par Internet) ». Ils plaident surtout « pour un rôle accru du bureau de vote électronique, garant de l'intégrité du scrutin ». La Cour des comptes note à cet égard que si aucun audit de sécurité n’a pour l’instant permis de déceler de « failles particulières », « il n'existe pas en la matière de garantie totale ».
L’institution propose par conséquent que le fameux bureau de contrôle du vote électronique publie à l’avenir un rapport « sur la régularité et la conformité du vote ». Car au final, les magistrats restent profondément séduits par cette solution technique, dont le développement permettrait selon eux « de réduire les coûts d'organisation des scrutins ».
Le retour de la dématérialisation de la « propagande électorale »
Dernière recommandation formulée par la Rue Cambon : ne plus envoyer de plis électoraux (programmes et bulletins de vote) aux Français de l’étranger, au profit d’une dématérialisation de la « propagande électorale » – comme on dit dans le jargon. « Outre qu'il ne constitue pas le moyen le plus fiable, en raison des défaillances de certains systèmes postaux étrangers, y compris dans des pays industrialisés, et des nombreuses erreurs d'adressage, l'envoi papier se révèle très coûteux » se justifient les magistrats. Ces derniers précisent que les plis traditionnels ont coûté plus de 1,9 million d’euros pour les scrutins de 2012, soit près de 15 % des dépenses totales.
Le Quai d'Orsay renvoie la balle au législateur
Comme le veut le fonctionnement de la Cour des comptes, la réponse apportée par le gouvernement au référé de l’institution (daté du 24 octobre 2016) a été rendue publique hier (PDF). Le ministre des Affaires étrangères dit partager « l'essentiel des constats de la Cour et approuve[r] ses recommandations ».
Jean-Marc Ayrault rétorque toutefois que leur mise en œuvre « relève pour la plupart du législateur ». C’est notamment le cas de la suppression du vote par correspondance et de la dématérialisation des plis électoraux (cette seconde réforme suscitant depuis plusieurs années une vive opposition de la part des parlementaires), pour lesquelles il faudrait absolument passer par une loi.
En revanche, le Quai d’Orsay promet de modifier les règles entourant le bureau du vote électronique. « Conformément à la recommandation de la Cour », l’exécutif annonce qu’il prévoit d'insérer dans un décret « une disposition indiquant que le BVE consignera toutes les informations relatives à la régularité et à la conformité du vote dans un rapport qui rendu public ».
Rappelons enfin que François Fillon a promis durant la primaire de la droite de généraliser le vote électronique, qui ne serait donc plus réservé qu’aux Français de l’étranger.
Pour la Cour des comptes, le fonctionnement actuel du vote par Internet « n’est pas satisfaisant »
-
Des élections qui coûtent cher et mobilisent peu
-
La Cour voudrait plus de garanties pour le vote par Internet
-
Le retour de la dématérialisation de la « propagande électorale »
-
Le Quai d'Orsay renvoie la balle au législateur
Commentaires (28)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 12/01/2017 à 08h45
Non même pas. Quand j’habitais en France, j’étais inscrits sur les listes électorales… en déménageant, je me suis inscrit au consulat, mais je suis toujours inscris sur la liste électorale municipale ! (et donc compté abstentionniste au passage).
Si je possédais un bien immobilier là bas au moins, je pourrais comprendre mais là rien… et le consulat ne peut me résilier de la liste.
Le 12/01/2017 à 09h11
Si la commune a fait son travail correctement, elle t’a rayé des listes électorales depuis lors d’une des séances de révision annuelle, elle n’a pas à t’en informer.
Le 12/01/2017 à 13h14
3 mois ce n’est pas long en contrepartie d’une rente indue.
T’as visiblement aucune idée de quoi tu parles en fait.
Je m’incline. De toute façon avec 3 nationalités, c’est sûr que ces histoires me passent au dessus de la tête.
Le 12/01/2017 à 14h19
Le 12/01/2017 à 14h44
Le 14/01/2017 à 12h20
Le 11/01/2017 à 16h27
Donc un français n’a pas son mot à dire sur la politique de son pays quand il habite à l’étranger ? Première nouvelle.
Du coup on dégage tous les sportifs pros qui habitent en suisse aussi ?
Le 11/01/2017 à 16h56
le vote électronique devrait juste être interdit pour les élections nationales, mais bon…" />
Le 11/01/2017 à 16h57
Oui.
Tant qu’il réside à l’étranger, je ne vois pas ce qu’il a dire sur les affaires internes. D’ailleurs ils s’y intéressent très peu vu le taux de participation au vote par correspondance (donc ce n’est pas lié seulement aux difficultés techniques du vote par internet). Du coup la légitimité des députés “des français de l’étranger” est fortement discutable.
Il ne s’agit pas de les destituer de la nationalité française : ils récupéreraient bien-sûr le droit de vote s’ils résident de nouveau en France. Enfin, sauf peut-être en effet pour les sportifs et autres millionnaires installés à l’étranger pour échapper à l’impôt…
Le 11/01/2017 à 17h04
Certains français de l’étranger paye des impôts en France, donc je trouve normale qu’ils ait le droit de voter.
Le 11/01/2017 à 17h10
+1
Le 11/01/2017 à 17h14
Il manque pas un mot??
“ dans un rapport qui rendu public”
Je pense que la petite main de J.M AYRAULT ne s’est pas relu.
Le 11/01/2017 à 17h18
Pourtant du fait de leur statut d’expatrié, ils peuvent avoir une autre vision de la France et proposer des idées intéressante.
Loin des yeux ne veut pas dire loin du cœur.
Après au niveau légal, je ne suis pas sur que cela soit applicable. Cela doit même être anticonstitutionnelle.
Le 11/01/2017 à 17h33
Le 11/01/2017 à 19h44
Le 11/01/2017 à 22h24
Résidant à l’étranger (émigrant parti depuis 17 ans), je ne vote plus en France pour ces raisons. Mes impôts, je les paie là où je gagne ma vie et où je vis. Je ne vois pas pourquoi j’ai encore le droit de voter même aux municipales, c’est complétement ridicule. Le droit de voter devrait être lié à la nationalité ET au lieu de paiement des impôts (municipaux, revenu,…) ; on participe à la vie du pays complètement ou pas du tout.
« faible participation des Français de l’étranger aux élections, malgré les nombreuses facilités offertes »
Pas étonnant quand on voit le b*rdel compliqué à l’envi mis en place pour pouvoir voter par internet : c’est tellement immonde qu’on est en droit de se demander si ce n’est pas fait exprès pour dégoûter les aspirants électeurs. «facilités» ? Sérieux " />
Et en plus, il faut se retaper le cinéma à chaque élection.
Le 11/01/2017 à 22h52
Vraiment ? Mon fils l’a (comme moi), mais a vécu dans le pays juste quelques mois à sa naissance. Il n’a jamais été dans le système éducatif français et ne connaît que le monde nord-américain. Et pourtant il pourrait s’inscrire sur les listes, même aux municipales et voter jusqu’à la fin de ses jours. Et ses enfants aussi, d’ailleurs (c’est cool, non? Si ça tourne mal, ils pourront mendier la CMU+RSA en France, sans jamais avoir payé 1¢, sans connaître quoi que ce soit de la culture, et même de la langue sans doute dans le futur).
Le 11/01/2017 à 23h02
Le 12/01/2017 à 01h25
Il n’y à que de rare cas qui enlève le droit de vote : La perte de la nationalité de façon volontaire ou non, une décision judiciaire(généralement de façon temporaire).
Le vote et un droit, pas une obligation.
Le 12/01/2017 à 04h31
Le 12/01/2017 à 08h20
Ce que je trouve aberrant, résidant moi même à l’étranger, c’est la possibilité de voter pour les municipales alors qu’on n’y vit plus du tout.
Le 12/01/2017 à 08h33
Mais pour voter aux municipales, il faut y résider ou payer des impôts d’une quelconque manière. Donc cela voudrait dire que tu y paye des impôts, logique que tu puisse être interessé par la vie de la commune.
Le 11/01/2017 à 15h36
Win the “yes” needs the “no” to win against the “no”
Ce référé a-t-il une quelconque valeur?
Le 11/01/2017 à 15h58
C’est bête mais pour moi ça devrait être un sujet majeur. Un organisme de l’état à part entière, avec internalisation complète des compétences ( = pas de prestataire).
Et une fois la techno éprouvée, on pourrait généraliser des participations citoyenne sur des sujets de manière plus fréquente.
Mais bon, c’est un peu remettre en cause un système qui tends à trop se protéger lui-même.
Le 11/01/2017 à 16h04
Le choix du prestataire « n’a pas été entouré de toutes les précautions souhaitables », affirment les magistrats. « Des difficultés techniques, déjà identifiées en 2011, n’ont pas été entièrement surmontées, ni en 2012 ni en 2014 [on se souvient à cet égard des problèmes avec Java, ndlr].
Et donc le même presta est choisie à chaque fois lors de l’appel d’offre ? C’est à n’y pas comprendre grand chose.
Le 11/01/2017 à 16h08
Le problème à la base est que les français résidant à l’étranger aient le droit de voter en France… Et en plus ils ont même des députés qui leur sont réservés !
Il serait plus logique (et plus simple) de donner le droit de vote aux étrangers résidant en France.
Le 11/01/2017 à 16h19
Le 11/01/2017 à 16h19