Au ministère de la Culture, le maigre bilan de la charte antipiratage
Des ayants droits dans la charte (suite)
Le 20 mars 2017 à 15h46
4 min
Droit
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Le 23 mars 2015, acteurs de la publicité et ayants droit signaient une charte de bonnes pratiques, dans l’enceinte du ministère de la Culture. Après des mois de retard, le rapport de synthèse 2015 - 2016 est enfin disponible. Un document rachitique qui dresse un bilan quantitatif très glorieux. Sans révéler d'épaisses informations.
Depuis cette date, six « comités de suivi » ont regroupé les différents signataires : l’ALPA, Interactive Advertising Bureau France, la SACEM, les producteurs de musiques (SCPP et SPPF), le Syndicat national de l’édition, le Syndicat des régies Internet, le Syndicat national du jeu vidéo, etc.
Follow the money
Au bout du fusil, les publicités affichées sur les sites considérés comme « illicites » car diffusant des contenus sans l’autorisation des ayants droit. L’approche « Follow the Money » consiste à assécher les ressources financières de ces sites pestiférés en leur coupant le robinet. Dans le cœur de cette charte, chaque signataire s’engage à « établir une liste d’adresses URL de sites internet en se référant aux informations fournies par les autorités compétentes ».
Cette liste noire est secrète, informelle, impossible en ce sens de l’obtenir via une procédure CADA. Cette logique de police privée est en tout cas simple : une fois un site qualifié de pirates, les efforts redoublent pour couper le flux publicitaire des régies signataires. L’expression « autorité compétente » est large : on y trouve associées les autorités administratives indépendantes (non la Hadopi qui n'est pas associée) outre les sites épinglés par des décisions de justice, mais aussi et surtout les agents assermentés par le ministère de la Culture, travaillant dans des groupements de défense comme l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle.
Quatre pages de généralités
Le rapport de synthèse 2015 - 2016 de ce comité de suivi est disponible depuis peu. Sans tambour ni trompette. Il faut dire que le bilan est pour le moins maigre puisqu’il se limite à… quatre pages remplies quasi intégralement de généralités. Le reste, 10 pages, est occupé par les annexes, le discours de la ministre de mars 2015, l’historique du comité, la longue liste des signataires et la copie de la charte…
Seul enseignement, on apprend qu’en 2013, « une campagne de vérification menée par l’ALPA sur 5 sites massivement pirates avait permis de déceler la présence de nombreux annonceurs classiques de secteurs aussi divers que la banque, l’assurance, la fourniture d’accès Internet ou la grande distribution et les marques automobiles ».
Or, six mois après la mise en route du Comité de suivi, « la totalité des publicités sur les sites massivement pirates étudiés étaient des publicités sans aucun lien avec les représentants français du secteur de la publicité (agences, régies ou annonceurs…) ». Et « si par mégarde une publicité venait à apparaître, elle est retirée par l’intermédiaire du secteur publicitaire responsable quelques jours seulement après son signalement par les ayants droit ».
Le rapport se poursuit par quelques envolées lyriques du type : « La tenue des Comités et les discussions entre les participants ont permis à chacun de prendre conscience des problématiques spécifiques à chaque acteur de la filière et ainsi d’être beaucoup plus vigilant sur le traçage et la diffusion de publicités digitales ».
Pour remplir péniblement les blancs, le ministère de la Culture a aussi rappelé qu’un deuxième comité a été mis sur pieds le 10 septembre 2015 avec les acteurs des solutions de paiement. La logique est la même : couper les ressources des sites mis à l’index par les organismes de défense.
La monnaie virtuelle, un système de paiement « moins rassurant »
Autosatisfaction totale, là encore : « il n’existe presque plus de moyens de paiement ‘classique’ sur les sites pirates repérés par les ayants droit, la plupart des sites massivement pirates ayant mis en place des systèmes de paiement moins rassurant pour l’internaute, telle que la monnaie virtuelle ». Moins rassurant, le bitcoin ?
La faible consistance de ce rapport - annuel devenu biannuel - peut s’expliquer de deux façons : ou bien le ministère n’a rien à dire, en raison d’un bilan qui tend vers le néant. Ou bien, ce bilan est plus glorieux, mais étouffé par le secret. Sans doute que les services d’Audrey Azoulay savent que le propre d’une liste noire et d’une justice privée est de mal s’accommoder avec de bruyants communiqués.
Au ministère de la Culture, le maigre bilan de la charte antipiratage
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Follow the money
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Quatre pages de généralités
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La monnaie virtuelle, un système de paiement « moins rassurant »
Commentaires (29)
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Abonnez-vousLe 20/03/2017 à 16h05
”…le rapport de synthèse 2015-2016 est enfin disponible. Un document rachitique qui dresse
un bilan quantitatif très glorieux. Sans révéler d’épaisses informations…”
Le 20/03/2017 à 16h06
Mais est ce que nous ne sommes pas en présence d’un conflit d’intérêts ?
D’un coté le ministère le la culture défend les ayants droits qui pestent contre la publicité sur les sites tipiaks.
De l’autre nous avons le ministère de l’industrie qui défend les entreprises qui font de la publicité à tours de bras y compris sur les sites tipiaks.
Si on laisse faire les ayants droits, il va y avoir moins de publicités (sur les sites pirates) ce qui va impacter le chiffre d’affaire des entreprises demandeuses de publicité, donc créer du chômage et en conséquence faire rentrer moins d’impôts dans les caisses de l’état.
Moralité : les ayants droits veulent la ruine notre économie.
Sauvez notre industrie : piratez tout ce que vous pouvez.
vive la république, vive la France, votez pour moi !
Le 20/03/2017 à 16h09
quel sous-titre^^" />
Le 20/03/2017 à 16h12
Les ayants-droits ne veulent pas la ruine de l’économie, ils sont juste préoccupé par la survie de leur modèle préhistorique …
Le 20/03/2017 à 16h25
+1 pour le sous-titre ^^
-1 pour la justice privée " />
Le 20/03/2017 à 17h02
+1 @jul.
Difficile de croire que dans un état qui se dit “démocratique” , on peut avoir des ententes secrètes pour interdire les sites des pirates/opposants/tout ceux qui déplaisent à une caste/.
D’autant plus incompréhensible que de nombreuse lois pour le bien public (comme l’obligation d’information certains documents comptables qui aurait permis une meilleure égalité devant les impôts, etc…) ont été retoqué pour “attente à la liberté d’entreprendre’
Non pas que ça m’étonne, mais le fait que ça ne fasse pas hérisser les cheveux de toute personnes qui se dit “démocrates” me remplie d’incompréhension.
Le 20/03/2017 à 17h49
moins rassurant le bitcoin ? ah parce que c’est davantage rassurant de filer son no de Carte de crédit sur un site appartenant à des PIRATES ?
elle est bonne ! presque aussi drôle que le firewall d’openoffice
Le 20/03/2017 à 17h52
Lève le doit celui qui peut acheter tout le contenu qu’il regarde sans passer par un abonnement ?
Le 20/03/2017 à 19h10
C’est comme les Etats Unis avec l’invasion de l’Irak…
On vend des armes à l’Irak et on fait des accords commerciaux (=argent de la vente et des échanges commerciaux), on désarme de force (=on récupère ce qu’on a vendu), et on récupère avec une opération militaire les terrains de jeux pour les exploiter sans intermédiaire…
Le 20/03/2017 à 19h11
On peut leurs levée le doigt majeur?" />
Le 20/03/2017 à 19h36
Le 21/03/2017 à 08h00
Pourquoi supprimer les abonnements qui représentent la meilleure offre légale qui soit?
C’est comme si je demandais “lève le doigt celui qui peut faire tous ses trajets sans utiliser la voiture”
Le 21/03/2017 à 08h33
Le 21/03/2017 à 08h50
UN rapport peut être rédigé par des assistants parlementaires, mineurs et incompétents…
Le 21/03/2017 à 09h09
Le 21/03/2017 à 09h24
la preuve–> Le Monde
Le 21/03/2017 à 11h20
Le 21/03/2017 à 12h39
Le 21/03/2017 à 12h46
J’ai pas dit qu’elle l’avait fait, j’ai dit qu’elle avait été créé pour ca (entre autres, parce que faut quand même les faire payer les méchants pirates!)
Quand on retrace son histoire, on a du mal à y croire mais c’est sur son site! C’est même mise en avant :)
https://www.hadopi.fr/la-haute-autorite/lhadopi-en-bref
Le 21/03/2017 à 12h57
Le 21/03/2017 à 13h32
Le 21/03/2017 à 13h38
La HADOPI a pourtant innové avec le label PUR puis le LOL (https://www.nextinpact.com/news/84848-la-hadopi-liquide-pur-et-prefere-label-off… ) et a sorti le site https://offrelegale.fr/ !
Le 21/03/2017 à 13h45
Fallait bien faire des trucs de temps en temps pour justifier la facture!
Troll à part, ce n’est pas parce que l’effet est minime qu’il faut minimiser les offres légales qui sont sorties depuis.
Ne me faites pas dire que NetFlix n’aurait pas pu voir le jour sans HADOPI, j’ai pas dit ca :)
Le 21/03/2017 à 14h08
Le 21/03/2017 à 16h33
au départ le Gouv. voulait bien faire*, mais à l’arrivée….c’est pas ça !
* d’une pierre, 2 coups :
ET
seulement (on sait prquoi.) il s’est vautré " />
Le 21/03/2017 à 19h31
De toute façon c’est qu’un système de crevard tout ça… Avant internet tu pouvais acheter un cd vierge sony pour copier un cd original sony pour le lire sur une platine sony… Ensuite ils ce sont pris une violente biffle par les FAI “téléchargez votre musique plus rapidement” et les ipods ( mon gros doigt à couper que sans internet > ipod caca ). Puis certains ce sont gavés sur les platines divx ( ont les achète ou les divx ? ) et maintenant que le physique à quasiment disparu ont ce gave encore sur la copie privée et le stockage alors qu’un dvd est “incopiable”.
Car entre nous sans l’industrie du piratage pas mal de matériel n’auraient jamais vu le jours mais ça les majors ne le reconnaitront surement jamais. Finalement ils n’auront jamais mon argent directement je pense " />
Le 21/03/2017 à 21h02
Je ne suis pas d’accord avec toi,
Certaines entreprises estiment que X les gênes.
Ils appellent leur copains les fournisseurs de pubs (ce ne sont pas les mêmes!), et sans demander un tiers indépendant (un juge,…) qui aurais autorité pour agir, use de leur poids pour leur bloquer leur financement.
Il n’y a aucune possibilité d’appel, de controle public, ou même d’indication à la personne qui en subit les conséquence.
Une justice expéditive , partiale, et opaque.
Qui te dit que c’est les sites de pirates qu’ils bloquent les financement, ou des artistes/éditeur/… qui sortent leur oeuvres et espérer se faire payer avec de la pub ?
Histoire de les forcer à passer par eux et bloquer toute concurrence se basant sur la pub (et ou les dons ?) ?
Aucun appel, aucun document publique, c’est la caractéristique d’une mafia, pas d’une démocratie.
Quant à l’absence totale de rapport, le conseil constitutionnel n’était pas d’accord avec toi.
Le 22/03/2017 à 03h09
Le 22/03/2017 à 09h27
Il y a deux choses à distinguer ici.
Le premier est totalement justifié, légal et souhaitable.
Personne ne peut te forcer à faire affaire avec quelqu’un procédant à des actes manifestement illégaux, même en l’absence de jugement. Si tu vois quelqu’un se faire poignarder dans la rue, tu sais que c’est illégal, et tu peux lui refuser la vente de couteaux. Si la personne s’estime injustement lésée, elle peut te poursuivre en justice en retour.
Le deuxième, tout aussi légal, est moins souhaitable. Cependant, étant donné que le point 1 consiste en une pure prise de position sans aucun impact direct notable sur les sites (ils continuent d’avoir de la pub), la gravité en est relativement nulle. Pas besoin de pouvoir faire appel quand tu ne subis aucun dommage.
Si les “sanctions” étaient réelles et sérieuses, je serais d’accord avec toi, mais ce n’est pas le cas.
Tu connais les documents internes de Carrefour ou Google ? Tu peux faire appel de n’importe lequel de leurs choix ? Non. C’est commun à toute société de droit privé, pas besoin de mentionner la Mafia. On n’est pas au point Godwin, mais on s’en rapproche dangereusement " />
L’article ne mentionne pas le conseil constitutionnel, je ne vois pas trop à quoi tu fais référence " />
Maintenant, si tu peux m’expliquer pourquoi le principe de démocratie devrait s’appliquer à une société privée, je suis tout ouïe.