Projet de loi antipiratage : l’Arcep craint « une obligation de surveillance disproportionnée »

Projet de loi antipiratage : l’Arcep craint « une obligation de surveillance disproportionnée »

Projet de loi antipiratage : l’Arcep craint « une obligation de surveillance disproportionnée »

« En fonction des modalités retenues pour la mise en œuvre de ce texte, le fournisseur d’accès à internet pourrait se voir imposer une obligation de surveillance disproportionnée ». Dans son avis sur le projet de loi contre le piratage, l’Arcep anticipe de possibles débordements dans la mise en œuvre de la loi contre le piratage en particulier la lutte contre les sites miroirs. 

Ce projet de loi permet à l’Arcom « de demander à toute personne susceptible d’y contribuer, aux fournisseurs d’accès à internet ainsi qu’à tout fournisseur de noms de domaine, de bloquer l’accès à tout [site] donnant accès aux contenus jugés illicites par une décision judiciaire ».

Or, selon l’Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes, les FAI pourraient « être soumis à une obligation de blocage de tout service de communication au public en ligne donnant accès aux contenus jugés illicites par une décision de justice alors même que ne seraient transmis aux FAI que ces contenus ».

« Une telle obligation apparaît en pratique techniquement irréaliste et sa proportionnalité soulève donc de fortes interrogations (impossibilité probable dans le cas général pour le FAI d’identifier tous les cas de mise à disposition du contenu jugé illicite, limitations intrinsèques au fonctionnement du réseau du FAI, présence de trafic chiffré opaque pour le FAI etc.) ».

Elle étend ses remarques aux parties du texte qui étendent ce blocage entre les mains des fournisseurs de nom de domaine, moteur de recherche et annuaire. Et porte des critiques identiques au blocage des sites de streaming illicites des manifestations et des compétitions sportives. 

L’Arcep y voit une disproportion contraire au règlement de 2015 « établissant les mesures relatives à un internet ouvert ». « Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et la pédopornographie, a été retenu un dispositif prévoyant que les FAI sont tenus d’empêcher par tout moyen l’accès aux services qui leur sont indiqués au moyen d’une liste d’adresses électroniques qui comprend notamment les noms de domaine », rappelle l'Autorité.

« Aussi, le dispositif prévu dans le cadre du présent article pourrait utilement s’inspirer de ces mesures à la fois pour les raisons évoquées supra mais aussi pour éviter la multiplication de pratiques hétérogènes en matière de filtrage ou de blocage ». 

Notons que l’article 19 du projet de loi Séparatisme devrait souffrir des mêmes critiques, puisqu’il permet à une autorité administrative de réclamer le blocage d’accès de tout site « reprenant le contenu du service » mentionné dans une décision judiciaire de blocage, « en totalité ou de manière substantielle ».

Commentaires (4)


Si je ne m’abuse, les avis de l’ARCEP sont purement consultatifs sur ce type de sujet, non…? Du coup nos législateurs vont faire comme pour les sites porno : aux opérateurs de se débrouiller. Facile !


Je crois que c’est effectivement consultatif, par contre le mot « disproportionné » me met la puce à l’oreille : les conseils sont là aussi pour éviter une censure pour le conseil constitutionnel.



Dans plusieurs décisions, on retrouve l’expression « porter une atteinte disproportionnée au droit de [] »



Ce n’est pas la même chose, mais le conseil d’État donne son avis sur les projets de loi. Ce n’est pas obligé de le suivre, mais c’est souvent le cas.


tpeg5stan

Je crois que c’est effectivement consultatif, par contre le mot « disproportionné » me met la puce à l’oreille : les conseils sont là aussi pour éviter une censure pour le conseil constitutionnel.



Dans plusieurs décisions, on retrouve l’expression « porter une atteinte disproportionnée au droit de [] »



Ce n’est pas la même chose, mais le conseil d’État donne son avis sur les projets de loi. Ce n’est pas obligé de le suivre, mais c’est souvent le cas.


Tout à fait d’accord. Typiquement, ce qui se passe depuis quelques années, c’est :




  • le gouvernement propose un truc abusif

  • les diverses commissions consultatives disent que c’est abusif mais OSEF, ça passe à l’Assemblée

  • les députés votent le texte avec le doigt sur la couture du pantalon, comme prévu - après tout, c’est leur rôle, non…?

  • les sénateurs amendent en disant : attention, c’est peut-être une connerie, on va faire gaffe quand-même

  • retour à l’Assemblée nationale (supposons pour simplifier que l’urgence a été décrétée), qui annule les modifications des sénateurs et votent la loi “conforme”

  • saisie du Conseil Constitutionnel par des députés de l’opposition ou des sénateurs, ou plus tard via une QPC : le texte est (comme prévu) invalidé.



obligation de blocage de tout service de communication au public en ligne donnant accès aux contenus jugés illicites…
Une telle obligation apparaît en pratique techniquement irréaliste




“Techniquement c’est assez pourtant assez simple: il suffit de détruire le service, façon OVH.
Je ne vois vraiment pas où est le problème…”



Signé: un ayant-droit.


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