161 perquisitions administratives durant le cinquième état d’urgence
Contre 612 en phase quatre
Le 03 juillet 2017 à 12h52
5 min
Droit
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Le projet de loi sur la prorogation de l’état d’urgence sera discuté en séance au Sénat les 18 et 19 juillet. En Commission des lois, les chiffres fournis montrent un effondrement de la pratique des perquisitions administratives. Un constat qui a suscité un amendement de suppression dans les rangs du PS.
Le texte du gouvernement n’a été accompagné d’aucune étude d’impact. L’oubli est volontaire ou normal puisque la loi organique de 2009 sur le sujet indique que ces documents ne sont pas obligatoires pour les « projets de loi prorogeant des états de crise ».
Cette absence est cependant problématique, puisqu’une telle étude est censée apporter des éléments précieux visant notamment à évaluer « des conséquences économiques, financières, sociales et environnementales, ainsi que des coûts et bénéfices financiers attendus des dispositions envisagées pour chaque catégorie d'administrations publiques et de personnes physiques et morales intéressées, en indiquant la méthode de calcul retenue ».
Un amendement qui laisse la loi intacte
Seulement, le projet de loi va un peu plus loin qu’une simple prorogation : le gouvernement a profité de ce véhicule pour modifier la loi de 1955 afin de tenir compte d’une récente censure constitutionnelle relative à l’interdiction de séjour.
Mais, sans doute bien conseillé, plutôt que de prévoir cette rustine dès le projet initial, il est passé par un amendement adopté comme une lettre à la poste en commission. Par ce stratagème, il a laissé intacte la qualité initiale du texte (une future loi de prorogation), tout en allant au-delà (modification de la loi de 1955 sur l’état d’urgence).
En Commission des lois du Sénat, des chiffres qu’on aurait pu trouver dans cette étude ont cependant été diffusés par le rapporteur Michel Mercier. Ils dressent un bilan de la cinquième phase de l’état d’urgence qui s’étend du 22 décembre 2016 au 15 juillet 2017, avant son introduction dans le droit commun.
161 perquisitions administratives en phase 5
On y apprend qu’au 28 juin 2017, 32 départements métropolitains n'ont pas été concernés par les mesures de l'état d'urgence. En tout, il y a eu 161 perquisitions administratives, contre 612 en phase quatre. « 33 perquisitions qui ont été décidées dans le département des Alpes-Maritimes, 15 dans le Val-d'Oise, 9 dans le Nord, 8 dans l'Essonne, 6 dans les départements de Seine-et-Marne et des Hauts-de-Seine. Dans les autres départements, peu de mesures ont été prescrites par les préfets (entre 1 et 5 perquisitions dans une quarantaine de départements) » ajoute le rapporteur.
De ces 161 perquisitions, une vingtaine de suites judiciaires sont dénombrées, sans détail. Au plus, apprend-on que certaines ont été engagées « pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ou pour apologie du terrorisme ». Le gouvernement l’assure : l’exploitation des données informatiques trouvées sur les lieux perquisitionnés « a permis de percer à jour certains projets terroristes ou d'identifier certains profils particulièrement dangereux, lesquels ont pu ensuite faire l'objet de suites judiciaires alors même que les éléments détenus initialement n'avaient pas permis d'envisager une perquisition judiciaire ».
À y regarder de plus près, 84 cas ont donné lieu à des consultations de données informatiques sur le lieu perquisitionné, 14 à des copies de données informatiques et 27 à des saisies de matériels informatiques. « S'agissant des 14 cas de copies de données informatiques sur des supports pendant les perquisitions, 6 ont donné lieu à un accord d'exploitation par le juge des référés ; dans les 8 autres cas, le ministère de l'intérieur ne dispose pas des informations ». Et pour les 27 saisies de matériels informatiques, « 19 ont donné lieu à une saisine du juge des référés, 4 ont ensuite fait l'objet de suites judiciaires, la saisie ayant alors été traitée dans ce cadre », mais « pour les 4 autres saisies, le ministère de l'Intérieur n'a pu fournir de précisions » au rapporteur.
Un sénateur PS veut désactiver les perquisitions
Le chiffre des perquisitions étant en chute libre, le sénateur Jean-Yves Leconte (PS) a déposé un amendement visant à « supprimer la possibilité du recours aux perquisitions administratives qui, dans le cadre de ce sixième renouvellement de l'état d'urgence ».
Les perquisitions sont en effet une option ouverte par la loi de 1955 devant donc être activée par chaque loi de prorogation. Or, selon le parlementaire, « si de nouveaux actes relevant de la loi pénale étaient commis, des perquisitions judiciaires seraient toujours possibles ». Surtout, « le recours à ces perquisitions administratives a énormément diminué dans la dernière phase de l'état d'urgence, démontrant l'absence d'intérêt de telles mesures dérogatoires au droit commun ».
Et celui-ci de citer le rapport de Michel Mercier qui relève que « très peu de perquisitions ont été conduites à Paris, pour une raison fort simple : le préfet de police de Paris et le procureur de la République se réunissent régulièrement et travaillent fort bien ensemble. Preuve que l’on peut rester dans le droit commun et être efficace – ceci dit sans anticiper une discussion à venir… »
161 perquisitions administratives durant le cinquième état d’urgence
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Un amendement qui laisse la loi intacte
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161 perquisitions administratives en phase 5
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Un sénateur PS veut désactiver les perquisitions
Commentaires (5)
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Abonnez-vousLe 03/07/2017 à 13h13
33 perquisitions qui ont été décidées dans le département des Alpes-Maritimes
Tiens, c’est chez Eric Ciotti qu’il y a le plus de perquisitions. Cela explique peut-être cela " />
Le 03/07/2017 à 13h15
Le 03/07/2017 à 13h23
Et sur Arnaud Bazin qui est à la tête du département classé second, tu as quoi à dire ?
Le 03/07/2017 à 13h40
” Preuve que l’on peut rester dans le droit commun et être efficace…..”
ça …c’est dit (suivant s.v.p.) !
mais, “peut-être”, que le Gouv. NE le savait pas…ça ? " />
Le 04/07/2017 à 11h21
Et E. Macron qui a déclaré à son Congrès vouloir retirer l’Etat d’Urgence pour, je cite, “rendre ses libertés au peuple français”. En tentant d’expliquer que celui-ci ne mène à rien.
Par contre, malgré la baisse des perquisitions et son intérêt tout relatif pour la population (hormis augmenter toujours plus le flicage sous couvert de la lutte antiterroriste), il se cache bien de dire qu’il va le fondre dans le droit commun…
#poudredeperlimpinpin