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La Maison-Blanche impose des règles pour restreindre les exportations de GPU pour l’IA

Baroud d'honneur

La Maison-Blanche impose des règles pour restreindre les exportations de GPU pour l’IA

AIArchitecture © Anton Grabolle / Better Images of AI

La Maison-Blanche a publié, à la quasi-surprise générale, un ensemble de règles limitant les exportations de certains composants, au premier rang desquels les puces utilisées pour l’IA. Ces règles découpent le monde en trois parties, selon la proximité politique de chaque pays avec les États-Unis. Dans le monde de la tech, des entreprises font grise mine, notamment NVIDIA.

Le 14 janvier à 17h55

Le gouvernement de Joe Biden a publié hier une série de six mesures pour mieux contrôler les exportations de composants liés à l’IA. Notant que cette dernière « devient rapidement un élément central de la sécurité et de la puissance économique », la Maison-Blanche a décidé d’agir.

« Entre de mauvaises mains, les systèmes d'IA puissants peuvent exacerber des risques importants pour la sécurité nationale, notamment en permettant le développement d'armes de destruction massive, en soutenant de puissantes cyberopérations offensives et en favorisant les violations des droits humains, telles que la surveillance de masse. Aujourd'hui, des pays préoccupants utilisent activement l'IA – y compris l'IA fabriquée aux États-Unis – de cette manière et cherchent à saper le leadership des États-Unis en matière d'IA », note le communiqué.

Le gouvernement américain estime « essentiel » de ne pas délocaliser ces technologies et « que l'IA mondiale fonctionne sur des rails américains ». Pour cela, la Maison-Blanche veut mettre en place des « normes critiques de sécurité et de confiance alors qu'ils construisent leurs écosystèmes d'IA », évoquant les entreprises et gouvernements étrangers.

Six mesures pour rester au sommet

Dans le communiqué, la Maison-Blanche annonce donc une Interim Final Rule, qui se présente comme le dernier acte fort d’un gouvernement qui prendra fin dans moins d’une semaine.

Première règle : « Aucune restriction ne s'applique aux ventes de puces à 18 alliés et partenaires clés ». Elle concerne les alliés proches des États-Unis, parmi lesquels le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon, le Royaume-Uni ainsi que l’Europe de l’Ouest pour l’essentiel, dont la France. Pour ces pays, aucune restriction ne s’applique, ni sur le type de produit, ni sur les quantités.

Ensuite, aucune licence n’est nécessaire pour les « petites commandes » : celles ne dépassant pas les 1 700 GPU avancés. « La plupart des commandes de puces, en particulier celles des universités et des groupes de recherche, entrent dans cette catégorie », indique la Maison-Blanche.

Viennent ensuite deux classifications. D’abord UVEU, ou utilisateur final universel vérifié. Une entité de confiance dans un pays allié peut demander ce statut pour placer jusqu’à 7 % de sa capacité globale de calcul IA dans le monde. « Cela permet aux États-Unis et à leurs alliés de jouer un rôle de premier plan au niveau mondial, tout en conservant les technologies d'IA d'avant-garde sur le territoire national », indique le communiqué.

Ensuite, NVEU, pour utilisateur final national vérifié. On quitte les alliés proches pour la grande majorité des autres pays, dont le Mexique, Israël ou encore le Portugal. Dans ces pays, les entités peuvent demander le statut NVEU pour « acheter jusqu'à 320 000 GPU au cours des deux prochaines années ». Ce qui permet, pour la Maison-Blanche, un accès « à la technologie américaine, avec des garanties contre l'utilisation abusive ».

Pour les autres, en bas du classement, les achats seront limités à 50 000 GPU avancés par pays. Ce chiffre peut être doublé par la signature d’accords avec les États-Unis « sur l'IA, le contrôle des exportations et la sécurité technologique ».

Des règles pour quoi ?

Les mesures s’appliquent à trois catégories de produits, dont les plus importants : les « semiconducteurs avancés ». Dans cette catégorie, les GPU sont les composants les plus surveillés. La Maison-Blanche précise que cette surveillance a surtout trait à l’entrainement des systèmes IA avancés, « tout en autorisant l'accès à des applications générales allant des télécommunications aux services bancaires ». Le gouvernement américain ne dit pas comment il compte distinguer les utilisations. C’est surtout le cas pour les « pays préoccupants ».

Viennent ensuite les modèles, pour lesquels les poids (paramètres ajustables modifiés pendant l’entrainement) ne doivent pas être transférés aux pays qui ne sont pas jugés de confiance. La restriction s’applique uniquement aux modèles à poids fermés. La Maison-Blanche demande également l’établissement de normes de sécurité pour protéger ces poids, « leur permettant d'être stockés et utilisés en toute sécurité dans le monde entier tout en aidant à prévenir l'accès illicite des adversaires ».

NVIDIA voit rouge

Dans les heures qui ont suivi la publication du communiqué, NVIDIA a pris la plume pour exprimer sa frustration, sans mâcher ses mots. Le premier vendeur de GPU au monde, que l’IA a placé dans les plus grandes capitalisations boursières de la planète, regrette « une masse réglementaire de plus de 200 pages, rédigée en secret et sans examen législatif approprié ».

Le gouvernement Biden chercherait « à saper le leadership de l'Amérique ». « Ce vaste projet imposerait un contrôle bureaucratique sur la manière dont les semi-conducteurs, les ordinateurs, les systèmes et même les logiciels américains de pointe sont conçus et commercialisés dans le monde entier. Et en essayant de truquer les résultats du marché et d'étouffer la concurrence – l'élément vital de l'innovation – la nouvelle règle de l'administration Biden menace de dilapider l'avantage technologique durement acquis par l'Amérique », fustige NVIDIA.

La dimension politique du communiqué est également prégnante. NVIDIA loue ainsi, au début de son plaidoyer, le premier gouvernement Trump qui a « jeté les bases de la force et du succès actuels de l'Amérique en matière d'IA ». Puis rebelote à la fin : « Comme l'a démontré le premier gouvernement Trump, l'Amérique gagne grâce à l'innovation, à la concurrence et au partage de nos technologies avec le monde, non en se retranchant derrière un mur d'ingérence gouvernementale ».

Au-delà de l’efficacité de ces règles sur les dangers que le gouvernement Biden souhaite éviter, la question se pose d'éventuelles conséquences financières sur les entreprises concernées. Pour Alvin Nguyen, analyste chez Forrester Research cité par TechTarget, il ne fait aucun doute : « En imposant des restrictions qui empêchent des entreprises comme NVIDIA, AMD ou Intel d'exporter vers un pays, et [s’assurent que] ce qu'elles peuvent expédier est à la fois moins puissant et en quantités plus limitées, il est garanti que cela aura un impact financier négatif sur elles ».

Les règles entreront en application dans 120 jours. Mais avec l’arrivée de Donald Trump à la présidence le 20 janvier, il n’est pas certain que ces règles restent en place. On peut imaginer que les louanges de NVIDIA au président élu et à son premier bilan sont un appel du pied clair en ce sens.

Commentaires (4)

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Ils ont oublié la vague protectionniste du premier mandat de Trump ?
Pour le coup, Biden et son gouvernement n'ont fait que reprendre, et continuer en grande partie, ce que Trump avait débuté à ce niveau. Donc venir ensuite vanter des mérites à ce dernier dans l'espoir de s'attirer ses faveurs...

Le milieu de la Tech US joue à un jeu vraiment dangereux. Et dévoile enfin son vrai visage...
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Ce sont tous des "suce-glaçons" hypocrites....
votre avatar
Je vois ce dernier act comme un moyen de voir comment les acteurs économiques se positionnent.
Et là clairement, NVIDIA a choisi son camp.
Dont acte.

Qu'ils ne viennent pas pleurer si les chinois leur raflent la mise économique sous le nez dans quelques mois, parce qu'ils n'auront penser qu'à vendre, vendre vendre de l'IA.

Et tant qu'à faire, que Trump annule les restrictions sur la lithographie en Chine aussi.
Qu'ils aient accès à des nœuds plus fins.
Enjoy !!
Juste qu'on rigole.

Nous on s'en fout en Europe. On n'a pas de techno locale. Mais on pourrait acheter des puces chinoises si ça marche mieux, à un moment.🤣
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NVIDIA qui gueule alors que sa récente bonne fortune sur les GPU n'a rien à voir avec le graphisme.

Un petit moratoire sur le NPU/IA leur permettrait p-e de revenir aux fondamentaux et arrêter d'inventer 3/4 des images pour augmenter les FPS.

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