Foxconn vient de mettre la main sur les deux tiers des droits de vote du géant japonais Sharp en l'échange d'un chèque de 489 milliards de yens, soit environ 4 milliards d'euros, coupant ainsi l'herbe sous le pied d'un fonds souverain nippon.

Ces dernières années, Sharp a connu son lot de déboires sur le plan financier. L'entreprise est criblée de dettes, ne verse plus de dividendes à ses actionnaires depuis 2012 et accumule les pertes trimestre après trimestre et sa situation ne va pas en s'améliorant. Rien que sur les neuf premiers mois de son exercice en cours, son résultat net est négatif à hauteur de 108,3 milliards de yens, soit 880 millions d'euros, et les millésimes précédents étaient déjà du même acabit. Au total, depuis avril 2012, Sharp a cumulé 864,3 milliards de yens de pertes nettes, soit 7 milliards d'euros.

La situation n'était d'ailleurs pas prête de changer sans un gros bouleversement, les marges opérationnelles des différentes activités de Sharp étant tout simplement ridicules. Sur 2015, elles étaient comprises entre 9 % pour ses services et - 7 % pour sa branche « Energy Solutions ». Son activité principale, la vente de dalles d'écran, affiche elle aussi des pertes de façon chronique, avec une marge opérationnelle de - 6 % en 2015.

Pour survivre, Sharp a multiplié les augmentations de capital auprès de diverses entreprises dont Samsung et Qualcomm, ou via des ouvertures de capital au public. Depuis mars 2013, ces opérations ont permis de faire rentrer quelque 377 milliards de yens (3,06 milliards d'euros) dans les caisses.

Deux offres sur la table

Du coup, Sharp était à la recherche d'un repreneur depuis quelques trimestres et deux candidats s'étaient manifestés jusqu'ici. Le premier n'était autre que le fonds souverain japonais Innovation Network Corp (INCJ). Son offre se composait d'un investissement de quelque 300 milliards de yens (2,45 milliards d'euros), de la promesse d'obtenir 350 milliards de yens (2,85 milliards d'euros) de prêts à des taux avantageux et de vendre certains actifs de l'entreprise pour 150 à 200 milliards de yens (1,2 à 1,6 milliards d'euros)

L'autre proposition émanait de Hon Hai Precision Industry, la maison mère du géant taiwanais Foxconn. Le fabricant a décidé de s'offrir 57,61 % des droits de votes de Sharp. À cela, il faut ajouter un investissement par SIO, un fonds détenu à 74,18 % par Terry Gou, le PDG de Hon Hai Précision Industry, ce qui porte le total à 66,07 % des droits de votes de la société. Montant total de l'opération : 484,3 milliards de yens, soit 3,93 milliards d'euros.

Sharp dit oui à Foxconn

Cette proposition, le conseil d'administration de Sharp l'a validée ce matin et déjà un plan a été mis en place pour répartir cette somme pour divers objectifs. 200 milliards de yens seront ainsi consacrés d'ici juin 2019 au déploiement de chaînes pour la production de dalles OLED tandis que 100 milliards supplémentaires serviront à la recherche et au développement dans le domaine des écrans.

Pour Foxconn, l'affaire est plutôt bonne. Le fabricant qui voit déjà passer une partie non négligeable de la production mondiale d'appareils électroniques va pouvoir profiter du savoir-faire de Sharp en matière d'écrans ou de capteurs optiques. Une solution qui lui permettra de proposer à ses clients non seulement de faire assembler leurs appareils dans ses usines, mais également de leur fournir certains des composants qu'ils intègrent. Un bon moyen de gonfler un peu plus ses marges.