Cybersurveillance : l’instruction Amesys se poursuit, Fleur Pellerin temporise
J'ai glissé chef
Le 16 janvier 2013 à 08h52
5 min
Droit
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L’information judiciaire visant la société française Amesys, actuelle filiale de Bull, accusée de complicité d’actes de tortures en Libye, va pouvoir continuer. La Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) et la Ligue des droits de l’homme (LDH)-à l’origine de cette enquête préalable à l’ouverture éventuelle d’un procès - ont en effet annoncé que la Cour d’appel de Paris avait donné son feu vert à la poursuite de l'instruction, et ce en dépit du recours effectué par le ministère public.
Rappel des faits. En octobre 2011, la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) et la Ligue des droits de l’homme (LDH) déposent plainte en France suite aux révélations du Wall Street Journal, qui mettait en cause la société française Bull, et surtout l’une de ses filiales, Amesys, suspectée d’avoir vendu des armes de cybersurveillance à la Libye de Kadhafi. Des outils considérés comme particulièrement utiles au régime du dictateur afin d'exercer sa répression à l’encontre de la population et plus particulièrement de ses opposants. Les deux associations estimaient sur un plan juridique qu’à travers cette fourniture de technologies, il y avait eu complicité de torture.
En mai 2012, et en dépit des réquisitions faites un mois plus tôt par le Parquet de Paris, la juge d’instruction saisie de cette affaire décidait de procéder à l’ouverture d’une information judiciaire, afin de faire la lumière sur ces accusations. Sauf que le ministère public avait fait appel de cette décision.
La cour d’appel valide la poursuite de l’information judiciaire
La cour d’appel vient cependant de rendre sa décision, donnant son feu vert à la poursuite des investigations, comme l'ont annoncé hier la FIDH et la LDH. « La Chambre de l’instruction est venue confirmer qu’il y avait matière à instruire dans cette affaire, malgré les obstacles posés par le Parquet de Paris, visiblement réticent à permettre une enquête impartiale et indépendante dans cette affaire », a déclaré Patrick Baudouin, avocat (et président d’honneur) de la FIDH.
Les deux associations ont également annoncé qu’il y avait du nouveau dans ce dossier, puisque la semaine dernière, cinq victimes libyennes se sont constituées parties civiles dans cette information judiciaire, par le biais de leurs avocats. « Ces victimes souhaitent pouvoir être entendues rapidement par la juge d’instruction pour expliquer les conditions dans lesquelles elles ont été identifiées, arrêtées et torturées par les services de renseignement libyens », indiquent la FIDH et la LDH.
L’avocat de la LDH, Maître Michel Tubiana, a demandé à la justice française d’enquêter avec « célérité », dans le but de déterminer « si la société Amesys, en donnant au régime de Mouammar Khadafi les moyens technologiques d’identifier toute voix dissidente, s’est rendue complice de la répression exercée à l’encontre de la population par ce régime meurtrier ».
Fleur Pellerin renvoie la balle au ministère de la Défense et à l'Intérieur
Hier, lors de la table ronde dédiée à la neutralité du Net, la ministre déléguée à l’Économie numérique Fleur Pellerin a justement été interrogée par la salle lors de la séance des questions-réponses : les atteintes à la neutralité du Net étant faites avec des technologies françaises, et donc des entreprises, la ministre a été invitée à exprimer sa position sur l’exportation de ces outils. « C’est une question qui ne concerne pas seulement Bercy, mais aussi la Défense, l’Interieur et les Affaires étrangères » a-t-elle répondu. Ce renvoi vers les autres ministères a agacé sur Twitter et chez nos confrères de Reflets.info.
Rappelons que de son côté, Reporters sans Frontières réclame notamment que ces technologies subissent en cas d’exportation un contrôle et une régulation similaires à celui des armes de guerre traditionnelles.
« Nous avons eu plusieurs réunions pour établir des positions intergouvernementales sur ce sujet. Plusieurs entreprises françaises sont leaders sur ces technologies. J’ai tendance à croire que la technologie peut-être neutre jusqu’à un certain point ensuite c’est l’usage qui fait l’objet de jugements moraux ou politique » a expliqué la locataire de Bercy.
Fleur Pellerin a ajouté que le gouvernement s’interrogeait sur l’opportunité pour la France de rajouter certains pays à une liste de pays sûrs. « C’est un travail en cours, un processus un peu long, mais j’ai bien conscience des questions éthiques et économiques ». Une analyse que partageront probablement les dissidents victimes de ces solutions de surveillance...
Une députée saisit la ministre déléguée à l’Économie numérique
Hasard du calendrier, deux questions écrites de la députée Isabelle Attard (Écologiste) étaient publiées hier au Journal officiel. L’élue y condamnait la vente par « des entreprises françaises, notamment Amesys et Qosmos », de logiciels qui auraient dû selon elle être classés en tant que matériel militaire. Considérant qu’il est « anormal que ce commerce soit autorisé », la parlementaire demande à Fleur Pellerin de bien vouloir lui expliquer ce qu’elle compte faire pour « pour que cesse la vente de technologies de surveillance à destination de régimes autoritaires, notamment en matière de classification en tant qu'arme de guerre de ces logiciels de surveillance massive ».
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La cour d’appel valide la poursuite de l’information judiciaire
Commentaires (12)
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Abonnez-vousLe 16/01/2013 à 09h29
la fleur commence sérieusement à agacer : elle l’ouvre sur des sujets d’importances moindres et fuit sur les vrais sujets.
un bon ministre quoi " />
en tout cas cela va faire mal si cela éclate au grand jour : d’un coté on aide le Mali et de l’autre….
Fail spotted
Le 16/01/2013 à 09h49
Fleur fait la course avec Aurélie pour remporter le trophée de la plus décevante.
Elle sont également nominées dans les catégories “perroquets”, “girouettes” et concourent pour le prix “t’a rien compris”
Et l’attitude des ministres successifs sur ce sujet montre non pas une méconnaissance et le manque d’envie de s’en occuper, mais de plus en plus une volonté de masquer, de protéger les petits copains, ou pire d’éviter un vrai scandale d’état cross-parti.
C’est vraiment pas beau cette histoire.
Le 16/01/2013 à 09h54
Ce genre de matériel doit être détruit et ces compagnies ruinées.
La neutralité des réseaux en dépend.
Après que le parquet de paris aie essayé de s’interposer ne m’étonne pas du tout,
dans le genre aussi utile qu’un parpaing à une musaraigne c’est difficile de faire pire.
La France à vendu le matériel il ne lui reste qu’à assumer ses responsabilités.
Le 16/01/2013 à 09h59
La France est d’ailleurs reconnaissante si un des “terroristes” du Mali pouvait se rendre au QG pour leur expliquer le fonctionnement du matériel qu’elle leur a vendu quelques temps au paravent ;) Merci de votre compréhension " />
Le 16/01/2013 à 10h35
Elle a vraiment pas de couilles… oh! wait!
Le 16/01/2013 à 10h43
Le 16/01/2013 à 10h56
d’un coté on fait de l’esbrouffe et on se donne de la contenance sur des sujets au ras des paquerettes sur lesquels on ne peut rien faire ou presque, du style “hashtags sur twitter” (là y’a du buzz au ministère), de l’autre on esquive totalement les sujets délicats du style “vente d’armes de surveillance massive”, sur lesquels le gouvernement a visiblement un vrai pouvoir de décision.
question: la ministre et ses confrères vont-ils passer les 4 prochaines années à essayer de passer entre les gouttes? parce que ça fait des vrais morts, là, pas des pauvres petits enfants choqués via twitter. et parce qu’on continue à en vendre, récemment au Maroc.
Quand Aziz Ridouan le conseiller presse et communication de la ministre traite Reflets -qui a sorti l’info il y a maintenant 2 ans et tient les documents à dispo de la justice- de gros trolls en se foutant ouvertement de leur gueule, on croit rêver: ils n’en ont juste rien à branler.
Ce ministère de l’économie numérique est un paravent, une coquille vide qui traite des sujets du niveau faits divers.
c’est à la limite des emplois fictifs, là.
Le 16/01/2013 à 11h29
Le 16/01/2013 à 11h32
J’ai tendance à croire que la technologie peut-être neutre jusqu’à un certain point ensuite c’est l’usage qui fait l’objet de jugements moraux ou politique » a expliqué la locataire de Bercy.
Je ne saurai trop vous recommander Franck Lepage pour l’exercice de comm’. Il est excellent mais surtout c’est une grosse leçon.
Ici on a : “neutre” et “usage”. Exactement le même genre de discours que ceux qui vendent des armes. “Ce n’est pas le pistolet qui tue, c’est celui qui l’utilise, blah blah” etc… C’est vraiment un épouvantail cette ministre(sse).
Le 16/01/2013 à 11h38
Le 16/01/2013 à 17h19
Oulalala!
Je vais en rajouter une couche: amesys et qosmos étaient/sont de véritables vautours du marché de l’emploi.
On m’a proposé explicitement des postes sur eagle d’amesys et chez qosmos.
Pour eagle d’amesys, j’ai demandé en entretien téléphonique si clairement ils réalisaient qu’ils fabriquaient et vendaient des armes numériques (réutilisables pour hadopi).
Qosmos (également réutilisable pour hadopi) semble plus orienté “logiciel” que amesys (qui a du hard spécialisé pour faire de la masse).
Souvent, ils s’avancent comme entreprise fabriquant des solutions d’optimisation de performance réseau ou de sécurisation réseau… mais oui, et moi je suis la reine d’Angleterre. Ils ne m’ont plus embêté quand je leur ai dis que pour les softs orientés réseau ct GNU GPL et publique sur internet .
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Le 16/01/2013 à 20h50