Bientôt un statut spécifique pour les données d’intérêt général ?
À CADA sur mon bidet
Le 24 mars 2015 à 14h41
5 min
Droit
Droit
Pour arriver à imposer l’ouverture de données dites « d’intérêt général », le rapport Jutand a récemment recommandé au gouvernement de créer un nouveau statut spécifique aux informations se situant à la frontière du « public » et du « privé » (transports, santé...). Une piste que pourrait suivre l’exécutif au travers du futur projet de loi numérique.
Axelle Lemaire, la secrétaire d’État au Numérique, l’a redit la semaine dernière devant l’Assemblée nationale : « Je souhaite créer un nouveau statut de données, les données d'intérêt général, qui sont à l'origine des données commerciales qui appartiennent à des entreprises mais qui, si elles étaient ouvertes, pourraient bénéficier à la communauté et à l'intérêt général. » La locataire de Bercy, qui ambitionne de « donner à la France cinq ans d'avance dans la culture de la donnée », sait pertinemment que le secteur privé n’est pas tenu d’ouvrir ses informations de la même manière que l’administration, quand bien même celles-ci seraient particulièrement précieuses pour la collectivité.
Des « informations d’intérêt général » qui seraient réutilisables de plein droit
Si l’intéressée est restée plutôt vague sur l’introduction d’un tel statut dans notre droit, le rapport remis il y a une dizaine de jours au gouvernement par Francis Jutand nous donne davantage de précision sur la façon dont celui-ci pourrait se concrétiser.
« Aux termes de la loi CADA, les seules données réutilisables sont les informations publiques, c’est-à-dire les informations produites dans l’exercice d’une mission de service public à caractère administratif » expose d’entrée le rapport du comité sur l’ouverture des données de transport. L’idée est donc de dépasser très largement cette contrainte, en faisant en sorte que toute « information d’intérêt général » soit « réutilisable de droit », de la même manière qu’une information publique. Voici la définition proposée par le rapport Jutand :
« Une information d’intérêt général (IIG) est une information produite dans le cadre de services au public dont l’ouverture est considérée d’intérêt général, car elle rend possible la mise en place de nouveaux services à l’intention du public ».
Il y aurait donc deux conditions cumulatives pour que des données soient considérées comme « d’intérêt général ». Premièrement, il faudrait que les informations concernées aient été produites dans le cadre de « services au public ». De nombreux domaines pourraient de ce fait être visés : transports, éducation, santé... Deuxièmement, l’ouverture de ces données devrait être considérée comme « d’intérêt général ». Une notion assez vaste et surtout susceptible d’évoluer au fil du temps.
L’avantage d’une telle définition ? Ne plus avoir besoin de rechercher un lien entre le producteur des données et une personne publique (convention entre une société de bus et un Conseil général par exemple) ; tout en conservant une grande latitude sur les catégories de données pouvant rentrer dans le champ de l’intérêt général.
Une logique « totalement distincte de celle de la loi CADA »
Toutefois, souligne le rapport Jutand, ce nouveau droit « s’exercerait selon une logique totalement distincte de celle de la loi CADA ». Le mécanisme retenu par la loi de 1978 repose pour mémoire sur une logique de communication des documents administratifs sur demande des citoyens, et non pas d’une ouverture par défaut. Il est ainsi expliqué que ce nouveau statut propre aux informations d’intérêt général :
- « ne s’articulerait pas à un droit à communication des documents administratifs (une partie seulement de ces informations étant susceptible d’être contenue dans de tels documents) ;
- s’exercerait indifféremment de la distinction entre mission de service public administratif et mission de service public industriel et commercial ;
- pourrait, dans certains cas, s’étendre à des données produites par des personnes privées dans le cadre d’un service ne relevant pas d’un service public, mais faisant l’objet d’une convention avec une personne publique ;
- pourrait, in fine, s’étendre à des données purement privées. À titre d’exemple, des données relatives aux bornes de recharge des véhicules électriques ou au guidage indoor, de source privée, pourraient être déclarées IIG. »
Une des pistes du projet de loi numérique
Tout en reconnaissant ne pas avoir « pu procéder à l’analyse approfondie de ces pistes de travail », le comité sur les données de transport a vivement recommandé au gouvernement d’examiner « l’opportunité de créer une notion d’information d’intérêt général, applicable à de nombreux domaines (transports, logement, santé, etc.) » dans le cadre des travaux préparatoires au projet de loi numérique, dont la présentation en Conseil des ministres est promise pour le mois de juin.
« La ligne à trouver est délicate » a néanmoins concédé Axelle Lemaire le mois dernier, en annonçant que ses services avaient commencé à étudier cette piste de près. « Il faut à la fois respecter la libre concurrence, les données personnelles et la vie privée, le secret des affaires naturellement ; et puis en même temps inciter, si possible de manière contractuelle, certains acteurs économiques à ouvrir plus largement leurs données. »
Bientôt un statut spécifique pour les données d’intérêt général ?
-
Des « informations d’intérêt général » qui seraient réutilisables de plein droit
-
Une logique « totalement distincte de celle de la loi CADA »
-
Une des pistes du projet de loi numérique
Commentaires (11)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 24/03/2015 à 15h37
ça promet plein de bonnes choses ces ouvertures, pleins de sources pour des outils performants c’est toujours un plus en donnant un statut juridique concret aux données ouvertes en poussant certaines données à devoir être ouvertes.
On sent quand même que ce n’est pas forcément évident entre données publiques, données privées, données publiques mais confidentielles et ouvertes et données privées et ouvertes.
Encore à creuser mais c’est intéressant.
Le 24/03/2015 à 15h40
Ouais ,je vois cela…
J’aime jamais ça…m’enfin!
Le 24/03/2015 à 15h47
Le 24/03/2015 à 15h51
Le 24/03/2015 à 15h53
Mais l’expérience et le passé …ne sont pas favorables à ton second choix " />
Le 24/03/2015 à 16h02
Certes " />
Disons que l’Open data semble un sujet moins brulant que la copie et le téléchargement donc peut-être moins soumis aux problématiques de lobbyisme excessif ou d’arrangements à la limite de la corruption.
Après effectivement rien n’empêche que ça ne parte en grand n’importe quoi par la suite, mais encore faut-il avoir les infos.
Le 24/03/2015 à 17h39
En plus des entreprises les données issues de la recherche publique pourraient rentrer dans ce cadre. Pour le moment ces données sont assez souvent conservées sur un disque dur et jamais réutilisées… Il peut y avoir des problèmes de confidentialité (données médicales par exemple) mais il y a des solutions. Ils vont déjà dans cette direction aux US :http://grants.nih.gov/grants/NIH-Public-Access-Plan.pdf
Donc bonne initiative du gouvernement :)
Le 24/03/2015 à 17h56
En tout cas le sujet des données ouvertes a une riche actualité en ce moment. C’est peut-être la seule chose à mettre au crédit du gouvernement, il ne faut pas s’en priver " />
Le 24/03/2015 à 19h45
Next INpact Next INpact
Pour moi ce cas était un sketch!
Mais ça rentre dans tes “exceptions” de monopole…
" />
Le 24/03/2015 à 14h48
Sous titre " />
Cela me fait pensait que mon dernier veut aller sur les toilettes, on va lui sortir le pot …" />
Ça pousse trop vite.
Mais ,j’ai du mal à voir qui va définir l’intérêt général ici. (je vais relire ;) )
Le 24/03/2015 à 15h22
Je suis surpris que ce genre de choses n’ait pas déjà été prévu dans les contrats de services publics. C’est bien le minimum requis.
Les transports publics n’ont aucun intérêt si l’on ne peut connaitre par avance leurs horaires.
Quant au privé, excepté les cas de monopole (genre sncf), libre à eux de ne pas partager leurs horaires. Ils perdront autant de clients.