Google AdSense : le Tribunal de l’UE annule l’amende de 1,49 milliard d’euros
10 ans d'enquête et un oubli
En 2019, La Commission européenne infligeait une amende de 1,49 milliard d'euros d'amende pour pratiques abusives. Le Tribunal de la Cour de justice de l'Union européenne vient d'annuler cette décision. Le Tribunal considère que la Commission s'est appuyée à tort sur le cumul de durées d'accords de services sans vérifier qu'il était impossible de s'en défaire.
Le 18 septembre à 13h08
4 min
Droit
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Lancée en 2010, l'enquête sur les accords de services d'Adsense for Search avait pourtant duré neuf ans. En parallèle de l'enquête, plusieurs entreprises comme Microsoft, Deutsche Telekom ou encore Expedia ont déposé plainte contre Google. La Cour de justice de l'Union européenne vient d'annuler la décision de la Commission concernant cette enquête.
Pour la Commission, des accords imposés grâce à une position dominante
La conclusion de la Commission était que Google avait imposé « un certain nombre de clauses restrictives dans les contrats passés avec des sites web tiers, empêchant ainsi ses concurrents de placer leurs publicités contextuelles sur ces sites ». Et ceci pendant plus de 10 ans, affirmait la commissaire européenne Margrethe Vestager. Mais la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) considère que la Commission a pris un raccourci dans ses conclusions et a annulé l'amende.
L'entreprise avait été officiellement prévenue en 2016 des reproches de la Commission : Google imposait des règles d'exclusivité et des contraintes d'affichage et de volume à des partenaires directs via la signature d'accords en s'appuyant sur sa position dominante sur le marché des intermédiaires publicitaires en Europe (80 % de part de marché en Europe).
La Commission avait fixé l'amende à 1,49 milliard d'euros alors que certaines rumeurs évoquaient à l'époque un montant record de 12 milliards d'euros. Mais Google n'était pas pour autant satisfaite et a porté l'affaire devant la Cour de justice de l'Union européenne.
Une prise en compte erronée de la durée cumulée des accords
Le Tribunal de la CJUE confirme la plupart des appréciations de la Commission, mais, comme elle l'explique dans son résumé, elle considère que son analyse est « entachée d’erreurs » sur deux points.
Le principal problème pointé est le fait que la Commission a cumulé la durée des « accords de services Google » (ASG) négociés entre Google et les entreprises voulant utiliser AdSense for Search avec des clauses particulières, sans prendre en compte « la durée de chacun desdits ASG, pris individuellement, ni de la durée de chacune de leurs éventuelles prolongations ».
En conséquence, la Commission n'a pas pris en considération les « conditions réelles et [les] modalités selon lesquelles ces prolongations avaient été convenues ni de la teneur des clauses prévoyant des droits de résiliation unilatérale, dont disposaient certains des partenaires directs tous sites, ou des conditions dans lesquelles ces droits pouvaient être exercés ».
La Cour de justice de l’Union européenne remarque que dans ces conditions, la Commission « ne pouvait [...] pas exclure que ces partenaires directs disposaient de la faculté de s’approvisionner auprès d’intermédiaires concurrents de Google au terme de chacun de leurs ASG, ni, partant, constater que lesdits partenaires directs avaient été obligés de s’approvisionner auprès de Google pour la totalité ou une part considérable de leurs besoins pendant l’intégralité de la durée cumulée de leurs ASG ».
Des erreurs entachant l'ensemble de la décision
De façon plus anecdotique, la CJUE remarque que la Commission n'a pas identifié, pour la seule année 2016, la part du marché de l’intermédiation publicitaire liée aux recherches en ligne couverte par la clause d’exclusivité contenue dans les ASG conclus par les partenaires directs tous sites. Rappelons que c'est lors de cette année-là que la Commission a bouclé son enquête préliminaire qu'elle a envoyée à Google.
Pour la CJUE ces différentes erreurs « entachent l’ensemble des restrictions identifiées par la Commission, de sorte qu’elle n’a pas démontré, à suffisance de droit, que les clauses litigieuses avaient eu la capacité de produire l’effet d’éviction constaté dans la décision attaquée ».
Comme le rappelle la Cour de Justice de l’Union européenne dans son communiqué (PDF), « Un pourvoi, limité aux questions de droit, peut être formé, devant la Cour, à l’encontre de la décision du Tribunal, dans un délai de deux mois et dix jours à compter de sa notification ».
Google AdSense : le Tribunal de l’UE annule l’amende de 1,49 milliard d’euros
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Pour la Commission, des accords imposés grâce à une position dominante
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Une prise en compte erronée de la durée cumulée des accords
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Des erreurs entachant l'ensemble de la décision
Commentaires (8)
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Abonnez-vousLe 18/09/2024 à 14h37
Le 18/09/2024 à 15h06
Le 18/09/2024 à 15h24
Dans nos systèmes ce n'est pas d'être en position dominante qui cause problème mais d'en abuser.
Or, concrètement, faire des contrats courts est un signe que tu ne cherches pas à abuser de ta position dominante (même si tu peux le faire d'autres façons voire par le contexte lui-même; mais ce n'est pas l'élément avancé ici).
Le 18/09/2024 à 17h56
C'est dans le manuel du parfait dealer...
Le 18/09/2024 à 18h06
Le 18/09/2024 à 18h55
Donc 20% passent par d´autres canaux.
Aucun site n´a besoin de diffuser la pub venant de 80% des annonceurs (sinon le site est juste une immense page de pub).
Donc il doit être possible de se rabattre sur une partie des 20 autres pourcents. Et donc de se passer de Google sans nécessairement en pâtir.
(Je dis de la merde ou pas?)
Le 18/09/2024 à 15h26
Modifié le 18/09/2024 à 15h50
Si le contrat est censé durer 10 ans mais qu'il y a une clause "on peut résilier après 1 an". C'est normal qu'on puisse pas attaquer en justice en disant "je suis engagé pendant 10 ans c'est trop long". C'est juste faux, juste engagé pendant 1 an.
C'est une simplification a l'extrême, la Commission n'aurait pas fait une erreur aussi évidente, mais elle n'a pas écrit dans son argumentaire qu'elle a vérifié qu'il n'y avais pas de telle clause.
La Commission va juste vérifier comme il faut les durées et remettre une amende.
J'aime bien voir Google se prendre des amendes, mais j'aime encore mieux quand ils se prennent des amendes justes, pas des amendes sur des soupçons non vérifiés. Sinon c'est la fin de l'État de droit si on condamne sur des soupçons.