Exposition aux ondes et affichage du DAS : des anomalies dans 57 % des établissements contrôlés par la DGCCRF

Exposition aux ondes et affichage du DAS : des anomalies dans 57 % des établissements contrôlés par la DGCCRF

C’était « raisonnablement prévisible »…

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Sébastien Gavois

Publié dansSociété numérique

28/11/2022
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Exposition aux ondes et affichage du DAS : des anomalies dans 57 % des établissements contrôlés par la DGCCRF

L’affichage du DAS des équipements radioélectriques (smartphones, montres, ordinateur…) présente d’importantes carences selon la DGCCRF. Sur 470 établissements visités, pas moins de 270 étaient en anomalie, notamment car « l’utilisation raisonnablement prévisible » d’un produit n’est pas toujours comprise. 8 procès-verbaux ont été dressés.

Le DAS (Débit d’Absorption Spécifique) permet de quantifier l’énergie transportée par les ondes électromagnétiques qui est absorbée par le corps humain. Il s’exprime en watt par kilogramme (W/kg) ; les limites réglmentaires sont fixées par décret, avec 2 ou 4 W/kg suivant le type de mesures. Nous avons déjà longuement évoqué ce sujet dans un dossier.

DAS tête, tronc et membre

Il y a ainsi le DAS tête qui « reflète l’usage du téléphone à l’oreille, en conversation vocale ». On retrouve également le DAS tronc censé reproduire l’usage d’un téléphone porté près du tronc, par exemple dans une poche ou un sac avec une distance de 5 mm avec le corps. La France, suite à une recommandation de l’ANSES, a demandé à la Commission européenne de revoir sa copie pour passer à 0 mm, mais ce n’est pas (encore ?) fait.

Enfin le dernier est le DAS membre ajouté plus récemment (juillet 2020). Il correspond à « l’usage du téléphone plaqué contre un membre, par exemple tenu à la main, porté dans un brassard ou dans une poche de pantalon ». Si la valeur limite des deux premiers (DAS tête et tronc) est à 2 W/kg, on passe à 4 W/kg pour le DAS membre.

Des anomalies dans 57 % des établissements contrôlés

Depuis 2020, le champ d’application du DAS dépasse les seuls « terminaux » pour englober une liste bien plus large de produits avec l’ensemble des « équipements radioélectriques, dont la puissance d'émission est supérieure à 20 mW et dont il est raisonnablement prévisible qu'ils seront utilisés à une distance n'excédant pas 20 cm de la tête ou d'une autre partie du corps humain ».

On retrouve donc les téléphones mobiles, les tablettes et montres connectées avec carte SIM, les routeurs 3/4/5G, les ordinateurs portables avec 3/4/5G, ainsi que certains téléphones sans fil à la norme DECT, talkie-walkie, micro sans fil, drones, tablettes et ordinateurs Wi-Fi, etc.

En France, l’Agence nationale des fréquences (ANFR) s’occupe de contrôler le DAS des produits mis en vente sur le territoire. Elle peut prélever des smartphones dans les boutiques et mander un laboratoire pour vérifier que le niveau de DAS ne dépasse par le seuil autorisé. L’Agence ne peut pas sanctionner un dépassement, seulement une récidive… avec une amende administrative de 7 500 euros seulement. Samsung, dernier fabricant condamné pour le moment, doit encore avoir du mal à s’en remettre (ou pas).

De son côté, la DGCCRF « assure le contrôle de la bonne information des consommateurs en la matière ». Les résultats de sa dernière enqûete sur l’année 2021 ne sont pas bons, loin de là : des anomalies ont été constatées dans 57 % des établissements contrôlés. Voici le détail des chiffres :

  • 470 établissements visités
  • 270 établissements en anomalie
  • 212 avertissements
  • 53 injonctions
  • 8 procès-verbaux

Les injonctions et avertissements portent « essentiellement sur les défauts relatifs à l’affichage du DAS », précise le bilan d’enquête. De leur côté, les procès-verbaux « sanctionnent essentiellement l’absence de mise en conformité à l’issue de contrôles réalisés ont également été dressés ».

DGCCRF DAS

La situation empire par rapport à 2013

Le constat est donc pire qu’en 2013, lors de la précédente enquête sur l’information relative au DAS. Des anomalies avaient été repérées dans « 55 % des 379 entreprises contrôlées ». Cela avait à l’époque conduit à 210 avertissements et 5 procès verbaux.

En 2013, il était précisé que « les vérifications menées en coopération avec l’Agence nationale des fréquences (ANFR), ont permis de constater qu’aucun des téléphones testés en laboratoire n’avait un DAS supérieur à 2 W/kg ».

La situation est bien différente ces dernières années, avec des smartphones épinglés tous les ans. Une mise à jour vient généralement corriger le souci, mais le constructeur procède parfois à un retrait. C’est plus rare, mais il arrive que la mise à jour ne suffise pas et qu’un deuxième round soit nécessaire. Citons également le cas de Leagoo et Allview qui n’ont jamais répondu aux sollicitations de l’ANFR et dont les smartphones ont été interdits à la vente. 

Un DAS de zéro « techniquement irréaliste »

Les enquêteurs de la répression des fraudes ont non seulement constaté l’absence d’affichage du DAS, mais aussi « la présence bien plus fréquente d’un affichage non conforme sur certains produits soumis à cette obligation ».

Dans le lot, on retrouve des « affichages trompeurs indiquant un DAS de zéro, ce qui apparaît techniquement irréaliste pour ce type de produits émetteurs d’ondes électromagnétiques ». Dans d’autres cas, la mention obligatoire sur le DAS était « inaccessible car masquée par des étiquetages promotionnels ».

La DGCCRF a relevé des anomalies dans pas moins de 61 % des cas avec les manquements suivants :

  • le DAS membres pour 38 % des produits ;
  • le DAS tronc pour 37 % des produits ;
  • le DAS tête pour 46 % des produits.   

Le DAS concerne à la fois les produits neufs et les produits d’occasion. « Or, des anomalies ont été détectées dans 75 % des établissements contrôlés de la catégorie des enseignes d’occasion (dont reconditionné) ». Bref, il y a encore beaucoup de travail pour arriver à une information correcte aux clients.

DGCCRF DAS

« L’utilisation raisonnablement prévisible » pas si prévisible pour certains

Dans le cas des ordinateurs portables, le DAS tronc était général effectivement indiqué, mais pas le DAS membre qui était très souvent absent, ce qui est d’autant plus problématique qu’avec « l’utilisation raisonnablement prévisible de ce produit, c’est-à-dire sans clavier alphanumérique supplémentaire, les mains et les bras des utilisateurs sont fréquemment en contact avec l’ordinateur ».

Autre souci avec les tablettes : « les enquêteurs ont constaté une absence quasi-systématique d’indication du DAS tête. Toutefois, dans le cadre des usages raisonnablement prévisibles de ce type d’équipement, la tablette peut être utilisée à une distance de moins de 20 cm de la tête  pendant des périodes prolongées par exemple quand la tablette est posée sur les genoux, jambes repliées (par exemple sur un canapé ou un lit) ou lors de son usage dans une salle de classe, les élèves adoptant alors des positions dans lesquelles leur tête est fréquemment proche de leur support de lecture ou d’écriture ».

Concernant les montres permettant de suivre la qualité du sommeil, les usages « raisonnablement prévisibles apparaissent impliquer une utilisation, sur des durées significatives, à une distance de moins de 20 cm de la tête de l’utilisateur, notamment lorsque celui-ci dort avec la montre au poignet ». Problème, le DAS tête est « quasi systématiquement » absent pour cette catégorie de produits.

DGCCRF DAS

L’application des dispositions réglementaires « reste largement perfectible »

Pour la répression des fraudes, « les usages raisonnablement prévisibles ne sont pas pris en compte de façon adaptée ».

Il ressort de l’enquête de la DGCCRF que « la plupart des professionnels connait la signification du DAS mais que l’application des dispositions réglementaires en la matière reste largement perfectible ». De plus, « la majorité des distributeurs ne connaissant pas la réglementation sont des distributeurs non-affiliés à une grande enseigne et qui ne disposent donc pas de service juridique dédié ».

Des résultats « alarmants » pour Phonegate, qui lance un appel

« Au vu de résultats aussi alarmants », Marc Arazi (président de l’association Alerte Phonegate) demande au gouvernement « d’opter pour des réglementations plus contraignantes pour protéger la santé de tous les utilisateurs de téléphonie mobile, à l’échelon national comme européen ».

Contacté, Marc Arazi nous donne un exemple des changements qui pourraient être opérés : « inscrire les niveaux de DAS directement au dos du portable ou de l'objet connecté avec au mieux une phrase déconseillant le contact prolongé au contact du corps ».

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Sommaire de l'article

Introduction

DAS tête, tronc et membre

Des anomalies dans 57 % des établissements contrôlés

La situation empire par rapport à 2013

Un DAS de zéro « techniquement irréaliste »

« L’utilisation raisonnablement prévisible » pas si prévisible pour certains

L’application des dispositions réglementaires « reste largement perfectible »

Des résultats « alarmants » pour Phonegate, qui lance un appel

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Commentaires (8)


mic2 Abonné
Il y a 1 an

Gérant d’un magasin de téléphonie mobile j’ai eu ce contrôle en début d’année. Cette information sur le DAS est lue par beaucoup de consommateurs pour faire leur choix. Je suis par contre surpris quand je surfe sur des sites comme amazon qui n’affichent que très rarement le DAS (et pas seulement sur le market place)… La législation serait-elle différente pour eux ou les contrôles trop compliqués ? La loi est la même pour tout le monde, que la DGCCRF aille au bout du sujet !


spidermoon Abonné
Il y a 1 an

Il manque le DAS “prisonnier”, pour les téléphones porté très très près du corps :transpi:


AncalagonTotof Abonné
Il y a 1 an

Was ist DAS ?


donutboy63 Abonné
Il y a 1 an

:yes:


Arkeen Abonné
Il y a 1 an

Marc Arazi (président de l’association Alerte Phonegate) demande au gouvernement « d’opter pour des réglementations plus contraignantes pour protéger la santé de tous les utilisateurs de téléphonie mobile, à l’échelon national comme européen ».




Rhoooooo, tout de suite ! Laissons plutôt les industriels s’auto-réguler et prendre leurs responsabilités* face au phénomène, c’est la seule manière d’obtenir de vrais résultats qui garantiront le respect des lois et qui ……. non, je déconne.




  • 7500 € TTC la responsabilité


Rhebian Abonné
Il y a 1 an

spidermoon a dit:


Il manque le DAS “prisonnier”, pour les téléphones porté très très près du corps :transpi:




:mdr2:


Abatonimus Abonné
Il y a 1 an

Message supprimé


OlivierJ Abonné
Il y a 1 an

Autant on surveille des choses importantes (additifs dans les aliments, véracité des composition, qualité de l’eau, etc.), autant tous ces tests et ces gens affectés à mesurer ces histoires de DAS, je trouve ça navrant quand on sait qu’on n’a jamais mesuré d’impact sur la santé (et pour cause vu qu’il ne s’agit pas de rayonnements ionisants).



On est plutôt dans l’anti-science et la superstition qu’autre chose. On plaisante sur les gens qui mettraient des chapeaux en aluminium mais c’est proche.