La pollution lumineuse augmente rapidement
Lumière aveuglante
Le 24 janvier 2023 à 09h55
5 min
Sciences et espace
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Une étude scientifique utilisant plus de 50 000 observations d'astronomes amateurs conclut à une augmentation moyenne de 10 % de la luminosité du ciel par an entre 2011 et 2022.
On sait que notre utilisation de la lumière la nuit perturbe notre perception du ciel et des étoiles ainsi que le rythme de vie de certains animaux. Mais il est difficile de la quantifier de manière globale et de connaître son évolution.
Les satellites actuels qui pourraient permettre de faire des analyses de la planète entière n'ont que des instruments limités en résolution et en sensibilité, et ne peuvent pas détecter la lumière en dessous de 500 nm de longueur d'onde.
Or, depuis 10 ans, nous utilisons de plus en plus des LED dont la longueur d'onde est de 450 nm (parfois 430 nm), solution très économe en énergie. Près de la moitié (47 %) des lampes d'extérieur achetées dans le monde en 2019 étaient des LED alors qu'elles ne représentaient que 1 % du marché en 2011. Ces longueurs d'onde se dispersent aussi plus facilement dans l'atmosphère, ce qui contribue à la lueur du ciel.
50 000 observations à l'œil nu
Les scientifiques cherchent donc d'autres façons de quantifier cette pollution lumineuse. L'Agence spatiale européenne (ESA) a, par exemple, analysé les photos prises par les astronautes à bord de la station spatiale internationale.
Mais des scientifiques du Centre de recherche des sciences de la Terre allemand (Deutsches GeoForschungsZentrum en allemand, GFZ) et du Laboratoire de recherche en astronomie optique-infrarouge d'Arizona (National Optical-Infrared Astronomy Research Laboratory en anglais, NOIRLab) ont eu l'idée de mettre à contribution la très grande communauté d'astronomes amateurs. Les résultats ont été publiés dans un article scientifique paru dans la revue Science.
Pour cela, ils ont utilisé les données d'un projet participatif d'astronomie mis en place par le NOIRLab, Globe at Night. Le principe est assez simple. Vous voulez aider les astronomes professionnels ? Sortez avec votre GPS allumé, le site vous géolocalise et vous propose huit cartes du ciel avec les différentes étoiles que vous pouvez voir. Il vous suffit ensuite de choisir celle qui correspond à la vision du ciel que vous avez ce soir-là. Plus il y aura de lumière dans votre ciel, moins vous pourrez voir d'étoiles.
Capture d'écran du site Globe at Night
Cette observation citoyenne fournit aux chercheurs une estimation de la luminosité des étoiles qu'on peut observer à l'œil nu à un endroit et à un moment donnés. Les auteurs de l'article ont appelé ça une « estimation de la magnitude limite à l’œil nu » (naked eye limiting magnitude, en anglais, NELM), la magnitude étant la luminosité d'un astre en astronomie.
Plus la NELM est petite, moins on voit d'étoiles et plus la pollution lumineuse est importante. Toutes les données observées sont ensuite regroupées pour être étudiées. Elles peuvent aussi être récupérées par tout un chacun sur le site du projet.
Augmentation de 10 % de la luminosité par an
Les auteurs de l'étude ont ensuite utilisé une modélisation pour passer de ce NELM à une estimation de la clarté du ciel. Résultat, la luminosité de la nuit augmenterait de 10 % par an dans les zones observées par les astronomes amateurs. Les chercheurs insistent en précisant que, sur une période de 18 ans, ce taux équivaut à une multiplication par quatre de la luminosité du ciel et que de 250 étoiles visibles, on n'en voit plus que 100 à la fin de cette période.
Ce taux est beaucoup plus élevé que les 2 % observés par satellites entre 2012 et 2016 dans les longueurs d'onde de 500 à 900 nm. Les chercheurs expliquent cette différence par l'utilisation de plus en plus massive des LED qui produisent de la lumière bleue. Celle-ci n'est pas visible par les satellites.
De plus, la lumière bleue se diffuserait davantage dans l'atmosphère, ce qui entraînerait une clarté du ciel plus importante pour l'œil humain. Selon eux, les satellites ne peuvent pas non plus observer la lumière qui se propage horizontalement. Or, celle-ci contribue énormément à la luminosité du ciel et les publicités et décorations lumineuses qui en produisent beaucoup ont pullulé ces dernières années.
Des données complémentaires
Évidemment, les observations citoyennes ont des limites. Elles ne représentent pas la moyenne sur tout le globe, puisque les astronomes amateurs sont généralement situés dans les pays occidentaux. Mais les chercheurs font remarquer que ce sont aussi les régions où la luminosité du ciel est la plus répandue. Ils pensent d'ailleurs sous-estimer la tendance dans les pays dont le développement économique est rapide.
Les auteurs ne pensent pas que leur méthode remplace les observations des satellites, mais qu'elle permet d'ajouter des informations complémentaires.
La pollution lumineuse augmente rapidement
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50 000 observations à l'œil nu
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Augmentation de 10 % de la luminosité par an
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Des données complémentaires
Commentaires (18)
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Abonnez-vousLe 24/01/2023 à 10h03
De plus en plus de ville éteignent les éclairages extérieur la nuit, et c’est une bonne chose. Dans mon pti patelin de 1500 habitant tout est coupé à 23h.
Y a même des endroits ou la municipalité fourni une appli qui permet d’activer l’éclairage extérieur à la demande (quand on passe quoi), c’est pas mal ^^
Le 24/01/2023 à 10h10
Pas mieux, je me suis étonné de voir des étoiles, faute d’éclairage urbain.
Ça a des avantages :)
Le 24/01/2023 à 12h10
Dans ma région, c’est clairement pas par sensibilité à la pollution lumineuse qu’ils commencent à éteindre ou diminuer les éclairages publics. C’est lié uniquement à l’augmentation massive du prix de l’électricité…
Y a pas de doute, on est dans le progrès….
Le 24/01/2023 à 10h34
J’ai toujours trouvé l’éclairage urbain bien trop fort. Je trouve anormal de voir comme en plein jour la nuit, d’ailleurs en peut ne pas mettre les phares de sa voiture et ne pas s’en rendre compte tellement c’est bien éclairé.
Le 24/01/2023 à 10h43
Elles peuvent aussi être récupérées par tout un chacun sur le site du projet.
Toutes les données sont publiées sous licence CC by 4.0 ; c’est vraiment chouette.
Le 24/01/2023 à 10h55
Et pendant ce temps-là, en France, la convention citoyenne pour le climat proposait de supprimer purement et simplement toutes les publicités de l’espace public et à la fin, le gouvernement décide d’« éteindre les publicités lumineuses sont éteintes entre 1 heure et 6 heures, à l’exception de celles installées sur l’emprise des aéroports, et de celles supportées par le mobilier urbain affecté aux services de transport et durant les heures de fonctionnement desdits services, à condition, pour ce qui concerne les publicités numériques, qu’elles soient à images fixes. »
C’est toujours mieux que rien mais tellement en-deça de ce qu’il faudrait faire (comme tout le reste de ce qui a été « repris » des propositions de la convention citoyenne pour le climat).
Le 24/01/2023 à 11h49
Après la publicité fait vivre certaines communes, ça permet de financer certains projets (comme les régies de transports publics, par exemple). Donc que l’interdiction ne soit pas prévu, c’est plutôt normal.
Par contre pour les pubs animées, si en plus de mettre des images fixes, ils pouvaient forcer la diminution de la luminosité, j’ai toujours trouvé ça trop “flashy”.
Sans compter les magasins qui ont leur propre publicité animée (donc, pas sur l’espace public), sur leur mur, et qui éclaire toute la rue …
Le 24/01/2023 à 12h25
Les LED consomment beaucoup moins que les incandescentes, coûtent de moins en moins chères chaque année et améliorent leur puissance lumineuse (lumens) aussi régulièrement ce qui illustre très bien l’adage:
“Le mieux est l’ennemi du bien”
et dans sa version simplifiée qu’aimait bien me répéter mon ancien coloc très régulièrement:
“Putain, touche-z’y pas tant que ça marche à peu près correctement !”
Le 24/01/2023 à 14h17
Pour le coup, les pubs animées se vendent plus chères et permettent de financer encore + projets. Pareil pour la luminosité, ça permet au diffuseur de s’assurer que le bon citoyen ne passera pas à coté de sa pub, et il est prêt à payer pour ça. Plus les pubs sont intrusives, et plus elles sont lucratives.
Maintenant, est-ce que les communes doivent être financées par l’emmǝrdement et l’embrigadement de ses concitoyens ? 🤔
Perso je rejoint tout à fait l’avis de ce cher maîstre Boulet, « j’ai du mal avec le concept de nuisance nécessaire » (en fin de strip).
Pareil chez moi (plutôt 60 000 hab.), l’éclairage public est coupé de minuit à 5h. Et ça ne change pas grand-chose pour grand-monde, je pense largement qu’ils pourraient étendre l’amplitude horaire. Mais je trouve assez dommage qu’ils ne se réveillent qu’à cause des prix de l’énergie, et qu’en temps « normal » ne se posent même pas la question de savoir s’il y en a besoin ou pas …
Le 24/01/2023 à 14h32
Génial ce strip
“Quoi tu es contre les gifleurs publics ?? Mais cela créé de l’emploi !”
Le 25/01/2023 à 10h21
Ha ha, j’avais jamais vu ce strip. J’ai tellement ri.
Le 24/01/2023 à 15h31
En même temps l’éclairage à aussi son utilité. Il faut se promener à vélo la nuit tombée pour en être convaincu.
Un entre deux est donc bienvenu.
Le 24/01/2023 à 16h32
Elon Musk et un partenaire voulaient créer une nouvelle source de pollution lumineuse en diffusant des publicités depuis l’espace.
Ils avaient peut être lus l’étude Russe :
https://www.capital.fr/economie-politique/une-pub-dans-lespace-couterait-moins-cher-quune-pub-lors-du-super-bowl-1448352
Plus de nouvelles du projet. Ouf, un projet de fou en moins, du moins je l’espère.
PS : Les gars de la pub, faut reconnaitre qu’ils ont de l’imagination. Ils avaient réussi à convaincre certains maires en France de tester la publicité sur les trottoirs Bon, ça n’a pas duré longtemps.
Le 24/01/2023 à 22h31
Les publicités lumineuses, sont une véritable agression visuelle, elles doivent disparaitre et vite.
déjà que la pub des affiches, surtout les grandes est difficilement supportable.
il n’y a pas à tourner autour du pot là dessus.
Le 25/01/2023 à 15h52
C’est mon cas, 1 à 2 fois par semaine après minuit, et donc sans éclairage public. Ça ne me dérange pas du tout : j’ai acheté une bonne lumière à mettre à l’avant, ça fait le taf.
Le 25/01/2023 à 22h21
Je vois que beaucoup ont oublié qu’avant l’éclairage public, une ville était très sombre (hors pleine lune et encore) et la plupart des gens n’osaient pas sortir, c’était un peu risqué.
On peut toujours diminuer l’intensité de l’éclairage public quand il est très tard, mais ça reste bien utile à tous ceux qui sont dehors à un moment, à commencer par les piétons. Quand un quartier est plongé dans le noir, ça fait bizarre et c’est pas rassurant.
J’ai aussi un phare de vélo mais je préfère l’éclairage urbain pour des raisons de sécurité. J’habite la plus grande ville de France, j’ai du mal à l’imaginer mal éclairée. D’ailleurs un de ses surnoms “ville lumière” vient du fait qu’elle a été une des premières à être bien éclairée, gage de vi(ll)e plus agréable et de sécurité accrue.
Le 28/01/2023 à 15h45
Dans le grande villes je pense que la baisse de luminosité (pour être à peu près équivalent à une pleine lune) serait un bon compromis.
J’avoue que des fois ça me fait bizarre dans mon village de 400 âmes, passé 21h (en hivers, aucun éclairage public l’été suite à un vote des habitants), de devoir prendre la lampe frontale pour sortir les chiens ^^
Par contre aux alentours de la pleine lune aucun problème pour se balader sans rien ;)
Le 27/01/2023 à 10h18
Ce qui est triste c’est que 95% des gens avec qui je parle veulent plus d’éclairage la nuit. Donc la tendance n’est pas prête de s’inverser même avec le cout de l’énergie qui grimpe.