À l'occasion des 30 ans de Linux, Les Numériques reviennent sur « la folle histoire de Mandrake » et ses nombreux rebondissements, racontés par ses trois fondateurs, Frédéric Bastok, Gaël Duval et Jacques Le Marois.
La distribution Linux française, lancée en 1998 par Gaël Duval (qui avait alors 25 ans), sera successivement propulsée par un billet sur Slashdot, la vente de boîtes physiques avec CD-ROM d'installation et manuel d'utilisation, « des levées de fonds tous les trois mois en doublant la valorisation de la société, avec des investisseurs parfois prestigieux comme Iliad, la société de Xavier Niel »... au point de « dépasser la centaine de salariés en un rien de temps ».
Las : l'arrivée d'un CEO américain « avec six personnes mieux payées que les PDG de France Télécom ou la SNCF à l'époque », puis celle de l'ADSL permettant aux gens de télécharger la distribution gratuitement, des changements incessants de modèles économiques, entraînent des licenciements en cascade. « En trois jours, j'ai dû virer 50 personnes, se souvient Frédéric Bastok, amer. On a été entre 130 et 150 personnes au maximum, et là on redescendait à environ 70 ».
L'acquisition en 2005 de Connectiva, le leader brésilien de la distribution de Linux (« censé être à l'équilibre, mais qui s'est avéré être un gouffre financier », s'étouffe Jacques Le Marois), un changement de nom pour éviter un procès avec un éditeur américain qui détient les droits sur le personnage de Mandrake le magicien, et l'arrivée d'Ubuntu sonneront finalement le glas de la distribution renommée Mandriva.
En 2015, la société finira par mettre la clé sous la porte. Ironiquement, ce ne sont pas des problèmes liés aux activités de l'entreprise qui ont causé sa chute, relève Les Numériques. À l'époque, une dizaine de salariés y travaillent encore. « Ils ont licencié deux ou trois personnes pour une raison inconnue, se sont pris un procès aux prud'hommes et ont été condamnés, explique Frédéric Bastok. Le montant des indemnités était supérieur à la trésorerie de la boîte. Ils ont été obligés de se mettre en faillite ».
La leçon à retenir pour les trois hommes est résumée par Gaël Duval : « Si vous êtes jeune et que vous voulez entreprendre, il ne faut surtout pas lâcher votre vision d'origine. Ne vous laissez pas influencer par les gens qui ont de l'expérience. Faites-vous accompagner, mais gardez le contrôle, surtout si vous êtes sur quelque chose de très innovant ».
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