Peu à peu, les plateformes prennent conscience et mettent en place des dispositifs pour lutter contre les violences en ligne.
Mais pour Gina Neff, directrice exécutive du Minderoo Centre for Technology and Democracy à l’université de Cambridge et Rumman Chowdhury, ancienne directrice de la transparence et de l’éthique chez Twitter qui travaille désormais sur les questions de responsabilité dans l’intelligence artificielle à Harvard, ces entités manquent la moitié du problème.
Dans une tribune publiée dans Wired, les deux femmes expliquent que la plupart des dispositifs proposés aux utilisateurs de réseaux sociaux sont conçus pour les aider face à une brusque vague de cyberharcèlement, des attaques ponctuelles, qui viendraient par pic puis reflueraient.
Or, dans les faits, tout un pan de la population est victime de « violences chroniques » (chronic abuse). Les chercheuses citent les femmes et les minorités, mais aussi toute une série de professions impliquant une présence publique : s’ils sont visés, politiques, acteurs et actrices, scientifiques, journalistes ne peuvent pas se permettre de réduire leur présence en ligne puisqu’ils s’en servent comme outil de travail.
Surtout, ces personnes sont rarement visées par un seul pic de violence, mais bien par une dynamique récurrente, permanente. L’Unesco s’en inquiète, même : lors de sa conférence « Internet for Trust », fin février, l’organisation a dédié une rencontre aux effets des cyberviolences sur les journalistes.
Spécialiste de la question, Elodie Vialle y a souligné combien la pratique était utilisée pour tenter de museler les journalistes, tandis que la psychologue Aya Mhanna détaillait les effets concrets de ces violences sur la santé mentale, la vie quotidienne et jusqu’à la stabilité financière des personnes visées.
De fait, Gina Neff et Rumman Chowdhury appellent dans leur article à ce que les grandes entreprises numériques adaptent leurs plateformes et les construisent de sorte à fournir de la sécurité par défaut. Parmi leurs revendications : plus de modération humaine, de meilleurs « services clients », ou du moins, une meilleure gestion des plaintes et, plus globalement, des services qui prennent mieux en considération les problèmes que pose la persistance de la violence en leur sein.
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