Révéler un pseudo sur Facebook ne viole pas toujours la vie privée
Le masque vs la plume
Le 10 février 2015 à 09h30
4 min
Droit
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Un journal peut-il être condamné pour avoir révélé l’identité d’une personne utilisant un pseudonyme sur Facebook ? Pas toujours, a répondu le tribunal de grande instance de Paris dans un jugement rendu le 17 décembre dernier, dont Next INpact a pu prendre connaissance hier.
L’affaire avait fait un certain bruit médiatique en 2013. Le député UMP Hervé Mariton s’était séparé de l’une de ses collaboratrices parlementaires en raison de liens étroits avec l’extrême droite. Cette sphère d’intérêts avait été épinglée à l’époque par Mediapart dans un article intitulé « le CV d’extrême droite de l’assistante parlementaire d’Hervé Mariton ». Pour épauler son article, nos confrères s’étaient notamment penchés sur la page Facebook librement accessible, et ouverte au nom de « Jeanne Pvd ». Ils y avaient butiné et exploité nombreux témoignages de ces affinités, tout en diffusant plusieurs captures d'écran.
Des informations diffusées sous pseudonyme
Seulement, les faits n’en sont pas restés là. La principale intéressée a contre-attaqué en justice Mediapart sur l’autel du droit à la vie privée. Et pour cause, sa page Facebook n’est pas ouverte sous son patronyme, mais sous un pseudonyme, nuance ! Selon elle, du coup, les informations qui y figuraient n’étaient donc pas destinées à être rendues publiques. Autre chose, elle a reproché à Mediapart d’avoir fait état de sa vie sentimentale et également d’avoir surveillé tous ses faits et gestes sur le réseau social, pour y relater les modifications effectuées.
Devant le TGI de Paris, Mediapart a contesté ces critiques, invoquant « la légitimité des informations divulguées au regard d’un débat d’intérêt général » : elle était en effet l’assistante parlementaire d’un député opposé au projet de loi sur le mariage pour tous.
En face, les juges vont rappeler les grands principes : selon l’article 9 du Code civil, toute personne a droit au respect de sa vie privée, mais ce droit peut céder devant la nécessaire liberté d’expression et d’information. Un cas presque classique d’arbitrage entre des droits et libertés fondamentaux. Seulement la question demeurait de savoir si oui ou non, la page en question était protégée des yeux extérieurs.
Sur ce point, le TGI a rappelé que lever l’anonymat d’une personne utilisant un pseudonyme « peut (…) constituer une atteinte à la vie privée dès lors qu’au-delà de cette révélation, c’est une partie de sa personnalité qui est, contre son gré, rendue publique ». Seulement, les faits sont quelque peu différents ici.
L'usage d'un pseudonyme n'est pas toujours suffisant pour protéger la vie privée
Certes, l’assistante parlementaire avait bien utilisé un pseudonyme, mais elle a fait dans le même temps état « de diverses informations personnelles permettant de l’identifier » : date et lieu de naissance, activité professionnelle actuelle et passée, scolarité, photo, et les noms des membres de sa famille, dont « le nom de sa sœur qui est le même que le sien ». Or, pour le tribunal, « si elle avait souhaité que les informations qu’elle faisait figurer sur ce compte Facebook ne soient pas accessibles au public, il lui était loisible de ne les rendre consultables que par les personnes qu’elle déterminait ». Ce qu’elle n’avait pas fait à l’époque. Bref : en publiant ces informations, Mediapart n’a pas porté atteinte au respect dû à sa vie privée.
Enfin, quant à la question de sa relation sentimentale, son existence avait été publiquement évoquée par l’intéressée (notamment par des photos sur le réseau social, parfois non équivoques), ce qui montre que « cette relation est sortie de la sphère protégée » par l’article 9 du Code civil, précisent encore les magsitrats. Au final, l’ex-assistante parlementaire a été déboutée de ses demandes et même condamnée aux dépens. On ne sait, à ce jour, si elle a fait appel de cette décision.
Révéler un pseudo sur Facebook ne viole pas toujours la vie privée
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Des informations diffusées sous pseudonyme
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L'usage d'un pseudonyme n'est pas toujours suffisant pour protéger la vie privée
Commentaires (33)
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Abonnez-vousLe 10/02/2015 à 09h58
Exact, moi non plus je ne pourrais pas être juge, certaines affaires doivent être encore plus compliquées !
Le 10/02/2015 à 10h01
selon l’article 9 du Code civil, toute personne a droit au respect de sa
vie privée, mais ce droit peut céder devant la nécessaire liberté
d’expression et d’information.
Pourtant, la constitution ne dit pas ça. Et dans la pyramide des lois….
Le 10/02/2015 à 10h09
Je ne sais pas si c’est toujours le cas, mais les CGV de Facebook n’interdisaient pas le pseudonymat ?
Le 10/02/2015 à 10h10
Normalement si, si tu n’es pas sur FB avec ton vrai nom/prénom ils peuvent bloquer et fermer ton compte.. Mais FB perdrait beaucoup de monde dans ce cas là " />
Le 10/02/2015 à 10h14
Tout comme FB est interdit au moins de 13 ans…
En pratique c’est loin d’être le cas.
Le 10/02/2015 à 10h14
On ne peut plus rendre les pages privées sur facebook depuis bien 1 an maintenant…
Le 10/02/2015 à 10h15
Et la liberté d’expression et d’information concernant la consultation des déclarations de patrimoine des élus?
Le 10/02/2015 à 10h17
Le 10/02/2015 à 10h21
elle aurait tenuun blog, tout simplement, ca n’aurait pas été pareil
Le 10/02/2015 à 10h21
Le 10/02/2015 à 10h26
Oui c’est bien ce qu’il me semblait, comment as tu reçu l’avertissement ? pop up quand tu t’es co ? un mail ?
Combien j’ai d’ami qui n’ont pas leurs vraies identités…
Genre au lieu de mettre Dupont tu mets DT ou encore les minots qui mettent Thomas Ronaldo Neymar. Ca doit en faire des avertos à envoyer, sauf si faut être “report” une fois pour que FB analyse le compte
Le 10/02/2015 à 10h27
C’est bien possible oui, n’étant pas utilisateur je ne suis pas au courant de tous les changement sauvages qui ont été fait.
Le 10/02/2015 à 10h28
Le 10/02/2015 à 10h30
Le 10/02/2015 à 10h34
Le 10/02/2015 à 10h36
Le 10/02/2015 à 10h38
Mets une femen en activité sinon, ça marche pas mal il paraît..
Ca doit être politique
Le 10/02/2015 à 10h38
raté..
Le 10/02/2015 à 10h40
Facebook à autorisé les pseudonymes fin 2014 il me semble.
Et quelques minutes dans la jungles des paramètres lui aurait permis de rendre sa page accessible seulement par ses “amis” (et non pas public ou amis des amis), un choix drastique de ses “amis” aussi permet de faire du tri, tout comme elle pouvait se rendre invisible des recherches aussi.
Enfin bref, une fois de plus dommage de voir qu’on fasse perde le temps d’un tribunal pour régler une négligence et la fainéantise d’un utilisateur.
Le 10/02/2015 à 10h42
Leur business model repose sur leur base de données personnelles (identités, relations, centres d’intérêts). Pour eux c’est vital d’avoir les vraies identités, ils ne font pas ça juste pour faire chier.
Ou au moins il faut qu’ils aient en interne le lien entre un pseudo et une identité, même si seul le pseudo apparaît à l’extérieur.
Si c’est gratuit, c’est que c’est toi le produit.
Le 10/02/2015 à 10h50
Le 10/02/2015 à 10h52
Le 10/02/2015 à 10h52
Mettre dans une même phrase les mots “Vie privée” et “Facebook” n’est pas un magnifique oxymore ? " />
Le 10/02/2015 à 11h02
Le 10/02/2015 à 11h06
J’exige la vie privée de mon speudodo la couillure ! " />
Le 10/02/2015 à 11h06
“Jeanne Pvd”. Ouaw c’est vrai ça peut être n’im-por-te-qui.
Quelle anonymisation ce pseudo!
Crétine " />
Le 10/02/2015 à 11h41
Le 10/02/2015 à 12h18
C’est quoi cette histoire d’origine du monde" />
Le 10/02/2015 à 12h27
Le 10/02/2015 à 12h48
Ah oui je comprends mieux " />
Le 10/02/2015 à 09h49
Heureusement qu’il y a des juges pour interpréter les lois " />
C’est dans ces situations que je vois que je ne suis pas fait pour ce job.
Le 10/02/2015 à 09h53
Si elle ne voulait pas que sa page soit vue, il fallait la rendre privée. Point à la ligne.
Le 10/02/2015 à 09h58
“privée” et intrdire l’accès d’un ami d’un ami d’un ami d’un ….
Oh wait…ne pas utiliser fb plutôt ^^”