Élections : un rapport interne à l’administration plaide pour davantage de services en ligne
À la vot’
Le 23 avril 2015 à 06h30
6 min
Droit
Droit
« Le dispositif d’organisation des élections politiques en France est segmenté, coûteux et d’une efficacité limitée. Malgré d’indéniables efforts de modernisation, il n’intègre que partiellement les avantages de la dématérialisation et ne correspond plus au mode de vie des citoyens dont il ne facilite pas la participation à la vie démocratique. » Tel est le constat posé par l’Inspection générale de l’administration au travers d’un rapport remis au ministère de l’Intérieur en octobre 2014 et dévoilé il y a quelques jours (PDF). À l’aune de ce diagnostic, plusieurs pistes de réformes faisant la part belle au numérique ont ainsi été mises en avant.
Permettre à tous de s'inscrire sur les listes électorales depuis Internet
Premièrement, l’Inspection générale de l’administration (IGA) recommande de procéder à une refonte complète du système de gestion des listes électorales, lequel « rencontre des défaillances graves » tout en se révélant « lourd et coûteux ». Actuellement, elles sont constituées à partir des fichiers entretenus par les mairies. Résultat, il peut parfois y avoir des doublons, notamment en cas de déménagements. De plus, il est bien souvent compliqué de s’inscrire via Internet, dans la mesure où seules certaines villes proposent aujourd’hui ce téléservice.
Les auteurs du rapport préconisent ainsi de confier à l’INSEE la gestion d’une base de données centralisée, dont les listes communales ne seraient que des extractions. « Chaque acteur du processus interagirait avec le système central par l’intermédiaire de web-services (site Internet sécurisé). Les procédures seraient totalement dématérialisées, plus fiables et plus rapides. Les redondances seraient supprimées » anticipent-ils. Plus concrètement, chaque électeur disposerait d’un « identifiant numérique unique » qui permettrait de s’inscrire en ligne, quelle que soit sa commune et sans avoir à se déplacer (les justificatifs seraient envoyés au format PDF ou par photo depuis un smartphone).
L’exécutif devra cependant trancher sur la manière de constituer cette nouvelle base : soit à partir des listes existantes (et en procédant éventuellement à des radiations), soit en partant de zéro, c'est-à-dire en demandant à tous les électeurs de se réinscrire.
Quant aux personnes n’ayant pas la possibilité ou les capacités d’effectuer des démarches en ligne, l’IGA a sa petite idée : mettre à contribution les facteurs. « Doté de la liste électorale communale et du smartphone dont il sera bientôt systématiquement équipé, le postier constaterait aisément l’absence d’un électeur sur la liste électorale. Il pourrait alors lui proposer de l’aider à s’inscrire en renseignant avec lui le formulaire en ligne (via une application smartphone) et en photographiant avec son téléphone les pièces justificatives. »
Une dématérialisation complète du dispositif de procurations
Deuxièmement, le rapport préconise de dématérialiser entièrement le dispositif de gestion des procurations. Lorsqu’un citoyen veut permettre à un autre électeur de voter en son nom, il faut aujourd’hui qu’il se rende au commissariat ou à la gendarmerie de sa ville, où il remplit en principe différents formulaires. L’IGA suggère de ce fait de permettre à la population d’effectuer ces formalités en ligne, ce qui ferait gagner du temps aux agents publics (et notamment aux policiers et gendarmes qui doivent procéder aux saisies). Le citoyen resterait néanmoins tenu de se présenter devant les forces de l’ordre, mais celles-ci valideraient simplement la demande.
Les auteurs du rapport estiment ainsi qu’une telle dématérialisation – requêtes et validations se feraient en ligne, et une confirmation serait envoyée par email au demandeur – « permettrait de réduire à 6 minutes la durée de traitement des procurations par les services de police et de gendarmerie (contre 15 minutes actuellement). L’économie induite serait, pour l’année 2017 et par rapport à l’année 2012, de l’ordre de 28,3 millions d’euros, en intégrant le coût d’investissement dans le système d’information ». Autre avantage : il serait possible de demander une procuration à une date relativement proche du scrutin, vu que les éléments pourraient être transmis plus rapidement aux services communaux.
À nouveau, il est préconisé de faire appel aux facteurs pour les personnes « empêchées ». « L’électeur saisit le formulaire en ligne et reçoit un numéro de dossier qu’il remet au postier ; le postier accède au dossier dans son application smartphone grâce au numéro de dossier et valide la procuration après avoir vérifié l’identité de la personne et renseigné le numéro de la pièce d’identité présentée. La saisie initiale du dossier pourrait aussi être effectuée par le postier, en présence de l’électeur » est-il expliqué.
Suppression des plis postaux pour la propagande électorale
Troisièmement, il est proposé de dématérialiser ce qu’on appelle dans le jargon la « propagande officielle » (professions de foi et bulletins de vote envoyés par courrier). Une « plateforme numérique nationale dédiée aux élections » serait créée, afin d’enregistrer et diffuser les documents de chaque candidat. « Les éléments ainsi accessibles seraient consultables par tous, sans filtre particulier ni identification nécessaire. Les utilisateurs pourraient en imprimer autant d’exemplaires que souhaité. Le format numérique serait consultable sur tous les supports modernes (smartphone, tablette...) et autoriserait la diffusion via les réseaux sociaux. »
Pour les publics éloignés du numérique, des documents imprimés resteraient accessibles dans des « lieux publics neutres » de type mairies, bureaux de poste ou préfectures, et seraient placés dans des enveloppes cachetées. Les bulletins de vote continueraient d’autre part d’être disponibles dans les bureaux de vote. Résultat, l’État pourrait faire des économies « considérables » de frais postaux et d’impression, estimées à 126 millions d’euros par an pour la période 2015 - 2017.
Cette piste avait d’ailleurs été très sérieusement envisagée par le gouvernement, puisque le projet de loi finances pour 2015 portait une telle reforme. Sauf que les parlementaires s’y sont vivement opposés, contraignant l’exécutif à faire marche-arrière (voir notre article).
Élections : un rapport interne à l’administration plaide pour davantage de services en ligne
-
Permettre à tous de s'inscrire sur les listes électorales depuis Internet
-
Une dématérialisation complète du dispositif de procurations
-
Suppression des plis postaux pour la propagande électorale
Commentaires (33)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 23/04/2015 à 06h37
On va charger les postiers du recensement des oubliés, et on va baisser le chiffre d’affaires de la Poste. Logique!
Le 23/04/2015 à 06h42
Le problème principal de la dématérialisation de la propagande officielle est que de nombreuses personnes (âgées surtout, mais pas uniquement ) attendent le programme ou la profession de foi avant de se décider. Sans oublier que cela permet de vérifier que l’on est bien inscrit sur une liste électorale.
Enfin, cela forcera les candidats à diffuser leur propagande. Et donc, celui qui aura le plus de pognon qui aura la meilleure diffusion. En effet, une diffusion militante est très compliquée à mettre en place avec une équipe réduite et bénévole.
Le 23/04/2015 à 06h57
Le 23/04/2015 à 07h24
pour être précis : c’est au candidat de payer la propagande officielle (affiche - profession de foi - bulletins de vote) avec possibilité de se faire rembourser par l’Etat suivant un résultat minimum et suivant des dépenses plafonnées.
Concernant les élections législatives : les partis politiques sont en partie financés par l’Etat suivant le nombre de voix obtenues et le nombre de parlementaires élus (en plus des cotisations et des dons de personnes physiques).
Le 23/04/2015 à 07h28
“le postier constaterait aisément l’absence d’un électeur sur la liste électorale.” Ouch, voyant l’inefficacité des politiques actuelles, et l’abstention toujours plus marquée dans les scrutins, on souhaite instaurer une forme de surveillance des électeurs ?
Un premier pas vers une loi obligeant chaque électeur à voter sous peine de sanctions, comme chez nos voisins de Belgique. Un bien ou un mal ?
Le 23/04/2015 à 07h41
Au bureau de vote, il y a des témoins, mais par clavier chez soi, personne, même si on utilisait une Webcam, qui dit qu’on vote sans contrainte (exemple, un homme devant soit une arme à la main vous menaçant de voter pour untel)
Le 23/04/2015 à 07h43
« Les auteurs du rapport préconisent ainsi de confier à l’INSEE la gestion d’une base de données centralisée, »
Encore une centralisation des fichiers (Big Data, etc), une de plus…
« Quant aux personnes n’ayant pas la possibilité ou les capacités d’effectuer des démarches en ligne, l’IGA a sa petite idée : mettre à contribution les facteurs. « Doté de la liste électorale communale et du smartphone dont il sera bientôt systématiquement équipé, le postier constaterait aisément l’absence d’un électeur sur la liste électorale. »
On confèrerait le travail d’un fonctionnaire “assermenté” au personnel d’une société privée de logistique (La Poste SA) en complément d’un ensemble d’autres contraintes de délégation de service public qui vont, par ailleurs, à l’encontre de ses objectifs de rentabilité et d’expansion européenne future.
Le 23/04/2015 à 07h43
La procuration, c’est une forme de confiance, mais le doute peut toujours être réel. (ex: voter pour une personne dans le coma)
Le 23/04/2015 à 07h49
Le 23/04/2015 à 07h57
Le 23/04/2015 à 07h58
exact.
Dans un sens, l’objectif est de financer les partis politiques les plus pertinents : les partis politiques qui récoltent un nombre de voix significatif (en général plus de 5% des suffrages exprimés). Ce qui élimine les partis politiques marginaux/fantaisistes/etc.
Dans un autre sens :
1- le financement public des partis politiques se focalise sur une seule élection (les élections législatives), donc il s’agit d’un système de financement qui favorise les partis politiques à dimension nationale
2- les élections législatives sont par ailleurs des élections au suffrage majoritaire donc il s’agit d’un système de financement qui favorise un peu plus les grands partis politiques (puisqu’une partie du financement public dépend du nombre de parlementaires effectivement élus)
Le 23/04/2015 à 07h59
A moins de faire un score correct du premier coup, c’est cela.
A la base c’était pour contrer le financement occulte des parties, cela à marcher à moitié.
Le 23/04/2015 à 08h06
Le 23/04/2015 à 08h06
Personnellement, je ne parlerais pas d’oligarchie, mais plutôt d’aristocratie républicaine et d’Etat unifié ou centralisé.
Il suffirait d’une loi électorale plus respectueuse de l’interdiction des conflits d’intérêts et de la limitation du nombre de mandats électifs (par exemples : un seul mandat exécutif par personne - 2 ou 3 mandats successifs maximum)
Le 23/04/2015 à 08h14
Le 23/04/2015 à 08h25
La France a aussi une longue tradition de suffrage majoritaire uninominal (comme les Etats-unis d’Amérique, le Royaume-uni, le Canada, la Corée du Sud, etc)
Le monde politico-médiatique français qualifie improprement les élections municipales et les élections régionales d’élections semi-proportionnelles car il s’agit en fait d’élections majoritaires plurinominales avec élection à la proportionnelle d’une partie des élus.
Quant au découpage du territoire hexagonale en 5 circonscriptions électorales européennes, je suis bien d’accord qu’il s’agit d’une invention administrative ubuesque comme l’invention récente de 13 Régions métropolitaines.
Le 23/04/2015 à 08h30
Le 23/04/2015 à 08h32
Résultat, l’État pourrait faire des économies « considérables » de frais postaux et d’impression, estimées à 126 millions d’euros par an pour la période 2015-2017.Rapporté à l’année ça nous fait 31,5m€ ainsi la démocratie coûte trop cher de 50 centimes par citoyen…
Le 23/04/2015 à 08h54
Le 23/04/2015 à 09h25
Le 23/04/2015 à 09h30
Même si la machine est infiniment plus fiable qu’un homme, c’est aux personnes qui vont s’en occuper que je n’ai pas confiance. Je suis contre l’informatisation de tout ça, car c’est très facile pour un spécialiste de modifier quelques octets ou ko, sans compter que le pékin moyen devient incapable de vérifier toute la chaine.
Le 23/04/2015 à 09h45
La réforme territoriale
infographie “De 22 à 13 régions métropolitaines”
Le 23/04/2015 à 09h56
Merci, je sais de quoi il retourne.
Juste que les Régions sont déjà des “inventions récentes” dans l ‘histoire de l’administration française (environ 1941).
D’autant qu’elle répondent à un besoin d’organisations purement administratif de la part des préfecture et autres organisme de l’Etat central.
Donc ils peuvent les changer autant qu’ils veulent, ces structures sont plus administrative et politico-politicienne qu’autre chose.
Le 23/04/2015 à 12h49
Depuis 1982, la Région est une Collectivité territoriale et reconnue en tant que telle par la Constitution depuis 2003. Et à partir de janvier 2016, les Régions reprendront une grande partie des compétences des Conseils départementaux (dont une grande partie disparaîtront au profit des Métropoles et des Régions).
D’autre part, au sein de l’Europe, les Régions sont représentées au Comité des Régions (DdR), à l’Assemblée des Régions d’Europe (ARE) et se regroupent parfois dans des coopérations territoriales européennes transfrontalières. Elles perçoivent aussi des subventions européennes par le Fonds européen de développement régional (FEDER).
Donc, à mon avis, les Régions sont plus importantes actuellement que les simples divisions administratives qu’elles étaient au XXe Siècle (déconcentration des services de l’Etat). Actuellement, l’aspect hiérarchique vis-à-vis de l’Etat est moins imposant (objectif de la décentralisation des pouvoirs/principe de subsidiarité), et j’imagine bien que la réforme territoriale actuelle ne sert pas à renforcer l’indépendance des Régions françaises vis-à-vis de l’Etat.
Le 23/04/2015 à 13h08
Le 23/04/2015 à 14h53
“L’économie induite serait, pour l’année 2017 et par rapport à l’année 2012
de l’ordre de 28,3 millions d’euros..”
“éh bien mon cochon” !!!
TANT…que ça ?" />
(qui l’aurait cru, Lustucru) !
Le 23/04/2015 à 15h08
pour le vote électronique, effectivement je suis, aussi, contre, mais “pour le reste” (l’intendance)
pourquoi pas !
Le 23/04/2015 à 21h48
Le 24/04/2015 à 05h09
Le 24/04/2015 à 06h11
Le 24/04/2015 à 14h46
Le 24/04/2015 à 19h39
Le 24/04/2015 à 19h45
Trop tard pour edit (déjà?): main mon.service-public.fr à l’air HS pour le moment, ça pourra atendre encore queolques jours." />