Le SNJV refait le point sur l’industrie française du jeu vidéo
On refait le match
Le 20 octobre 2015 à 09h01
8 min
Société numérique
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Le Syndicat national du jeu vidéo (SNJV) a dévoilé aujourd'hui son baromètre annuel sur le jeu vidéo. Une occasion pour faire le point sur les chiffres clés de l'industrie vidéoludique en France aussi bien sur le plan économique que social.
Cette année, le SNJV s'est donné rendez-vous à Paris dans les locaux de Dontnod, un studio français avec deux titres à son actif : Remember Me et Life is Strange. À cette occasion, le syndicat a remis à Fleur Pellerin un rapport sur la situation de l'industrie vidéoludique en France. Et si pour les locomotives du secteur tout va bien, tout n'est pas rose pour autant par chez nous.
Les entreprises françaises reprennent confiance
La première bonne nouvelle que l'on peut tirer de ce baromètre, c'est que les entreprises françaises du secteur sont confiantes dans leur avenir. Elles sont ainsi 67,1 % des 146 répondants de l'enquête (sur un total d'environ 600 sociétés œuvrant dans le domaine du jeu vidéo en France) à se déclarer « plutôt confiantes » et 16,4 % se disent même « très confiantes ».
L'an passé, plus de la moitié (54,5 %) des entreprises interrogées se disaient plutôt pessimistes ou très pessimistes quant à l'avenir de la filière vidéoludique en France. À l'époque, le sondage avait eu lieu dans un climat peu favorable, puisque la nouvelle version du crédit d'impôt jeu vidéo (CIJV) n'avait pas encore été validée par Bruxelles et son décret d'application se faisait attendre. Pire encore, avant même que la France ne dégaine son nouvel arsenal, le Québec renforçait le sien en proposant un crédit d'impôt de 37,5 % et ouvrait un fonds d'investissement destiné à financer certaines productions. L'envie de sirop d'érable était palpable dans les studios.
La nouvelle version du CIJV validée, le moral est au beau fixe pour les entreprises françaises. Cette année, elles ne sont plus que 35 % à verser dans le pessimisme. Il suffit donc d'un crédit d'impôt de 20 %, avec des conditions assouplies, pour que tout le monde retrouve le sourire. D'ailleurs, la France se place désormais en troisième position du classement des pays les plus attractifs pour les entreprises hexagonales du secteur, derrière le Canada et les États-Unis, mais loin devant le Japon.
Côté emploi, la précarité gagne du terrain
Au niveau emploi, les acteurs du jeu vidéo en France font de moins en moins appel aux CDI. Ce type de contrat reste le plus utilisé, avec 63 % des effectifs du secteur, mais cette part a fondu de 7,4 points en l'espace d'un an. Cette baisse se fait au profit des CDD (12,4 %), des freelances et prestataires (14,7 %) et des intermittents (2,7 %), dont le nombre a presque triplé en un an. Les stagiaires, eux, sont moins nombreux que l'an passé et comptent pour 5,4 % des effectifs totaux. Le syndicat estime que cette baisse du nombre de CDI est causée par « l’incertitude du marché ».
La tendance ne devrait d'ailleurs pas s'inverser. Les 49,3 % d'entreprises souhaitant recruter estiment que 52 % de leurs prochaines embauches se feront en CDI, contre près d'un quart en CDD. Le nombre de stagiaires devrait lui aussi légèrement augmenter. Bonne nouvelle par contre, seulement 6,2 % des entreprises envisagent de licencier. Il faut dire que l'année 2015 semble être un bon cru pour le marché français.
Les entreprises du secteur se portent moins bien en 2014 qu'en 2013
Si le moral semble globalement bon, tout n'est pas très rose. Si, déjà en 2013, la situation était préoccupante avec un peu moins d'un tiers des entreprises qui affichait un exercice comptable en déficit, en 2014, cela ne va pas mieux. 37 % des sociétés interrogées (à périmètre équivalent) ont déclaré avoir fini l'année dernière dans le rouge. Soulignons le triste record signé par les entreprises ayant 5 à 10 ans d'ancienneté, dont la moitié a affiché des pertes nettes l'an passé.
Fort logiquement, le nombre d'entreprises bénéficiaires a fondu comme neige au soleil. En l'espace d'un an, elles sont ainsi passées de 38,4 % à seulement 33,6 %. Bonne nouvelle par contre, le chiffre d'affaires moyen des studios de développement français est à la hausse. D'une moyenne de 1,67 million d'euros l'an dernier, nous devrions passer à une moyenne supérieure à 2 millions d'euros sur 2015.
Sur l'ensemble des entreprises, la moyenne devrait passer de 3,8 millions d'euros à 4,2 millions d'euros. La médiane, elle, n'est par contre située qu'à hauteur de 300 000 euros, preuve qu'il existe une énorme disparité entre Ubisoft, Gameloft, Focus Home Interactive, et la pléiade de petits acteurs qui forment la mosaïque du jeu vidéo en France.
Sur quoi travaillent les studios français ?
Un studio de développement en France, c'est plus de 9 fois sur 10 un studio qui se déclare « indépendant », c'est-à-dire sans attaches avec un éditeur en particulier, ou qui auto-édite ses productions. 6 fois sur 10, il doit réaliser des prestations pour d'autres clients afin de financer le développement de son jeu, prestations qui lui rapportent en moyenne 62 % de son chiffre d'affaires. La plupart du temps, il s'agit de développement pour des tiers, parfois de game design ou de la réalisation d'une interface utilisateur.
Seuls 7,3 % des studios interrogés planchent sur des titres dits « AAA ». Les objets connectés, les jeux éducatifs et les jeux pour enfants ne sont pas non plus une spécialité française, avec moins de 1% des répondants concernés par chacune de ces tranches. Nos acteurs locaux planchent plutôt sur des jeux qu'ils définissent comme « Indie » pour 60 % d'entre eux et « Casual » pour une moitié des effectifs. À noter : 22 % des studios déclarent également travailler sur des « serious games ».
Les consoles de salon et portables ne représentent pas le plus gros morceau de l'activité des studios français. La production hexagonale se concentre en fait autour des jeux sur mobiles et sur PC avec dans chacun des cas, plus de 70 % des studios qui planchent sur ces plateformes.
Côté mobile, sans surprise, Android et iOS sont plébiscités par plus de 95 % des studios, contre respectivement 32 % et 39 % pour Windows Phone et Fire OS. Une poignée de studios travaille sur des jeux compatibles avec Tizen mais plus personne ne planche sur Symbian depuis cette année. La fin d'une époque.
On remarquera que toutes plateformes confondues, le modèle free-to-play est le plus utilisé par les studios, à égalité avec le modèle classique de l'achat sans contenu additionnel. On notera que la part du modèle « payant à l'achat avec contenu additionnel payant », cher aux titres AAA, est de moins en moins représenté. Pourtant, les DLC n'ont pas complètement disparu du paysage vidéoludique.
Le coût d'un jeu vidéo et les idées reçues sur les dépenses en publicité
Souvent, les éditeurs et les studios ne sont pas enclins à parler de leur budget de production et il est donc difficile d'estimer précisément le coût de production d'un jeu. Les répondants de l'enquête du SNJV ont toutefois montré patte blanche cette année, ce qui nous apporte des statistiques plutôt intéressantes sur le sujet.
On apprend ainsi qu'au cœur des studios ayant un chiffre d'affaires inférieur à 10 millions d'euros par an, le budget de production moyen par jeu, par an et par plateforme est en moyenne de 852 000 euros pour un titre sur console de salon. Si un studio passe deux ans à produire un jeu pour deux consoles, cela lui coûtera en moyenne 3,4 millions d'euros. Sur une console portable, ce budget n'est plus que de 66 000 euros environ par an, par jeu et par plateforme contre près de 500 000 euros pour un titre sur PC.
Des chiffres ont également été donnés au sujet du budget dédié à la promotion des jeux, en rapport avec leur budget de productions. Si, à première vue, on peut imaginer que les éditeurs ont tendance à dépenser des sommes folles en marketing sur leurs titres, ce n'est pas vraiment le cas. Ainsi, en moyenne, les jeux sur consoles n'ont qu'un budget publicité équivalent à 12,5 % de leurs coûts de production.
Avec toutefois une certaine disparité sur les sommes engagées en fonction de l'ancienneté du studio à l'origine du titre. Une entreprise expérimentée dépensera environ 500 000 euros de budget publicitaire en moyenne pour ses titres sur consoles, vingt fois moins s'il s'agit d'un nouvel arrivant sur le marché. Il est donc très probable qu'un ténor comme Ubisoft puisse se permettre de dépenser quelques millions d'euros en publicité, mais au regard du budget de production d'un Assassin's Creed, la note n'est pas si salée que ça.
On s'amusera également du fait qu'en moyenne, les dépenses publicitaires pour les jeux sur télévision connectée ne dépassent pas les 200 euros. Tout juste de quoi mettre quelques tweets ou publications Facebook en avant. Sur mobiles, ce budget oscille entre 7 000 et 60 000 euros par jeu. Comme quoi, les préjugés ont la vie dure.
Le SNJV refait le point sur l’industrie française du jeu vidéo
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Les entreprises françaises reprennent confiance
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Côté emploi, la précarité gagne du terrain
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Les entreprises du secteur se portent moins bien en 2014 qu'en 2013
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Sur quoi travaillent les studios français ?
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Le coût d'un jeu vidéo et les idées reçues sur les dépenses en publicité
Commentaires (20)
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Abonnez-vousLe 20/10/2015 à 09h12
article intéressant pour moi qui veut me lancer à titre amateur :-)
Merci @Ellierys " />
Le 20/10/2015 à 09h14
Mouais, j’ai une chaine youtube sur mes tests de jeu …(en privé)
Mais, ils n’aimeraient pas …car j’ai bcp de note dans les négatives ^^“.
Le 20/10/2015 à 09h27
Te lancer dans quoi ? " />
Le 20/10/2015 à 09h27
La production hexagonale se concentre en fait autour des jeux sur
mobiles et sur PC avec dans chacun des cas, plus de 70 % des studios qui
planchent sur ces plateformes.
Tout est dit. Secteur saturé, utilisateurs lassés, une crise similaire à celle de 1983.
Le 20/10/2015 à 09h28
Quand on voit la production de jeux sur smartphone (des pubs interactives en fait), celle des indés sur Steam (genre je reprend un concept des années 80-90, je fais une maj graphique, ou alors un jeu de survival/zombies) et les titres AAA aux multiples bugs et DLC, on en devient extrêmement surpris quand on tombe sur un jeu de qualité ^^,
Le 20/10/2015 à 09h35
Le 20/10/2015 à 09h53
" />
Le 20/10/2015 à 09h55
Avec tous les devs qui veulent faire le prochain flappy bird sur mobile ou shovel knight sur PC, tu m’étonnes que le marché soit saturé! y’a tellement d’offres maintenant que tu sais plus trop ou donner de la tête.
Le 20/10/2015 à 09h56
créer un petit jeu à la con :-)
Le 20/10/2015 à 09h59
Bah viens sur rpg maker on y est bien " />
Le 20/10/2015 à 10h02
Le 20/10/2015 à 10h54
Rassures moi , il a vidé la bouteille de jaune avant de faire la vidéo du volant ? ^^
Remarque il a pas tort , logitech à moins de taper dans le G2x c’est de la merde…
Le 20/10/2015 à 11h23
Le 20/10/2015 à 11h30
Tu m’a tué ! Merci pour pour le fou rire !
Le 20/10/2015 à 11h37
“Privé” car des demandes de mon opinion.
Pas de “public” car pas le temps de gérer réellement tout cela et j’ai failli faire comme Marcus …mais la vie en a décidé autrement .
D’autres priorités erf.
Le 20/10/2015 à 11h41
Euh on est dans un cas différent de 83 il y avait une saturation du marché du à des copies non contrôlées, un piratage dément, une distribution m*ique et des jeux à bas budgets et une proliférations de consoles et de plateformes différentes.
La on a effectivement pas mal de plateformes (même si dans les faits pas tant que ça avec les avances des sdks multi plateformes tels qu’Unity c’est devenu bien plus simple), mais le problème est que le marché est devenu trop vaste et dilué. Il faut donc comme le cinéma savoir ciblé son public et savoir gérer un budget.
SAUF QUE Le cinéma et le jeu vidéo n’ont pas les mêmes avantages niveau contrats et gestion d’entreprise, et c’est pour ça qu’il y a eu un exode MASSIF au canada. Les aides à la création ne sont toujours pas assez distribués aux petites structures qui ont donc une durée de vie faible (voir très faible) mais cela ne change pas par rapport à il y a six ans quand j’ai quitté l’industrie. Beaucoup de petites sociétés qui font de “l’alimentaire” en faisant du jeu de merde pour des plus gros.
Le 20/10/2015 à 12h59
Carrément qu’il y a trop de jeux. Je reste persuadé qu’aujourd’hui il y a de la place pour une console Très haut de gamme avec très Peu de jeux mais avec une qualité de fou. Une Neo-Geo Bis quoi.
Certains vont me dire PC Haut de gamme + Jeux AAAA etc… Non c’est pas ça. Une console de fou je dit :) Celle que limite tu loues pour une semaine parce que c’est trop chère mais au moins tu en gardes un souvenir à la disney land.
Le 21/10/2015 à 08h15
moi j’y crois pas trop malheureusement..
la rentabilité (viabilité) vient de la quantité d’une part.. et de la répartition des risques d’autre part.
Le 21/10/2015 à 08h18
Le 21/10/2015 à 08h21
Hélas oui….