CPU et supercalculateurs européens : SiPearl multiplie les partenariats avec AMD, Graphcore, Intel, NVIDIA…
Il faut rhéaliser ses rêves
Le 15 novembre 2022 à 13h17
7 min
Sciences et espace
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En charge de développer le processeur pour les supercalculateurs exaflopiques européens, la société SiPearl multiplie les parteneriats afin de prendre en charge des solutions d’accélérations tierces. C’est désormais le cas des solutions Graphcore, Intel, NVIDIA et AMD.
Le but de SiPearl est de « donner vie au projet du consortium European Processor Initiative (EPI) », qui regroupe pour rappel pas moins de 28 partenaires avec l’ambition de proposer un processeur capable d’alimenter un supercalculateur exaflopique. Cette frontière symbolique, dépassée pour le moment par un seul supercalculateur : Frontier avec 1,102 Exaflops.
SiPearl est une société franco-allemande créée par Philippe Notton en juin 2019. Elle est opérationnelle depuis janvier 2020 avec, pour commencer, 7,4 millions d’euros de financement européens dans le cadre du programme Horizon 2020. En décembre 2021, elle était lauréate du programme Accelerator du Conseil Européen de l’Innovation, avec 17,5 millions d’euros à la clé. Depuis le mois de mai, la barre des 100 collaborateurs a été dépassée sur les différents sites (Maisons-Laffitte, Barcelone, Duisbourg, Grenoble, Massy et Sophia Antipolis). De nombreuses offres sont encore en ligne.
L’entreprise développe donc « le microprocesseur haute performance et basse consommation qui sera le cœur des supercalculateurs européens indispensables pour affirmer la souveraineté technologique de l’Europe dans l’intelligence artificielle, la recherche médicale, la lutte contre le changement climatique, la gestion de l’énergie… ». Nous avons déjà détaillé la création et les ambitions de cette entreprise dans notre Magazine #3.
En l’espace d’un an, des partenariats avec Graphcore, Intel et NVIDIA
En juin de l’année dernière, SiPearl s’associait à Graphcore, une société britannique développant un Intelligence Processing Unit (IPU) qui, comme son nom l’indique, est spécialisé dans les calculs liés à l’intelligence artificielle. Plus précisément, il est question de simulation et de prédiction « dans des domaines aussi critiques que la météorologie, la climatologie, l’épidémiologie ou la gestion de l’énergie ».
Quelques mois plus tard, en octobre, c’était au tour d’Intel d’être partenaire de SiPearl. Via oneAPI (l’interface de programmation ouverte et unifiée d’Intel), l’accélérateur Ponte Vecchio du fondeur de Santa Clara pourra être combiné au processeur de SiPearl – Rhea – « afin de constituer un noeud de calcul à haute performance ».
En mai de cette année, rebelote avec NVIDIA. Le communiqué parle d’un « accord de collaboration stratégique » avec « des développements techniques et commerciaux conjoints visant à combiner leur portefeuille respectif de solutions matérielles et logicielles ».
Les accélérateurs NVIDIA fonctionneront « de manière harmonieuse avec Rhea »
Les deux partenaires vont ainsi « développer une plateforme permettant de porter et d’analyser les charges de calcul vectoriel en combinant les points forts des microprocesseurs de SiPearl (comme son interface mémoire à grande vitesse) et des processeurs graphiques de NVIDIA (notamment le parallélisme et le débit massifs) ». Des instituts de recherche européens sont également associés.
SiPearl affirme qu’il travaille avec NVIDIA « pour s'assurer que la gamme de solutions de calcul accéléré et solutions réseaux de NVIDIA fonctionnera de manière harmonieuse avec Rhea, la première génération de microprocesseurs de SiPearl, ainsi qu’avec les générations suivantes ».
Les cibles mises en avant sont assez proches de celles citées lors de l’annonce du partenariat avec Graphcore : « les domaines stratégiques de la recherche fondamentale, l'intelligence artificielle, la santé, le climat, l'énergie, l'ingénierie, la géologie et les États ».
Rhea pourra renforcer ses capacités avec l’Instinct d’AMD
Hier, c’était au tour d’AMD d’entrer dans la danse avec une « collaboration commerciale », annoncée juste au moment de l’ouverture du salon SuperComputing de Dallas. Le but étant cette fois-ci de proposer une offre combinant le futur processeur Rhea avec les accélérateurs Instinct d’AMD.
Les deux entreprises « évalueront ensemble l'interopérabilité du logiciel ouvert ROCm d’AMD avec le microprocesseur Rhea et construiront une solution logicielle optimisée destinée à renforcer les capacités de Rhea associé à un accélérateur Instinct […] Ce travail conjoint, qui cible les activités de portage et d'optimisation du backend HIP d’AMD, des compilateurs et des bibliothèques openMP, permettra aux applications scientifiques de bénéficier des deux technologies », ajoute le communiqué.
Comme avec NVIDIA, des instituts de recherche en Europe seront mis à contribution « afin de permettre aux principaux développeurs et propriétaires de code européens de porter et d'optimiser leurs applications sur la solution SiPearl-AMD ».
Pour SiPearl, ce nouveau partenariat « élargit considérablement le choix de solutions d'accélération proposées conjointement avec le microprocesseur Rhea » afin que les utilisateurs puissent choisir « la meilleure combinaison possible afin de répondre parfaitement à leurs besoins applicatifs ». Là encore une nouvelle liste de domaines stratégiques est mise en avant, mais elle reste dans la lignée des précédentes : « l'intelligence artificielle, le climat, l'énergie, la géologie, l’ingénierie, la recherche, la santé ou la sécurité ».
Dans le petit monde du calcul haute performance (HPC), SiPearl dispose ainsi des partenariats suivants :
- « AMD pour ses accélérateurs Instinct ;
- Graphcore pour son Intelligence Processor Unit (IPU), microprocesseur dédié à l’IA ;
- Intel pour sa gamme d’accélérateurs graphiques Ponte Vecchio utilisée avec l’interface de programmation ouverte et unifiée oneAPI ;
- NVIDIA pour son portefeuille de solutions de calcul accéléré et de solutions réseaux. »
Première phase de l’EPI terminée, la seconde est lancée
La Phase 1 du projet de l’European Processor Initiative (EPI) a été bouclée fin 2021, « avec la livraison [par SiPearl] de technologies de pointe pour la souveraineté européenne – dans les temps et avec un budget limité, malgré la pandémie –. Elle comprend la définition des spécifications architecturales de Rhea, la 1ère génération du microprocesseur européen et le lancement de son implémentation. Avec 29 cœurs RISC-V, l’architecture Arm Neoverse V1 utilisée par SiPearl pour concevoir Rhea offrira une solution efficace, évolutive et personnalisable pour les applications HPC ». Un accord de licence a pour rappel été signé avec Arm en avril 2021.
La seconde phase a débuté en janvier 2022 avec trois principaux objectifs :
- « renforcer la compétitivité et le leadership de l’industrie et de la science européennes ;
- développer les technologies microprocesseur européennes avec des ratios de performance et de puissance meilleures que la concurrence ;
- s’attaquer à des segments importants des marchés plus larges et/ou émergents du HPC et des big datas ».
Cette seconde phase doit notamment permettre d’augmenter le nombre de cœurs, d’améliorer la bande passante mémoire, d’ajouter de l’accélération ainsi que des « blocs de propriété intellectuelle sur-mesure ».
Le processeur Rhea2 attendu pour 2024
La production de la première puce Rhea est attendue pour la fin de l’année, avec au moins 64 cœurs ARM Neoverse V1 Zeus, épaulés par 64 Go de HBM2e, avec la prise en charge de la DDR5 sur quatre canaux et du PCIe 5.0. La fabrication des microprocesseurs sera, « dans un premier temps », confiée au Taiwanais TSMC, avec une finesse de gravure de 6 nm pour Rhea.
La suite est déjà prévue : Rhea2 (nom de code Cronos) est attendue pour 2024 avec le passage au 5 nm et 96 cœurs. Il faudra ensuite attendre 2026 pour Rhea3 en 3/2 nm avec au moins 128 cœurs cette fois-ci.
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Commentaires (10)
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Abonnez-vousLe 15/11/2022 à 16h56
« Avec 29 cœurs RISC-V, l’architecture Arm Neoverse V1 utilisée par SiPearl pour concevoir Rhea offrira une solution efficace »
Ça veut dire que le cpu RHea combine des cœurs RISC-V avec des cœurs Arm?!?
J’ai bon?
Le 15/11/2022 à 17h21
Désolé il manque la fin de mon interrogation :
Où alors c’est l’archi Neoverse V1 de Arm qui utilise des cœurs RISc-V?
Merci 🙏
Le 15/11/2022 à 23h15
Je me pose la même question
Le 16/11/2022 à 13h19
Le Neoverse V1 c’est un coeur ARM, pas de RISC-V
Le 15/11/2022 à 21h07
Avec autant de partenaria, la logique d’indépendance technologique n’est elle pas un peu dilué ? Voir complètement noyauté par les gros du secteurs qui sauront se rendre indispensable avec leur propriété intellectuel ?
Le 15/11/2022 à 21h52
Je m’inquièterai plus de la fonderie par TSMC. Mais bon pas trop le choix pour qui veut un procédé performant.
Sinon les gros du secteur ont des écosystèmes déjà bien en place, sans être spécialiste de ces marchés ça m’apparait comme incontournable. Nouer des partenariats est pour le moment plutôt une bonne chose, car partir de 0 et y aller tout seul dans son coin, c’est pas non plus très viable.
Le 16/11/2022 à 13h36
En effet pour aller vite autant se ne par réinventer la roue. L’objectif d’indépendance doit être a (très) long terme … en espérant que l’on ne se perde pas en route
Le 16/11/2022 à 07h13
Oui je me suis fait la même remarque… Au final c’est de l’assemblage d’ARM, sauce intel, NVidia, AMD fondu à Taiwan avec des techno de production US à risque d’embargo…
La souveraineté est assez théorique quand même…
Le 18/11/2022 à 07h11
Pour moi c’est pas très clair:
A aucun moment dans les papiers que j’ai lu, ARM n’utilise de coeur RISC-V (ou alors peut-être sur des fonctions de firmware annexe, au mieux).
https://www.tomshardware.com/news/arm-details-neoverse-v1-and-n2-platforms-new-mesh-design
Par contre, dans RHEA, ils parlent de KVX RISC-V emulator.
=> De ce que j’en comprends, l’implémentation sera composée autour de coeurs ARM Neoverse, mais “agrémenté” de FPGA et/ou d’asic spécialisées qui elles pourront faire tourner du RISC-V.
Et ce y compris au sein d’une même puce.
Un beau casse-tête pour développer sur ça :-)
Le 18/11/2022 à 17h48
Merci 🙏