Le CESE travaille à l’instauration de pétitions en ligne
La pétition vient en mangeant
Le 25 janvier 2017 à 08h00
8 min
Droit
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Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) envisage de « dématérialiser » les pétitions que peuvent lui soumettre les citoyens. Nous avons pu discuter de ce projet avec Gérard Aschieri, qui a récemment co-signé un avis de l’institution sur le renforcement de l’engagement citoyen grâce au numérique.
Alors que Nathalie Kosciusko-Morizet proposait durant la primaire de la droite de remplacer le CESE par une « Chambre numérique des citoyens », sorte de plateforme où les internautes auraient pu déposer des propositions de loi, l’institution s’apprêterait-elle à opérer d’elle-même sa « révolution numérique » ?
Régulièrement critiquée pour sa faible utilité, cette assemblée au rôle purement consultatif a adopté le 10 janvier dernier un avis au travers duquel on apprend que « le CESE proposera de travailler à la mise en place d'une plateforme de pétition », un peu comme l’avait souhaité François Hollande courant 2016.
Une procédure cadenassée depuis plusieurs années
Depuis la réforme constitutionnelle de 2008, cet organisme composé de représentants de la société civile (salariés, associations, artisans, etc.) a désormais pour rôle de recevoir des pétitions citoyennes, auxquelles il reste toutefois libre de choisir « les suites qu'il propose d'y donner ».
Sauf que pour être recevable, toute pétition doit remplir une série de conditions pour le moins rédhibitoires... Il faut qu’au moins 500 000 personnes majeures, de nationalité française ou résidant régulièrement en France, apportent leur signature au texte en question. Chacune d’entre elles doit avoir laissé ses noms et prénoms ainsi que son adresse postale complète, de même qu’une signature manuscrite. Le tout doit être envoyé au CESE par liasses de cent, contenues dans des cartons numérotés, etc.
Bref, on comprend ainsi pourquoi une seule pétition a réussi à terminer son chemin de croix ! C’était en 2013, à propos du mariage pour tous. Manque de chance pour ses initiateurs : le Conseil l’a jugée irrecevable, au motif qu’elle portait sur un projet de loi soumis au Parlement (la loi Taubira). Le bureau du CESE a néanmoins décidé de s’autosaisir sur « les évolutions contemporaines de la famille et leurs conséquences en matière de politiques publiques ».
« Dématérialiser » la saisine du CESE par voie de pétition
L’institution travaille donc sur un projet qui pourrait changer profondément l’utilisation de cet outil : une dématérialisation des pétitions, dont les signatures seraient recueillies directement depuis un site Internet officiel. « Il y a un appétit de consultation, il y a un appétit d'échange, et le numérique peut fortement contribuer à ça, sous certaines conditions (notamment en termes de protection des données, de vérification des signatures, etc.). C'est nous semble-t-il une réponse d'avenir à une aspiration de plus en plus forte de la société que d’être associée aux débats » nous explique Gérard Aschieri, co-auteur de l’avis intitulé « Réseaux sociaux numériques : comment renforcer l'engagement citoyen ? »
Débarrassés des problèmes matériels, financiers et organisationnels liés à l’envoi sur support papier des signatures, on imagine sans mal que les citoyens devraient être plus facilement séduits par ce nouvel outil. Chacun n’aurait qu’à se rendre sur la plateforme choisie par le CESE pour prendre connaissance des pétitions ouvertes ou en soumettre de nouvelles. Comme sur certains sites spécialisés, des compteurs pourraient permettre aux internautes de savoir quels textes sont sur le point d’atteindre le seuil fatidique de 500 000 signatures.
Des difficultés techniques et juridiques
« Pour l'instant, c'est encore à l'étude », temporise néanmoins Gérard Aschieri. « Il y a des difficultés d'ordre législatif, ainsi que des questions plus techniques et financières... Tout cela est en train d'être travaillé par le bureau du CESE. »
Si l’article 69 de la Constitution prévoit que le Conseil peut être saisi « par voie de pétition », la loi organique qui le complète précise effectivement que chaque pétition doit être « établie par écrit » (et non par d’autres canaux, notamment électronique). Autrement dit, on voit mal comment cette réforme pourrait voir le jour sans intervention du législateur.
Autre problématique : s’assurer que ce sont bien les citoyens qui apportent leur signature aux pétitions proposées, non un robot ou un usurpateur d’identité. Le CESE a cependant sa petite idée pour résoudre l’équation... « Le développement de FranceConnect, qui permet à un(e) usager(ère) d'accéder aux informations personnalisées de différents services publics, à partir d'un seul point d'entrée, tout en assurant la protection de leurs données, pourrait servir de point d'appui à ce travail », relève Gérard Aschieri dans son récent avis.
Pour l’heure, tout semble encore à l’état embryonnaire, même si FranceConnect est utilisé pour de plus en plus de services publics numériques : solde de points du permis de conduire, compte personnel d’activité, etc. « L'idée c'était de commencer à avancer des pistes au premier trimestre 2017. Mais je pense qu'on va attendre que les élections soient passées », nous confie cet agrégé de lettres à la retraite.
Gérard Aschieri demeure quoi qu’il en soit convaincu de l’intérêt d’une telle réforme : « Si le CESE est capable de prendre en compte des attentes qui s'expriment par des pétitions de ce type, ça ne fera que renforcer son poids, et donc renforcer l'efficacité de la démarche. Il peut y avoir un cercle vertueux aussi bien que vicieux, si les gens ont le sentiment que ça ne sert à rien... »
L’intéressé estime qu’il serait possible d’aller plus loin en couplant ce dispositif à une plateforme de consultations en ligne. « Ce n'est pas parce qu'il y a une pétition ou une consultation que les instances élues doivent abdiquer leur droit à décider ou à donner un avis », soutient-il. « Mais il y a une sorte d'appétit d'association à la prise de décision, pour que les débats ne se passent pas seulement entre représentants et que tout un chacun puisse s'exprimer. »
Tandis que certains craignent que ces initiatives alliant démocratie participative et numérique s’essoufflent rapidement, Gérard Aschieri prévient que les projets du CESE ne pourront être viables qu’à deux conditions. Premièrement, « que les gens puissent en voir les effets, c'est-à-dire que ce soit pris en compte sous une forme ou une autre ».
Deuxièmement, que la question de l’accessibilité ne soit pas oubliée : « Ça ne peut pas marcher si on ouvre très vite une plateforme de consultation, qu’on ne fait pas de publicité, et à partir de là qu’on dise qu'on a consulté. Il faut qu'il y ait de l'information, que l'ergonomie soit bonne, etc. Il faut aussi bien sur que l'accès à Internet soit largement répandu. »
La délicate question des seuils
Et pourquoi pas abaisser le seuil de 500 000 signatures ? « Il y a des cas où on y arrive sans trop de difficultés, quand il y a des grands sujets, de forts mouvements d'opinion » répond Gérard Aschieri. Lequel cite en exemple la pétition contre la loi Travail, qui comptabilise à ce jour plus de 1,3 millions de signatures (dans des conditions de vérification toutefois bien moins drastiques que ce qu’envisage le CESE).
L’expérience du « référendum d’initiative populaire », en vigueur depuis 2015 mais jamais activé à cause de son seuil encore plus important – environ 4,5 millions de citoyens inscrits sur les listes électorales – montre cependant qu’il peut parfois être difficile de mobiliser très largement, y compris via Internet.
« Par ailleurs, le CESE peut très bien s'auto-saisir, même si la Constitution ne l'oblige pas à prendre en compte une pétition qui n'aurait pas obtenu ses 500 000 signatures, considérant qu'il y a quelque chose qui se passe dans l'opinion. » En clair, le Conseil garde une grande liberté et pourrait choisir d’explorer certains sujets à partir des pétitions en gestation sur Internet.
Si l'on déplace ce projet à la lumière de la campagne présidentielle, force est de constater que la question des pétitions intéresse assez peu les candidats à la présidentielle. Seul Alain Juppé avait fait une proposition en ce sens, consistant à ce que le gouvernement soit tenu de répondre sous 30 jours aux pétitions ayant recueilli le soutien d’au moins 100 000 internautes. Une idée directement copiée sur ce qui prévaut aux États-Unis (voir notre article).
Le CESE travaille à l’instauration de pétitions en ligne
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Une procédure cadenassée depuis plusieurs années
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« Dématérialiser » la saisine du CESE par voie de pétition
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Des difficultés techniques et juridiques
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La délicate question des seuils
Commentaires (13)
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Abonnez-vousLe 25/01/2017 à 08h41
”…l’engagement citoyen grâce au numérique.”
…puis vient ceci :
“…. toute pétition doit remplir une série de conditions pour le moins
rédhibitoires… Il faut qu’au moins 500 000 personnes majeures, de
nationalité française ou résidant régulièrement en France, apportent
leur signature au texte en question. Chacune d’entre elles doit avoir
laissé ses noms et prénoms ainsi que son adresse postale complète, de
même qu’une signature manuscrite.*..”
..et, 100 balles et un Mars, non ? " />
* ah..ça doit être PRATIQUE ! " />
Le 25/01/2017 à 08h52
Qu’on supprime cette chose inutile! Merci.
Le 25/01/2017 à 09h06
Ou comment compliqué un chose simple…
Qu’on arrête avec ça et qu’on passe à autre chose.
Le 25/01/2017 à 09h10
et la maison blanche doit répondre aux pétitions ayant requis 50 000 signatures, pour un pays qui compte 4 fois plus de citoyens…
Cherchez l’erreur.
No comment sur les 4.5 millions… même pas sur qu’ils arrivent à avoir ce chiffre pour un seul et même candidat à la présidentielle.
Le 25/01/2017 à 10h39
je pense qu’on est bien plus que 4,5 millions de personne à vouloir dégager la classe politique.
Le 25/01/2017 à 16h44
Le 25/01/2017 à 16h46
Le 26/01/2017 à 08h46
Pourtant je ne pense pas que ma phrase soit si compliquée.
Et ton avis je dois t’avouer (sans aucune animosité) que je n’y accorde pas la moindre importance (comme la classe politique " />).
Le 26/01/2017 à 09h07
Le 26/01/2017 à 10h10
Donc du coup tu cherches à connaitre ma définition pour connaitre mon point de vue et ce que je propose à la place ?
Dans ce cas je vais répondre mais de manière à te donner la couleur de mon opinion puisqu’il me semble que c’est que tu cherches à savoir.
Qui/quoi à la place ? Le peuple tout simplement. Nous sommes actuellement dans un système où les personnes qui représentent le plus de personnes (en terme de nombre) sont celles qui servent, soit leurs intérêts personnels, soit des intérêts privés. En redonnant le pouvoir au plus grands nombre (et je pense qu’on en a les moyens à notre époque, l’époque du numérique) on pourra de nouveaux revenir dans un système qui correspond aux valeurs de la France.
(Suffit de voir le nombre de dossier de mise en justice de nos chères politiciens qui a explosé depuis quelques années, et pourtant je suis certain qu’il devrait y en avoir 10 fois plus si on creuse un peu)
Le 26/01/2017 à 15h01
Le 26/01/2017 à 16h19
“Je n’ai pas besoin de connaître la “couleur” de ton opinion, juste le remplacement supposé.”
“Mais ça ne veut rien dire, concrètement. Il faut des responsables, et pas qu’à haut niveau (ceux du niveau en-dessous sont généralement des hauts-fonctionnaires, qui peuvent avoir une forme de pouvoir). ”
“J’attends des preuves de cette affirmation. Comme si parmi le personnel politique, le moteur n’était que l’ambition personnelle (il en faut) ou l’intérêt privé (c’est moins bien). ”
“Les “valeurs de la France”… Wahou. Je n’avais pas fait gaffe qu’on ne défendait plus de valeurs dans notre pays. On n’a même un peu que ça à la bouche. Sauf que selon l’orientation politique, ce ne sont pas toujours les mêmes. “
Wep ça c’est certain que t’as raison. Quand tu vois que la fraude aux aides (chômages/CAF/RSA/ etc, etc) ne représente même pas 10% de ce que la fraude fiscal coûte à l’état et que le gouvernement a l’air plus préoccupé de chasser le mec qui touche des alloc pour rien plutôt que toutes les grosses entreprises et les personnes fortunés qui planquent leurs pognon pour pas participer au système EFFECTIVEMENT l’orientation politique n’est pas la même haçaoui tout à fait d’accord. (peut-être parce qu’ils sont eux même en état de fraude fiscale nos petits politiciens comme un certain CAHUZAC hein ?!)
“Ah, explosé, vraiment ? Quels sont les chiffres ?
“Bon je sens qu’on pourrait y passer 20 commentaires sans avancer, te sens pas obligé d’en faire des tartines si tu me réponds.”
Le 26/01/2017 à 17h03