Géoblocage : le Tribunal de l’Union européenne confirme la condamnation de Valve
Nuances autour du droit d'auteur
Le 27 septembre 2023 à 15h00
4 min
Droit
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En janvier 2021, six studios de jeux vidéo étaient condamnés pour blocage géographique. Ces sociétés, Valve en tête, avaient fait appel de la décision. Le Tribunal de l’Union européenne vient de confirmer la condamnation.
Enquête en 2017, verdict de la Commission en 2021
Bandai, Capcom, Focus Home, Koch Media, Valve et Zenimax ont été accusés il y a six ans d’avoir introduit des mesures de géoblocage dans leurs titres, ou plutôt dans leurs plateformes d’achats. C’est particulièrement le cas pour Steam, boutique très utilisée par les joueurs sur PC, et au centre de l’expérience du Steam Deck.
Avec le géoblocage, il n’est pas possible d’acheter un titre dans un pays puis de l’activer dans le sien. Par exemple, on ne peut pas acheter un jeu en Pologne puis en activer la licence en France.
La Commission européenne avait ouvert une enquête. Durant la constitution du dossier, Valve et les autres studios avaient avancé que la mesure était destinée à mieux protéger le droit d’auteur.
En janvier 2021, quand la Commission rend son verdict, cet argument est écarté : « Valve et les éditeurs ont restreint les ventes transfrontières de certains jeux vidéo sur PC sur la base de la localisation géographique des utilisateurs au sein de l'Espace économique européen (EEE), se livrant ainsi à des pratiques dites de "blocage géographique" », pointait alors la Commission.
Sans surprise, Valve avait déposé un recours devant le Tribunal de l’Union européenne, afin que Steam n’ait pas à faire sauter le verrou. Peine perdue, car le Tribunal a confirmé le verdict de la Commission.
Le Tribunal confirme la décision de la Commission
Selon le Tribunal, l’enquête de la Commission avait bel et bien levé le lièvre, à savoir « un accord ou une pratique concertée entre Valve et chacun des cinq éditeurs visant à restreindre des importations parallèles par le géoblocage des clés permettant d’activer et, le cas échéant, d’utiliser les jeux vidéo en cause sur la plateforme Steam ».
Le Tribunal enfonce le clou : « Ce géoblocage visait à empêcher que les jeux vidéo, distribués dans certains pays à des prix bas, soient achetés par des distributeurs ou des utilisateurs se trouvant dans d’autres pays où les prix sont bien supérieurs ».
En conséquence, il « ne poursuivait pas un objectif de protection des droits d’auteur des éditeurs des jeux vidéo pour PC, mais était utilisé aux fins de la suppression des importations parallèles de ces jeux vidéo et de la protection du niveau élevé des redevances perçues par les éditeurs, voire des marges perçues par Valve ».
Droit d'auteur et concurrence au sein de l'Union
Point intéressant, le Tribunal a dû se prononcer sur le lien entre droit de la concurrence dans l’Union et droit d’auteur. Face aux arguments de Valve, il rappelle donc que le droit d’auteur garantit effectivement « aux titulaires des droits concernés la faculté d’exploiter commercialement la mise en circulation ou la mise à disposition des objets protégés, en accordant des licences moyennant le paiement d’une rémunération ».
Cependant, et contrairement à ce qu’en pensait Valve, « il ne leur garantit pas la possibilité de revendiquer la rémunération la plus élevée possible ni d’adopter un comportement de nature à aboutir à des différences de prix artificielles entre les marchés nationaux cloisonnés ». Ce cloisonnement est déclaré « incompatible » avec la « réalisation du marché intérieur ». La décision complète du Tribunal est disponible par ici.
Valve n’a pas coopéré durant l’enquête
La pratique doit donc cesser et les amendes infligées par la Commission européenne sont confirmées. Voici les montants pour rappel, les pourcentages entre parenthèses désignant les remises accordées en récompense de la coopération pendant l’enquête (on peut ainsi voir que Valve est la seule société à ne pas coopérer) :
- Focus Home (10 %) : 2 888 000 euros
- ZeniMax (10 %) : 1 664 000 euros
- Valve (0 %) : 1 624 000 euros
- Koch Media (10 %) : 977 000 euros
- Capcom (15 %) : 396 000 euros
- Bandai Namco (10 %) : 340 000 euros
Le Tribunal rappelle enfin qu’un « pourvoi, limité aux questions de droit, peut être formé, devant la Cour, à l’encontre de la décision du Tribunal, dans un délai de deux mois et dix jours à compter de sa notification ».
Géoblocage : le Tribunal de l’Union européenne confirme la condamnation de Valve
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Enquête en 2017, verdict de la Commission en 2021
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Le Tribunal confirme la décision de la Commission
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Droit d'auteur et concurrence au sein de l'Union
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Valve n’a pas coopéré durant l’enquête
Commentaires (9)
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Abonnez-vousLe 27/09/2023 à 15h15
je me demande si du coup, les éditeurs vont arrêter les tarifs locaux (donc le même prix dans toute l’Europe) ou s’ils vont accepter que les (certains) joueurs vont acheter chez le moins cher.
Le 27/09/2023 à 15h21
Mais du coup, comment font les sites comme Instant Gaming pour avoir des prix réduits (je pensais qu’ils s’approvisionnaient dans les autres pays d’Europe).
Le 27/09/2023 à 15h42
Je pense (mais pas sur) qu’ils achètent en lots… Peut être pendant une promo ?
Le 27/09/2023 à 17h52
En lisant l’article, on voit qu’il n’y a que 5 éditeurs concernés. Peut être que les autres éditeurs acceptent d’avoir des tarifs différents et pas de geoblocage ?
cela expliquerait les prix des sites comme instant gaming ou autre.
Modifié le 09/12/2024 à 22h05
Le 28/09/2023 à 07h03
Je ne te demandais pas ton avis sur Instant Gaming (à première vue ils sont basés en Arizona) mais comment instant gaming peut vendre des clés Steam issues de pays étrangers à des français si Valve l’interdit.
Le 27/09/2023 à 19h03
Le retour des achats de jeux via l’Argentine ?
Le 27/09/2023 à 20h29
Nan, ça ne concerne que l’Europe. Le géo blocage reste possible en dehors de l’UE 😃. Comme le zonage j’ imagine.
Le 27/09/2023 à 20h38
Le studio français Focus Home a pris la plus salée 😬