[Tribune] Cyberhaine : Point de Contact et Netino appellent à préciser la PPL Avia
Bas de l'haine
Le 29 mai 2019 à 13h06
5 min
Droit
Droit
La proposition de loi Avia contre la cyberhaine veut obliger les plateformes à supprimer dans les 24 heures les contenus manifestement haineux. Le CNB et le CNum ont déjà adressé des critiques. Le Conseil d’État réclame lui plus de clarté. Dans cette tribune, l’association Point de Contact et Netino By Webhelp appellent à développer et préciser le texte (M.R.)
À quelques semaines des débats à l’Assemblée nationale relatifs à la proposition de loi dite Avia visant à la lutte contre les discours de haine en ligne, Point de Contact et Netino By Webhelp souhaitent encourager et soutenir la mobilisation du Gouvernement et des parlementaires en la matière.
Point de Contact dispose depuis plus de vingt ans d'une expertise dans le signalement de contenus odieux sur Internet et est l'interlocuteur privilégié de nombreuses plateformes et autorités publiques. Netino modère plusieurs milliers de contenus quotidiennement pour de grands médias français. Au regard de cette expérience commune, il nous paraît important de partager notre point de vue sur le texte en discussion.
Point de Contact et Netino by Webhelp soutiennent sans équivoque toutes les mesures prises en vue de lutter contre la propagation de toute forme de contenus haineux en ligne. Toutefois, nous nous interrogeons sur le rôle et la place de chacun dans le dispositif actuellement envisagé par la proposition de loi portée par Madame la députée Laetitia Avia.
Nous partageons ainsi les inquiétudes du Conseil National du Numérique sur l'article 1er de la proposition de loi, qui imposerait aux plateformes de retirer ou de rendre inaccessible dans un délai de 24 heures, « tout contenu constituant manifestement une incitation à la haine, à la violence ou à la discrimination ou une injure discriminatoire à raison de la race, de la religion, du sexe, de l’orientation sexuelle ou du handicap », sous peine de se voir infliger une amende pouvant aller jusqu’à 4% de leur chiffre d’affaires annuel.
« Éviter tout risque d'abus »
Bien que l’idée semble séduisante, un tel délai couplé à un tel risque d’amende aurait nécessairement pour conséquence d’inciter les plateformes à censurer préventivement certains contenus qui leur seraient signalés, alors même que l’illicéité de ceux-ci ne serait pas manifeste.
Afin d'éviter tout risque d'abus, il semblerait donc plus raisonnable que cette obligation de retrait sous 24 heures ne s’applique que lorsque la notification émane d’un tiers de confiance certifié, qui aura pré-qualifié le contenu, comme l’a préconisé le législateur européen sur les questions de terrorisme. Notons enfin que ce court délai peut également être préjudiciable au regard de la récolte de la preuve tant par les autorités que par les victimes qui souhaiteraient s’en prévaloir
Par ailleurs, la définition des discours de haine en ligne étant sujette à controverse, il nous semble primordial qu’une personnalité qualifiée de l’ordre judiciaire intervienne tant au stade de la qualification des contenus haineux qu’à la suppression. En outre, l’autorité compétente devra constituer, afin d’assurer de manière fonctionnelle l’élaboration de recommandations à destination des plateformes, un comité d’experts dont la société civile ferait partie intégrante au même titre que les autorités et les plateformes.
« Observatoire de la haine en ligne »
Ainsi, nous soutenons et encourageons la création d’un « Observatoire de la haine en ligne » sous forme d’organe hétéroclite constitué des autorités, des plateformes, de la société civiles et d’experts afin de pallier le manque de documentation et de recherches en la matière.
Si Point de Contact et Netino appréhendent le signalement comme un acte citoyen et responsable, font d’expérience le constat qu’un grand nombre des signalements reçus et traités s'avèrent être infondés. Faciliter et inciter au signalement doit impérativement s’accompagner d’une sensibilisation à ce dernier.
En outre, si la volonté de simplifier le signalement est louable, il semble néanmoins important que l’internaute fournisse à l’occasion de son signalement des éléments de contexte nécessaires à un traitement plus efficace des signalements reçus.
Enfin, Point de Contact et Netino déplorent l’absence de dispositions relatives au renforcement des moyens des services de police et de gendarmerie spécialisés de l’OCLCTIC.
La lutte contre la haine en ligne est un sujet varié et complexe. Pour toutes ces raisons Point de Contact et Netino s’inquiètent que la proposition de loi envisagée ne tiennent pas entièrement compte des difficultés directement attachées à cette problématique.
[À propos de Point de Contact] Depuis plus de vingt ans, l’association Point de Contact permet aux internautes de signaler de manière anonyme ou non, tout contenu choquant rencontré sur internet via un formulaire de signalement. Véritable modèle de partenariat public-privé, elle est reconnue au plan national comme tiers de confiance par les autorités publiques ainsi que par les grandes plateformes et est soutenue dans ses actions par la Commission européenne à travers le programme Safer Internet.
[À propos de Netino by Webhelp] Depuis 2010, Netino oeuvre chaque jour à retirer les propos haineux et illégaux publiés sur les sites web et espaces sociaux de nombreux médias et entreprises. En tant que spécialiste de la modération, Netino publie chaque trimestre un "Panorama de la Haine" pour alerter l'opinion publique de la lente dégradation du respect entre internautes dans les commentaires en ligne.
[Tribune] Cyberhaine : Point de Contact et Netino appellent à préciser la PPL Avia
-
« Éviter tout risque d'abus »
-
« Observatoire de la haine en ligne »
Commentaires (11)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 29/05/2019 à 13h57
En résumé : comme bien trop souvent, on prépare une loi à la fois totalement malfoutue et super dangereuse.
En espérant que ces organisations soient écoutées, au moins un minimum…
Le 29/05/2019 à 14h02
J’y crois même pas…
Sur un autre sujet, certes, mais il aura fallu la pétition de “L’affaire du siècle” pour que nos décideurs sentent le vent du boulet et remettent le dossier de l’urgence climatique sur le dessus de la pile.
Donc sur ce sujet, dormons tranquille braves gens.
Le 29/05/2019 à 17h59
Hélas, elle a déjà démontré en sa qualité de co-rapporteure du projet de Loi Justice qu’elle ne fait aucun cas des critiques et propositions, après une concertation de façade, elle reste sur la droite ligne du gouvernement.
Je ne doute pas qu’il en sera de même des recommandations et préoccupations du CNum et du CNB, lequel notamment a renouvelé son opposition à la fin de l’anonymat ou plus exactement du pseudonymat sur les réseaux sociaux.
Et au final, il faut compter sur le Conseil Constitutionnel pour sabrer les dispositions les plus dangereuses de ces textes fumeux décidés SEULS par ce gouvernement qui prend toute critique d’un projet de texte comme une opposition politique qu’il faut mépriser, voire insulter ; le CNB en a fait les frais dans une comparaison maladroite (euphémisme) entre ses pratiques et celles de “margoulins”, avant suppression du tweet présenté par Madame AVIA comme étant en réalité un brouillon…
Le 30/05/2019 à 08h29
Anéfé rejeté
Le 30/05/2019 à 09h58
Le pare-feu open office contre la cyber-haine, youpi. " />
Le 31/05/2019 à 09h53
soit la bienvenue ! " />
Le 31/05/2019 à 14h33
C’est son décolleté qui te met en joie ??
Le 31/05/2019 à 15h11
" />
Le 31/05/2019 à 15h40
Sur mobile on voit pas les avatars :(
Le 31/05/2019 à 17h59
On dirait que nos charmants modérateurs sont en WE et que tous les bots vont pouvoir continuer leur pollution ici…
J’ai signalé le premier message hier… sans résultat probant visiblement.
Le 04/06/2019 à 12h33
ou alors eux aussi aiment bien son décoleté…?
À tout hasard, je l’ai re-signalé aujourd’hui " />