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Chang’e 5, la mission chinoise qui veut rapporter des échantillons de la Lune, est en route

Rabbit in the sky with jade

Chang’e 5, la mission chinoise qui veut rapporter des échantillons de la Lune, est en route

Le 24 novembre 2020 à 16h00

La sonde chinoise Chang’e 5 navigue vers la Lune et devrait, si tout se passe comme prévu, rapporter 2 kg d’échantillons de la surface et du sous-sol ; une première depuis 44 ans. Cette mission complexe – avec notamment un rendez-vous dans l’espace – doit se terminer dans moins d’un mois.

La série de missions Chang'e est incontestablement un succès pour la Chine. Les deux premières remontent à 2007 et 2010, avec deux sondes très proches l’une de l’autre : Chang’e 1 et 2.

Elles se sont toutes les deux placées en orbite autour de la Lune. La première s’est désorbitée et s’y est écrasée, tandis que la seconde est partie à l’aventure dans l’espace. En 2013 et 2018, c’était au tour des missions Chang'e 3 et 4, avec un rover lunaire dans les deux cas : Yutu et Yutu 2 respectivement, signifiant « lapin de jade ».

Chang’e 4 était le premier atterrisseur à se poser sur la face cachée de la Lune, ce qui ne signifie pas pour autant qu’elle n’est jamais exposée au Soleil, mais simplement qu’on ne la voit pas directement depuis la Terre. De nombreux résultats scientifiques et de superbes photos ont été mis en ligne grâce à cette mission, qui permet à l’Agence spatiale chinoise de rayonner au niveau international. La relève est en route.

La longue attente de Long March 5 pour Chang’e 5

Chang’e 5 a décollé hier soir à bord d’une fusée Long March 5… avec plusieurs années de retard. La mission devait initialement se dérouler en 2017 mais, suite à une explosion de son lanceur lourd, la Chine a dû revoir ses plans.

Le vol inaugural de Long March 5 s’était déroulé sans problème en novembre 2016, avec le satellite Shijian 17 à son bord. La seconde mission était par contre un cuisant échec : un peu moins de six minutes après le décollage, un dysfonctionnement du premier étage a entrainé la perte du lanceur et du satellite Shijian 18.

Des améliorations ont été apportées pendant deux ans et, après plus d’une dizaine de mises à feu statique, Long March 5 retrouvait la route de l’espace fin 2019, débloquant par la même occasion plusieurs opportunités de vol.

Ce beau bébé de 57 mètres de haut pour 867 tonnes n’a pas à rougir de ses concurrents. Il peut en effet emporter jusqu’à 14 tonnes sur une orbite géostationnaire – 8,3 tonnes pour Falcon 9 et 10,9 tonnes pour Ariane 5 ECA – et 8,2 tonnes sur une trajectoire d’insertion en orbite lunaire.

Ça tombe bien, c’est exactement la masse au lancement de Chang’e 5, dont l’atterrisseur pèse à lui seul 3,8 tonnes. 

Chang’e 5
Crédits : SpaceFlighy 101

Une sonde composée de quatre couches 

La sonde est composée de quatre modules empilés les uns sur les autres : le module de service, la capsule de retour, l’atterrisseur et le module de remontée. Tout ce petit monde va s’insérer en orbite lunaire.

Les deux couches supérieures – atterrisseur et module de remontée – vont alors se détacher pour venir se poser en douceur sur le sol de la Lune. Un bras robotique et une foreuse vont alors se charger de récupérer des échantillons, jusqu’à une profondeur de 2 mètres. Les scientifiques espèrent repartir avec une cargaison de 2 kg.

Ils seront placés dans le module de remontée, qui va devoir réaliser un rendez-vous dans l’espace avec le reste de la sonde restée en orbite autour de la Lune. Pendant ce temps, l’atterrisseur mènera des expériences scientifiques. Il ne pourra cependant pas bouger de sa position, ce n’est pas un rover.

Une fois les précieux échantillons mis à l’abri, ils prendront le chemin retour vers la Terre. La capsule sera alors larguée pour venir en théorie se poser en Mongolie-Intérieure. C’est du moins le plan prévu par l’agence spatiale chinoise. Pour le moment, seule la première partie a été réalisée : la sonde est en route vers la Lune.

L’alunissage est prévu pour le 30 novembre, le retour sur Terre le 15 décembre.

Chang’e 5
Crédits : ESA

Une première depuis 44 ans, dans une zone inexplorée

Si le reste des opérations se déroule sans encombre, ce sera la première fois depuis 44 ans qu’un pays décroche des morceaux de Lune ; la dernière remonte à la mission russe Luna 24.

Il n’était alors question que de 170 grammes, bien loin des objectifs de Change’ 5. Mais les Américains ont toujours le record de la plus grosse moisson avec les missions Apollo ayant emmené des humains sur la Lune : plusieurs dizaines de kg à chaque fois et même plus d’une centaine avec Apollo 17. 

Interrogé par France 24 sur l’intérêt de rapporter de nouveaux morceaux de Lune, Patrick Michel (astrophysicien au Laboratoire J.-L. Lagrange) explique que, « jusqu'à présent chaque retour d'échantillons, que ce soit de la Lune ou d'un astéroïde, a bouleversé notre compréhension de l'univers ». L’attente est donc importante.

Les données seront d’autant plus intéressantes que les échantillons proviendront de la région du Mons Rümker, une zone inexplorée de la Lune et plus jeune que celles d’où proviennent les échantillons ramenés jusqu’à présent. Ils sont en effet tous originaires « d'un espace limité », précise Patrick Michel.

L’Europe et la France partenaires des missions Chang’e 

L’Agence spatiale européenne (ESA) est partenaire de la Chine. La base de Kourou en Guyane française était chargé de suivre de près la sonde les heures suivant son lancement, en collaboration avec le contrôle aérospatial de Pékin pour « déterminer exactement où se trouve l'engin spatial et établir une communication afin de vérifier sa santé ».

La collaboration avec l’ESA ne s’arrêtera pas là : « Aux alentours du 15 décembre, quand l'engin spatial reviendra sur Terre, l'ESA récupérera ses signaux en utilisant la station de Maspalomas, exploitée par l'Instituto Nacional de Tecnica Aerospacial (INTA) en Espagne ». Le but étant de repérer le plus précisément sa trajectoire et son entrée dans l’atmosphère afin de prévoir avec la meilleure exactitude possible la zone d’atterrissage sur Terre.

La France, via le CNES, sera un partenaire important de la prochaine mission : Chang’6. Elle « sera équipée de l'instrument DORN dédié à la mesure du radon. Objectifs : étudier le dégazage du régolithe, mais aussi le transport de ce gaz radioactif dans l’exosphère de la Lune avec des extrapolations possibles à d’autres espèces telle l’eau », explique le CNES. Le lancement est pour le moment prévu en 2023.

DRON CNES

Commentaires (2)

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Merci Sébastien pour tes articles toujours fouillés et compréhensibles sur le spatial, je me régale à chaque fois ! :inpactitude:

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Avec retard je salue également le travail de Sébastien :dix:

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  • La longue attente de Long March 5 pour Chang’e 5

  • Une sonde composée de quatre couches 

  • Une première depuis 44 ans, dans une zone inexplorée

  • L’Europe et la France partenaires des missions Chang’e 

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