Seagate nous parle de l’avenir de son stockage : HAMR, SMR, Mach.2 (Dual Actuator), etc.
Vers 50 To en 2026
Le 08 novembre 2019 à 15h38
8 min
Hardware
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Au cours des dernières années, la capacité des disques durs a principalement augmenté par l'ajout de nouveaux plateaux, mais des changements plus en profondeur se préparent. Nous avons pu échanger avec Seagate afin d'avoir une vision de ce que nous préparent les technologies SMR, HAMR et Mach.2.
Pour Seagate, la course à la capacité intéresse principalement les professionnels du cloud pour qui l’augmentation de la densité permet de stocker toujours plus dans un même volume. Ils sont donc sa cible principale, même si le grand public finit aussi par en profiter avec l'augmentation du rapport capacité/prix.
Depuis quelques mois, la technologie SMR revient régulièrement sur le devant de la scène ; il s’agit de disques durs avec un fonctionnement bien particulier nécessitant généralement un contrôleur compatible. Si Seagate en propose déjà dans sa gamme consacrée à la vidéosurveillance, d'autres arrivent.
Le fabricant se prépare également à lancer la gamme Mach.2 (Dual Actuator), avec deux bras mécaniques indépendants, et donc deux séries de têtes de lecture/écriture. De quoi doubler les débits et les IOPS sans toucher au format, puisque l'on reste sur du 3,5". Une solution à combiner idéalement avec certains modes RAID.
Les technologies actuelles à leurs limites
Pour Seagate, une chose de sûre : « avec la technologie telle qu'elle l'est aujourd’hui, on est au bout. En hélium on arrive à 9 plateaux, mais à mon avis 10 plateaux je ne suis pas sûr que ça se fasse », nous explique un technicien de la société. « Il n'y a plus beaucoup de matière en haut et en bas, on est très proches des bords et il faut quand même garder une certaine rigidité » de l’ensemble, laissant peu de place pour un dixième plateau.
Que se passerait-il si on était resté sur de l'air à la place de l'hélium ? « On serait certainement resté à 6 plateaux », selon notre interlocuteur. Autre avantage non négligeable de cette solution : « avec l'hélium, les consommations sont moindres et il y a moins d’échauffement ». Il n’est également pas envisageable de passer l’intérieur des disques sous vide : « on a besoin d'un support, il faut un gaz pour que les têtes volent ».
Bref, « pour continuer à augmenter la densité, à grossir, il faut changer la technologie ». Chez Seagate et Western Digital cela passe par le HAMR et le MAMR, deux approches un peu différentes pour un même but : exploser la densité par plateau. Seagate pense ainsi proposer 20 To en 2020, puis 30 To en 2023 et 50 To en 2025 grâce au HAMR.
Dans tous les cas, les évolutions se font sans changer de format. On reste dans le standard de 3,5" car développer d'autres facteurs de forme et/ou vitesses de rotation impliquerait « obligatoirement un impact sur les prix, car on n’a alors pas les mêmes volumes ». Pour le moment, il n’y a donc pas de tests de prévu pour augmenter la hauteur d'un disque dur de 3,5" afin d’ajouter encore plus de plateaux.
Côté vitesse de rotation, Seagate propose toujours des HDD à 10 000 tpm avec « pas mal de clients, [même si] ce n’est plus un marché important ». Et concernant le 15 000 tpm : « c'était vraiment un produit d'OEM, très très peu en distribution ». Dans les deux cas, il n'y a pas d'annonces récentes sur de telles solutions.
Doubler les débits et IOPS avec Dual Actuator
HAMR permet d’augmenter la densité des plateaux et donc la capacité des disques durs, mais Seagate travaille aussi sur une technologie permettant de doubler les débits : Mach.2 aussi appelé Dual Actuator (ou Multi Actuator). Pour résumer, il s’agit de diviser le HDD en deux, chaque moitié avec son propre bras et têtes de lecture/écriture.
« C'est comme si on avait scotché deux disques ensemble, avec une consommation moindre », nous explique Seagate. Le constructeur ajoute que cette solution est également moins coûteuse en termes de production. Le plus intéressant dans cette technologie, c’est qu’elle ne demande aucune adaptation côté contrôleur/hôte.
« On reprend l'adressage qui existait depuis la guerre des Gaules en SCSI avec le LUN [Logical Unit Number, ndlr] ». « Cette fonctionnalité existe dans le protocole de base, elle n’était plus utilisée et on l'a réactivé », nous explique notre interlocuteur. Il nous affirme avoir testé son disque dur Mach.2 avec un contrôleur LSI gérant les LUN de manière naturelle, sans constater de problème à l'usage.
La contrepartie est qu'il faut utiliser une connectique SAS (Serial Attached SCSI), une évolution du SCSI qui est capable de prendre en charge les LUN.
Des avantages certains avec un RAID
Avec cette solution on a plus que deux zones indépendantes au sein d'un même disque, puisqu'elles sont vues par le système comme deux disques durs différents. En plus de multiplier par deux les débits et les IOPS, cette technologie se marie donc parfaitement avec une grappe RAID, à condition de prendre quelques précautions bien évidemment.
« Si vous mettez un RAID 0 + 5, vous pouvez faire du RAID 0 en mettant les deux moitiés d'un disque Mach.2 ensembles pour doubler la bande passante. Les disques vont alors débiter 500 Mo/s ». Ensuite, on ajoute une couche de RAID 5 sur les disques Mach.2 en RAID 0. On pourrait ainsi imaginer un RAID 0 + 5 avec seulement trois HDD.
Pour le moment, une seule capacité est prévue et uniquement en SAS : 14 To avec huit plateaux, soit 2x 7 To avec quatre plateaux pour chaque unité logique. Il n’est pas prévu pour l’instant de diviser encore plus le disque dur avec trois ou quatre bras équipés de tête de lecture/écriture.
Un disque Mach.2 en S-ATA sera possible, mais plus compliqué puisque la notion de LUN n’y existe pas. Plutôt qu'installer deux connecteurs S-ATA, une solution serait de partitionner le disque dur en 2x 7 To, la première moitié correspondrait au LUN 0, la seconde au LUN 1, mais cela demanderait une gestion spécifique.
Cap sur les HDD de 20 To
Concernant les disques durs de 18 To, ils arriveraient « bientôt » selon Seagate. Il s'agira alors principalement d’une évolution des modèle de 16 To, avec la technologie CMR utilisable dans n'importe quel système.
Le constructeur vise toujours 2020 pour un disque dur SMR de 20 To, mais « ça ne sera pas pour le mainstream », notamment parce qu'il faudra cette fois disposer d'un contrôleur compatible. Des échéances confirmées par le fabricant lors de la publication de son bilan du troisième trimestre. Notez que Western Digital est sur le même calendrier.
Ces annonces sont l’occasion de revenir sur la technologie SMR avec notre interlocuteur.
Le SMR : l'avenir pour les professionnels
« il y avait plusieurs écoles, qui aujourd'hui sont résumées à une seule école : le host managed », par opposition au drive managed. Dans le premier cas, le contrôleur s’occupe de gérer l’écriture (qui nécessite une attention particulière, lire nos explications), alors que dans le second le disque dur s'occupe de tout.
Pourquoi le host managed a pris le dessus sur le drive managed ? « C'est comme ça, c'est le marché. Tout ce qui est entreprise est partie sur le host managed », lâche simplement notre interlocuteur. Il nous explique qu’il y a tout de même de grosses différences physiques entre ces deux méthodes.
En drive managed, « le disque doit gérer des zones CMR pour faire du stockage temporaire et réécrire ensuite sur la zone SMR pour avoir des performances stables [...] Tout ce qui est séquences d'écritures aléatoires sur des petits blocs ce n’est pas gérable, il faut que ce soit l'hôte qui se débrouille à concaténer les données et les envoyer », ajoute Seagate.
Dans le cas du host managed par contre, le fabricant n’a rien de spécial à faire : « on dit au système "on est SMR" et le système de fichiers doit se débrouiller à le gérer ».
« On a certains produits dans les gammes SkyHawk et BarraCuda qui sont sur des bases SMR, avec du drive managed », nous explique le fabricant. Ce dernier nous parle aussi d'une ancienne « gamme de produits qui s'appelait "archive", car il fallait obligatoirement écrire par très gros blocs pour avoir des performances correctes ».
Dans tous les cas, c'est « complètement transparent » pour l'utilisateur et l'hôte qui n'ont pas à se soucier d'être en présence d'un disque dur SMR (puisqu'il est drive managed). De plus, il y a « tout un tas d'artifice pour compenser le fait qu'un disque dur est SMR, on peut donc se retrouver à en acheter sans le savoir », nous affirme Seagate.
La société se veut néanmoins rassurante : les disques SMR sont testés et validés, ils ne posent pas de problème dans les cas d’usages pour lesquels ils sont définis. Le cas parfait serait d'écrire en une seule fois le disque dans sa totalité, puis revenir butiner des morceaux de données plus tard. Mais il faut éviter d'utiliser un disque SMR dans un NAS ou comme périphérique de stockage principal d'un ordinateur.
Seagate nous parle de l’avenir de son stockage : HAMR, SMR, Mach.2 (Dual Actuator), etc.
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Commentaires (15)
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Abonnez-vousLe 08/11/2019 à 18h45
“même si le grand public fini aussi par en profiter avec l’augmentation du rapport capacité/prix. “
Malheureusement ce n’est plus le cas depuis au moins 5 ans …
Le 09/11/2019 à 03h15
Et rien au sujet des moins 20% à moins 30% de prix sur les disques externes, par rapport aux disque internes de même capacité les moins chers ?
(oui ! j’arrive toujours pas à avaler la couleuvre de devoir acheter 4 disques externes pour mon future RAID, alors que j’ai besoin de 4 disques internes. Ouais! j’économiserai l’équivalent d’1 disque si je prends 4 externes que je “shuck”. Avec tout le gaspillage que ça implique, même si les alim et les câbles peuvent sans doute se revendre)
Le 09/11/2019 à 07h09
Le Mach-2 peut être intéressant mais je m’interroge sur le fait que le système voit 2 disques. Si on met un disque de ce type dans un NAS qui est souvent prévu pour un nombre fixe de disques, celui-ci va-t-il accepter cette augmentation virtuelle du nombre d’unités?
Le 09/11/2019 à 15h45
Amusant la phrase “WD est sur le même calendrier”.
Je venais de regarder une vidéo YouTube qui parlait des petits arrangements entre Nvidia et AMD pendant des années, et qui se traduisaient par : mêmes calendriers, mêmes prix (tirés vers le haut). Pour en finir avec une guerre des prix qui arrangeait les consommateurs, mais pas les actionnaires, et qui avait eu cours auparavant.
Parce que c’est quand même amusant, cette stagnation des prix (et des capacités) de disques durs depuis quoi .. 2012 ? J’ai acheté un NAS en 2012, les disques 3To coûtaient à l’époque un peu plus de 100 euros. Auparavant, chaque année, les capacités des HDD s’envolaient et les prix baissaient. Mais sept ans plus tard, le prix payé pour un 3To ne permet que d’acheter un 4To. Du surplace ou presque.
Alors à l’époque on expliquait ça par les inondations en Thaïlande, puis les rachats par WD et Seagate de leurs concurrents. On en arrive en tout cas à un duopole (comme pour les GPU) et une très suspecte politique parallèle des 2 grands.
Le 09/11/2019 à 15h55
Les NAS sont surtout prévus pour un nombre de disques physiques (un nombre de baies). ça ne devrait pas vraiment poser de problème logiciellement d’avoir plus de disques logiques à rassembler dans un RAID. D’ailleurs c’est tout bénéfice dans un 2 baies, un RAID-5 te permettrait de conserver 75% de la place des 2 disques (3 disques logiques sur 4) au lieu de 50% (1 disque physique sur 2).
edit : à la réflexion, au niveau résilience aux pannes, ça n’est probablement pas une très bonne idée !
Le 09/11/2019 à 17h49
20 To ou 20 Tio ? On perd de plus en plus de stockage avec cette terminologie du 20e siècle…
Le 09/11/2019 à 19h24
Ça pour le coup, je me suis fait une raison.
Les fabricant de DD utilisent les préfixes du Système International (multiple de 1000, la terminologie est tout à fait juste, même au 21éme siecle), et Microsoft continue d’utiliser ces mêmes préfixes du SI, mais pour exprimer des multiple de 1024.
Ici, c’est MS qui fait du caca, à mon avis, mais on a l’habitude… (je croyais qu’ils avaient évolué avec Win 10, mais les captures d’écran que je vois me disent que “ben! non”. C’est peut-être activable par une GPO ? )
Bon! les fabriquant de DD seraient un poil honnêtes, ils pourraient afficher les deux notations, genre 10To (9,09Tio).
Mais, j’ai peur que ce soit trop leur demander ? En tout cas pas sans une loi, avec sanction financière.
Le 09/11/2019 à 21h56
C’est pire que ça chez Microsoft : ils ont de Ko à 1024 octets, mais des Mo à 1000 Ko (donc 1024000 octets).
Le 10/11/2019 à 01h30
Mince, j’aurai pas cru. Là ça va loin dans le n’importe quoi. (ou alors tu me charrie ? ;) )
Par contre, ça doit leur permettre de diminuer la différence entre les vrai Mo et “leurs” Mo. Comme ça, ça se voit moins qu’il font n’importe quoi.
Mais du coup, les Go ? C’est 1000 Mo ? Ou 1024 Mo ?
(1024000000 octets ou 1048576000 octets ?), et les To ?
Le 10/11/2019 à 11h35
Attention, c’est pas forcément toujours possible de démonter un disque externe pour le monter en interne. Certains disques externes d’aujourd’hui ont directement le contrôleur et le port USB intégrés à la carte logique du disque, et il n’y a donc plus de connectique SATA (c’est surtout le cas sur les 2.5”, mais peut-être aussi sur certains 3.5”).
Non. Je viens de vérifier, pour un fichier de 355 550 122 octets, Windows 10 m’indique 339 Mo. Il y a donc bien 1 Mo = 1024 Ko et 1 Ko = 1024 octets.
Le Ko à 1024 octets et le Mo à 1000 Ko, c’était utilisé par les fabricants de disquettes quand ils sont passés de 720 Ko à 1.44 Mo. Ça a aussi été utilisé un moment par les fabricants de disques durs. L’origine historique étant que les secteurs font 512 octets, donc ils divisaient le nombre de secteurs par 2 pour avoir la taille en Ko, et ensuite par pas de 1000 pour passer aux Mo et aux Go.
Le 10/11/2019 à 15h48
Oui, tout a fait. Très important de se renseigner avant (perso, je n’ai toujours pas sauté le pas. Mais je risque de le faire dans les prochains mois). Et même quand il y a un port sata classique, il peut y avoir besoin d’un câble d’alim particulier, ou besoin de masquer un pin (histoire du pin 3.3v chez WD).
Sans parler de la garantie. Une vidéo de shucking sur Youtube, un gars disait (aux US) qu’il y avait quand même une garantie sur le disque seul (je n’arrive plus à la retrouver). Il disait avoir contacté WD. Mais ça je ne compte pas trop dessus. :(
Du coup, je suppose que c’est l’ajout du pin 3.3v chez WD qui permet d’abaisser le prix de 30%.
Merci, donc il me charriais (mais pas forcément volontairement, du coup)
Le 13/11/2019 à 07h25
Oui, parce qu’en binaire, diviser par 2 c’est un simple décalage de bit, en une seule opération, alors que les autres divisions sont largement plus complexes.
Le 14/11/2019 à 02h58
Heu… oui. Mais non, pas là (enfin! je crois)
Si j’ai bien compris la division par 2 dont StarMatt parle, n’est pas pour accommoder les ordinateurs, mais les humains.
Tu as 10 secteurs, hop! Tu sais que tu as 5ko (10⁄2).
Ça m’avais surpris y a pas mal d’années, les commandes “df” sous Unix qui renvoyaient une valeur chiante a exploiter de “block” de 512 octets. D’où l’intérêt du “df -k” (quand l’option existait).
(Sur Ubuntu actuellement ça renvois par défaut des blocks de 1kio, même sans le “-k”, rudement plus pratique).
Et comme diviser par 1024 est chiant pour un être humain, quand on évaluait une taille en “mega” on divisait par 1000, en se disant “ça fait un peu moins”.
Par exemple: 52 244 blocs /2/1000 ==> 26 Mo (de tête)
En vrai 25,4 Mio
Pourquoi les blocs/secteurs faisaient 512 octets et pas 1ko, ça je ne sais pas (plus ?), mais il doit y avoir une raison bien précise (et très ancienne) à ça.
Pour les DD c’est toujours le cas. Ils travaillent maintenant sur 4096 octets en interne, mais présentent toujours des “secteurs” de 512 octets (le 512e).
Mais, j’ignorai que les constructeurs avaient aussi utilisés cette façon de calculer, les petits polissons ;)
Le 14/11/2019 à 14h26
En lisant le paragraphe sur le Mach-2 je me demande ce qui empêche d’avoir plusieurs têtes/bras de lecture par plateau (au lieu de répartir 2 bras sur 2 jeux de disques différents) ?
Forcément ça prendrait de la place, consommerait un peu plus et obligerait à un gros boulot pour le controleur interne du disque pour gérer les lecture/écriture, mais ça aurait un sacré potentiel de gaisn sur les perf (débits et temps d’accès surtout)
Le 15/11/2019 à 13h39
1Ko = 1000o, pas 1024 (et 1K ne fera jamais 1024, quelque soit le domaine, que l’on compte les carottes, les briques, les étoiles ou les octets). Ca, c’est le rôle du Kio.
C’est Windows qui marque Ko/Mo/Go, alors qu’il devrait marquer Kio/Mio/Gio.