La transmission des données très personnelles mieux encadrée en justice ?
Christiane -> Lionel
Le 31 juillet 2014 à 14h20
3 min
Droit
Droit
Le député Lionel Tardy a obtenu de la ministre de la Justice, Christiane Taubira sa réponse quant au périmètre de plusieurs dispositions du code de procédure civile qui permettent de récupérer des données parfois très sensibles sur la vie privée des internautes.
Des mesures d’urgence prévues par le Code de procédure civile peuvent être mise en œuvre, parfois sans principe du contradictoire, afin de tenter de récupérer des données pouvant « relever de la vie privée d'abonnés (liste des correspondants téléphoniques ou courrier électronique, contenu de l'espace de stockage...), couvertes par le secret des correspondances (contenu des correspondances échangées) ou sur un périmètre excédant les prescriptions légales (communication de données portant sur une période au-delà d'un an, données de navigation des utilisateurs) » regrette le député Lionel Tardy.
Cette capacité à demander tout et n’importe quoi vient de la rédaction des 145, 809 et 812 du Code en question. Le premier par exemple, est rédigé en des termes très flous : « s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »
Transmission de données très personnelles
Ainsi, constate encore le député de Haute-Savoie, « des demandes formulées dans des termes trop génériques peuvent aboutir à la transmission de données concernant des tiers aux litiges, entraînant une atteinte disproportionnée aux libertés publiques ». Lionel Tardy avait ainsi questionné la ministre de la Justice en janvier dernier sur le nécessaire encadrement de ce mécanisme ouvert à tous les vents. Christian Taubira vient de lui répondre en confirmant deux points fondamentaux.
D’une part, dans la mise en œuvre de l’article 145 du code de procédure civile, le juge doit dans tous les cas tenir compte du « respect de la vie privée de l'utilisateur des services de communications électroniques ou de tiers ». D’autre part, le tiers destinataire peut s’opposer à ces mesures en avançant un « empêchement légitime » face à la gourmandise des mesures d'instruction ordonnées par un juge, sur des données qui n’ont pas à être demandées par ces voies, ou hors cadre. Dans la pratique, une ordonnance fondée sur le 145 CPC n'est rien d'autre qu'un document rédigé par l'avocat de la partie à l'origine de la demande. Après examen, le juge se contente alors d'apposer sa signature pour lui donner une force exécutoire.
« Au vu de l'ensemble de ces dispositions, qui assurent un équilibre satisfaisant entre les intérêts en présence, tempère la ministre, il n'apparaît pas nécessaire d'apporter en l'état de modification au droit existant étant par ailleurs rappelé que le principe constitutionnel de l'indépendance de la justice interdit la délivrance d'instructions à l'autorité judiciaire, qui apprécie, dans chaque affaire, la proportionnalité des mesures ordonnées compte tenu des droits en présence ». Cependant, cette réponse parlementaire donne de bonnes pistes pour les FAI face à des demandes un peu trop ambitieuses sur le fondement de ces articles.
La transmission des données très personnelles mieux encadrée en justice ?
-
Transmission de données très personnelles
Commentaires (8)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 31/07/2014 à 15h04
Les articles 145, 809 et 812 du Code de procédure civile n’ont rien de nouveau ni de spécifique au net. En outre, ils n’impliquent pas d’agir sans respect du contradictoire, chose parfaitement différente.
Ils visent à recueillir des informations (preuves) pour le premier, à faire cesser un trouble manifestement illicite ou un dommage imminent pour les suivants.
Classiquement le premier permet d’obtenir une expertise (référé in futurum). Par exemple, on fait faire des travaux, il y a malfaçon, du coup on va saisir le Juge des référés sur la base de 145 du CPC et l’adversaire sera convoqué (assigné) à l’audience, et le Juge arbitrera de l’intérêt d’une expertise pour établir que le constructeur a mal bossé, le tout en présence du fameux constructeur. Tout est fait dans le respect du contradictoire.
Pour les autres, un voisin a monté un échafaudage chez lui qui menace de s’effondrer chez nous. On va voir le même Juge et avec le même respect du contradictoire et ayant convoqué le voisin, lequel Juge ordonne le démontage de l’échafaudage et si le voisin est absent par exemple, autorise que l’on entre chez lui pour faire procéder à ce même démontage.
Le “problème” soulevé ici est le fait d’agir sur requête au Président du Tribunal (et ce n’est pas spécifique à 145, 808, 809…) et non par assignation, ceci permettant de pas respecter le principe du contradictoire. Dans ce cas, il faut motiver pourquoi on ne veut pas respecter le contradictoire: c’est loin d’être accordé automatiquement et il faut vraiment motiver sa demande. Classiquement, on indiquera que l’on ne veut pas avertir l’adversaire car sinon il va tout faire disparaitre.
C’est par exemple le cas pour un type qui fait de la contrefaçon, si on l’assigne sur 145 du CPC, il est évident qu’il va en profiter pour tout faire disparaitre. Donc on le fait sur requête afin d’autoriser un huissier à pénétrer sur un lieu donné (ça peut être chez l’adversaire ou par exemple l’hébergeur d’un site WEB), le Président jugeant ou non qu’il est légitime de ne pas alerter l’adversaire.
Enfin, les constatations non contradictoires réalisées devront par la suite être dénoncées à l’adversaire, lequel doit pouvoir en débattre et éventuellement les contester.
Bref, difficile ici de comparer ça aux pouvoirs du Parquet ou du Juge d’instruction ou encore des actions quasiment non encadrées des administrations. " />
Le 31/07/2014 à 15h16
J’ajoute qu’en pratique, les FAI ou les intermédiaires techniques dans la très large majorité refusent de communiquer une information à l’avocat sauf décision de justice (à minima ordonnance du requête accordée par le Président du Tribunal de grande instance). Et c’est bien légitime. " />
Le 31/07/2014 à 16h02
le juge doit dans tous les cas tenir compte du « respect de la vie privée de l’utilisateur des services de communications électroniques ou de tiers ».
je dois avoir un train de retard parce que je pensais que “la vie privée” était un concept légalement inexistant pour la sphère “électronique-internet” en dehors de :
en tout cas dans le code pénal, la vie privée se limite à la punition de la captation vidéo ou audio.
typiquement des propos sur un serveur de chat ou sur un forum, je ne suis pas certain que ça tombe légalement dans le domaine de la vie privée ou du secret des correspondance.
Le 01/08/2014 à 11h38
Le 01/08/2014 à 14h19
Le 01/08/2014 à 15h22
Enfin, j’ajoute que comme je l’ai précisément indiqué, la question posée du non respect du contradictoire n’a rien de spécifique à 145, 808, 809… (et comme le mentionne expressément Marc dans son article), mais relève des dispositions de l’article 493 du Code de procédure civile qui encadre dans quels cas on peut agir sur requête à défaut de disposer d’une ordonnance spéciale ou nommée.
Par conséquent et avec toute l’exactitude nécessaire, le non respect du contradictoire est indépendant de l’article 145 (conservation de preuve), mais peut s’appliquer à toutes mesures comme à une obligation de faire à l’image de l’article 812 qui est la traduction de 808 dans le cadre d’une action sur requête au président.
Il est en effet impératif de réserver au Barreau Parisien l’action sur requête au Président …" />
Le 02/08/2014 à 11h07
Le 02/08/2014 à 11h58
Aucun suhsi " />