La Cour des comptes a rendu public aujourd’hui un avis portant sur « la politique publique de lutte contre la contrefaçon », du moins dans ses versants liés à la propriété industrielle (marques, dessins, modèles et brevets).
Dans ce document, signalé par le journaliste Samuel Le Goff, la Cour donne une excellente notation à la France. Après avoir analysé les différentes législations déjà adoptées ainsi que les jurisprudences qui ont suivi, la Cour arrive à la conclusion que « la France est, depuis plusieurs années, à la pointe au niveau européen et mondial de la lutte contre la contrefaçon et la cybercontrefaçon ».
Sont applaudis par exemple le rôle pilote au sein de l'Union européenne des pouvoirs publics « pour que soit élaboré un cadre législatif et réglementaire européen, propre à conduire à une harmonisation des législations nationales et pour que soient mises en place des actions répressives coordonnées et homogènes, à l'image et sur le modèle de celles déployées en France ». Un coup de chapeau est spécialement accordé à la loi du 11 mars 2014 sur la contrefaçon.
Bruxelles ne veut pas modifier la directive sur les intermédiaires techniques
Plus intéressant, au détour de ces pages, la Cour des comptes rappelle que la Commission européenne s'oppose toujours à une modification de la responsabilité des intermédiaires techniques :
« Par ailleurs, la réflexion a été engagée au niveau de l'Union européenne sur une révision éventuelle de la directive sur le commerce électronique de juin 2000, et notamment sur l'irresponsabilité civile et pénale dont bénéficient les prestataires intermédiaires de l'internet. La Commission hésite, à ce stade, à ouvrir le débat ; elle préférerait ne pas modifier cette directive et s'en tenir à des lignes directrices pour ne pas entraver le développement du commerce électronique et des services en ligne. »
Si l'on suit ces propos, la Commission européenne fait donc état d’une grande prudence dans la manipulation de cette législation qui touche les intermédiaires. La même Cour des comptes apporte cependant de l'eau au moulin affirmant que « la position française, favorable à une modification de la directive nécessaire pour garantir la confiance des consommateurs, semble devoir être maintenue. »
Consultation IPRED : la position française favorable à une telle modification
Ce passage fait surtout référence à une consultation de la Commission européenne sur la directive IPRED (sur le respect des droits de propriété intellectuelle). Dans sa réponse de 2013, Paris signalait ainsi les travaux de Mireille Imbert-Quaretta : les pistes d’évolution envisagées visent à responsabiliser davantage les sites de contenus et de référencement mais également à impliquer l’ensemble des intermédiaires, notamment financiers et publicitaires, de l’écosystème du streaming et du téléchargement direct ». Sachant que les principales pistes reposent avant tout sur l’autorégulation sous l’égide de l’autorité publique, « plutôt que la recherche de nouveaux dispositifs contraignants ».
De même, la réponse des autorités françaises signalait les travaux du rapport Lescure visant à impliquer « les intermédiaires techniques et financiers qui constituent « l’écosystème Internet » (hébergeurs, moteurs de recherche, services de paiement, acteurs de la publicité en ligne, voire fournisseurs d’accès à Internet et opérateurs de nommage). Cette implication pourrait prendre la forme d’une autorégulation fondée sur des engagements pris volontairement par les différentes catégories d’intermédiaires et consacrés dans des chartes de bonnes pratiques ». Une analyse conforme au rapport Imbert-Quaretta, comme ne se l’était pas caché Lescure.
Toujours en 2013, Paris écrivait que « les Autorités françaises examinent actuellement ces propositions afin de déterminer les suites qui pourraient leur être données ». Le petit bout de phrase du rapport de la Cour des comptes laisse entendre que la France tient visiblement à mettre en musique ces préconisations, à la plus grande satisfaction des ayants droit.
Aurélie Filippetti : des injonctions contre les intermédiaires, même non responsables
Aurélie Filippetti ne disait pas autre chose, début 2014, dans le cadre d'une autre consultation sur la réforme du droit d'auteur en Europe : « il apparaît donc nécessaire aux autorités françaises de préciser que des injonctions peuvent être prises à l’encontre des intermédiaires dont les services sont utilisés par le contrefacteur dans le cadre de son activité contrefaisante et ce, indépendamment du fait que la responsabilité de l'intermédiaire ait été ou soit mise en cause ».
La Commission tiendra t-elle le cap ? Dans son oreille, Olivier Schrameck, désormais à la tête du European Regulators Group for Audiovisual Media Services (ERGA) pourra toujours tenter d'apporter la bonne parole, alors qu'il occupe en France la place de président du CSA.
Commentaires (8)
#1
Pas compris. " /> En quoi la cour des comptes peut s’occupe de ce sujet? Je croyhais qu’elle était là pour vérifier les comptes des administrations publiques et c’est tout…
#2
#3
#4
#5
#6
Bah si la cour des comptes veut son hochet, qu’elle demande la sortie de la France de l’UE via l’article 50. Parce que depuis les derniers traités européens la France est sous occupation US (comme tout pays européen) et tout est piloté depuis Bruxelle.
Bref elle est pas prêt d’avoir son désiderata d’accompli.
#7
“une modification de la directive nécessaire pour garantir la confiance des consommateurs”
Pour les objets physiques, je veux bien, mais pour les droits d’auteur, soit c’est un gros troll, soit ils arrivent à confondre ayant-droits et consommateurs…
#8
Une question peut-être un peu HS mais que je me pose :
Un hébergeur est attaqué judiciairement car un de ses serveur stocke des données contrefaites ou illégales.