Des salaires perpétuellement plus bas que ceux des hommes, des carrières à l’évolution anormalement lente, un nombre de femmes continuellement restreint aux postes les plus hauts de l’entreprise… La cour d’appel de Grenoble a condamné le fabricant franco-italien de puces électroniques STMicroelectronics pour « discrimination prohibée liée au sexe », rapporte Mediapart.
Une victoire pour les plaignantes, après treize ans de bataille menée d’abord en interne puis, faute de résultat, devant la justice. Parmi elles, tous types de postes : des cadres comme des ouvrières, administratives, techniciennes et agents de maîtrise.
STMicroelectronics déclare ne « tolérer aucune discrimination, qu’elle soit, d’âge, de sexe ou de handicap » et souligne atteindre « la note de 93/100 en 2022 » dans l’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes publié par le ministère du Travail.
Les enquêtes de l’inspection du travail présentent une image différente, et ce depuis plusieurs années, racontait déjà Mediapart en juin. En 2021, la dernière d’entre elles soulignait le « caractère systémique du retard des femmes dans l’évolution de carrière comme dans les rémunérations moyennes et maximales ».
Un exemple ? Celui de cette cadre, qui, à coefficient et date d’embauche égaux, perçoit un salaire inférieur de 16 % à ses collègues masculins. Ou de cette chargée des contrôles qualité, qui témoigne avoir brusquement été mal notée après la naissance de son premier enfant, notation négative qui est devenue systématique.
Cette affaire s’inscrit dans un contexte plus large : des études comme celle d’Accenture et Girls Who Code montrent que les femmes sont beaucoup plus nombreuses que les hommes à quitter l’industrie technologique en milieu de carrière. Parmi les causes, suspectent certaines expertes du sujet : l’accueil qui leur est réservé lorsqu’elles rentrent de congé maternité.
Par ailleurs, selon le GenderScan 2022, les femmes de l’industrie doivent composer avec un sexisme accru (46 % de celles qui travaillent dans la tech en ont déjà vécu) comparé au reste des secteurs économiques (38 % rapportent en avoir subi dans les autres secteurs).
STMicroelectronics est condamnée à verser plus de 800 000 euros de dommages-intérêts au groupe de plaignante. Les rappels de salaires n’ayant pas encore été calculés pour huit d’entre elles, le montant total devrait « dépasser le million d’euros », déclare leur avocat Xavier Sauvignet.
« C’est la première fois qu’un groupe de femmes fait condamner une entreprise – qui plus est du CAC 40 – pour une discrimination générale et pour des montants aussi importants » indique-t-il encore à Mediapart.
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