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« Fake news » : Facebook va rémunérer des éditeurs français et fait sa publicité dans la presse

Une guerre bien réelle

« Fake news » : Facebook va rémunérer des éditeurs français et fait sa publicité dans la presse

Le 26 avril 2017 à 09h59

Facebook veut faire connaître sa lutte contre les fausses nouvelles, et s'en donne les moyens. Selon nos informations, des médias vont bien être rémunérés pour leur lutte contre les « fake news », alors que le réseau social a acheté de grands encarts publicitaires dans leurs pages.

Depuis quelques mois, Facebook ouvre grand les bras aux médias dont il se rapproche au profit de projets autour des fausses nouvelles (fake news). Après un tombereau de critiques en novembre, suite à l'élection de Donald Trump, le réseau social affirme sa lutte contre les contenus trompeurs, estimés à même de détourner l'issue d'une élection.

Le plat de résistance se nomme Journalism Project, lancé en janvier, qui regroupe la quasi-totalité des programmes de la société en faveur des médias, du financement à la formation. Elle collabore aussi avec certains (dont huit en France) pour identifier et signaler les publications qui posent problème. Une démarche qui se veut de salubrité publique en cette période d'élection, servant utilement la communication du réseau social.

Le rythme des initiatives s'accélère d'ailleurs. Il y a quelques semaines, un tutoriel pour repérer les fausses actualités apparaissait en tête des fils d'actualité. Plus récemment, une certification en ligne était lancée, pour signer la maîtrise des outils Facebook par les journalistes. La société a aussi affirmé s'attaquer directement aux comptes qui diffusent en masse des contenus tendancieux, dont 30 000 en France. Sans l'annoncer, l'entreprise semble désormais aller bien plus loin.

Facebook lutte plus blanc que blanc

L'autre pan de l'offensive médiatique de Facebook est bien plus classique. À travers les espaces publicitaires des sites web et dans les pages de nombreux médias (dont 20 Minutes, L'Express, Le Monde, Les Échos et Libération), Facebook a mis en avant son tutoriel pour repérer les fausses nouvelles.

Une opération de communication massive qui doit montrer aux Français à quel point le réseau social est responsable. Sur le web, ces publicités renvoient directement vers la page d'aide dédiée chez Facebook qui met en avant six de ses partenaires, dont trois issus du groupe Altice.

Publicités Facebook Presse Fake NewsPublicités Facebook Presse Fake News

 

Un échange de bons procédés dans le partenariat autour de ce fact-checking ? Interrogé, un responsable des Échos nous répond que « Facebook est un partenaire comme d'autres, à l'image de Google. Il y a des échanges de bons procédés avec tous les partenaires, dont de valeur ». L'entreprise se refuse cependant à nous en dire plus.

Côté Libération, Johan Hufnagel déclare ne pas être au courant de cette opération. « Cela n'a rien à voir avec le partenariat, c'est un achat d'espace normal » ajoute la direction commerciale du journal. 

Une collaboration qui amène financement

Si l'aide des médias dans la lutte contre les fake news était abordée comme une expérimentation par les partenaires français, ils évoquaient tout de même l'idée d'être rémunérés si le partenariat venait à perdurer. Une idée à laquelle Facebook avait répondu très favorablement, selon le Wall Street Journal.

Selon nos informations, cette rémunération est déjà décidée pour certains éditeurs français. Contactés, plusieurs des huit médias qui contribuent au système de Facebook en France n'ont pas pu ou n'ont pas souhaité nous le confirmer publiquement. « Je crois qu'il y a des discussions, mais je ne m'en occupe pas » nous répond de son côté Johan Hufnagel. Même chose pour Xavier Grangier, en charge du numérique pour le journal.

Chez Facebook aussi, le sujet semble compliqué à aborder. Dans un premier temps le service presse du réseau social nous a assuré qu'« aucun média n’est rémunéré pour sa collaboration sur la vérification des articles signalés par les internautes ». Devant notre insistance, une réponse nous a été promise « le plus vite possible ». Depuis, nous n'avons pas eu de nouvelles malgré de nombreuses relances.

Un manque de transparence qui dénote sur une question telle que la lutte contre les fausses informations. D'autant plus que celle-ci joue un rôle démocratique majeur. Qu'une société privée décide de s'y impliquer financièrement est une chose, la façon dont elle le fait, surtout quand des médias deviennent ses prestataires, en est une autre.

Partenaires Facebook Fake News

« On écope la mer avec un dé à coudre »

« Au début, c'était totalement gratuit. Ils sont ensuite revenus vers nous en disant qu'ils allaient rémunérer notre travail » nous affirme pour sa part Éric Mettout, directeur adjoint de la rédaction de L'Express. Le paiement en lui-même serait toujours « en cours de discussion », même si l'idée et le montant serait actés depuis une réunion il y a environ deux semaines, pour « des sommes pas très élevées », mais qui ne nous seront pas communiquées.

Dans l'absolu, Éric Mettout se félicite que Facebook ait écouté les éditeurs. Sur le fond pourtant, la situation ne lui semble pas idéale. Si les médias sont satisfaits de pouvoir travailler avec le réseau social, ces prestations ne seraient pas une solution à long terme. La charge devrait revenir à Facebook lui-même, pour régler la question sur le fond, estime notre interlocuteur. « On écope la mer avec un dé à coudre » affirme-t-il.

Du côté de BFM TV, également partenaire, l'outil est en essai depuis deux mois, sans que le média n'y dédie une équipe. Pour le moment, cinq personnes (chargées des réseaux sociaux et de la rédaction en chef) ont accès à la console dédiée. Un point doit être effectué en sortie d'élection pour discuter de la suite, même si Julien Mielcarek, directeur adjoint de la rédaction de BFMTV.com, n'a pas de doute sur le fait que le dispositif sera pérénnisé. Cette fois, nous n'en saurons pas plus sur les conditions financières de ce partenariat.

Comme Google, Facebook aide au financement des médias

Jusqu'à maintenant, Google était un partenaire privilégié pour de nombreux acteurs de la presse française. Leur proposant divers outils, le géant du Net disposait surtout d'un fonds permettant de financer certains projets (FINP), devenu européen depuis (DNI). L'ensemble a financé en partie des initiatives comme Challenges Soir, Slate Reader, le surligneur de l'Opinon, la constitution de nombreuses offres Premium ou plus récemment, Décodex du Monde.

En se rapprochant à son tour des médias français, et en leur proposant des partenariats actifs, c'est sans doute aussi ce lien avec Google que Facebook cherche à affaiblir, sur fond de lutte contre les fausses nouvelles où les deux groupes multiplient les initiatives. Le réseau social est déjà une source importante de visites pour certains journaux, comme Google News, mais a aussi besoin des contenus pour continuer d'attirer des utilisateurs au quotidien.

Les GAFA et la presse : je t'aime, moi non plus

Une interdépendance qui n'est pas nouvelle et qui n'avait pas empêché les éditeurs de tenter de mettre en place une taxe Google au début du mandat de François Hollande, ce qui avait mené à la création du FINP.

Encore maintenant, certains cherchent à instaurer un droit voisin qui permettrait aux éditeurs de générer des revenus pour le référencement de leurs contenus. Un débat qui se joue désormais à l'échelle européenne, mais sur lequel une partie des candidats à la présidentielle française avait déjà livré son avis. 

Commentaires (5)

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Non content de se faire financer par de la pub, par leur propriétaire, par les abonnements et par l’argent public, Libération a encore besoin de sous de la part de Facebook pour faire comme M. Macron, et aller au même restaurant ^_^



http://next.liberation.fr/food/2017/04/24/nous-aussi-on-a-dejeune-a-la-rotonde_1…

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Les journaux ont de gros soucis de rentabilité (et ça ne date pas d’hier), du fait de la baisse depuis les années 2000 du lectorat payant, Libération comme les autres. Ça coûte cher de faire un journal de qualité, qui passe aussi du temps à faire des articles de fond et quelques investigations. Si je ne dis pas de bêtise, il n’y a guère que le Canard, qui a un mode de fonctionnement particulier, qui n’a pas l’air d’avoir de soucis.



(sinon, faut arrêter de parler du dîner du dimanche soir, c’est totalement anecdotique en plus d’être parfaitement normal vu les circonstances)

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Mediapart va très bien ;)



Et puis bon article de fond…. au contraire… la majorité sont des articles putaclic, du buzz, de la désinformation, de l’attaque instrumentalisé économique ou politique.

Bref de la merde et c’est bien normal ;)

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Ah, enfin du journalisme d’investigation ! Cela manque ces temps-ci ! <img data-src=" />

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Wellit a écrit :



Mediapart va très bien ;)



Et puis bon article de fond…. au contraire… la majorité sont des articles putaclic, du buzz, de la désinformation, de l’attaque instrumentalisé économique ou politique.

Bref de la merde et c’est bien normal ;)





Mediapart a l’air de se débrouiller en effet.



Pour la suite de ton propos, il faudrait étayer ça parce qu’en fait c’est largement inexact.


« Fake news » : Facebook va rémunérer des éditeurs français et fait sa publicité dans la presse

  • Facebook lutte plus blanc que blanc

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