Rovio perd des plumes en bourse, les marchés doutent de sa stratégie
Angry Banks
Le 24 novembre 2017 à 15h35
5 min
Économie
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Pour la première fois depuis son introduction en bourse, Rovio, l'éditeur d'Angry Birds, a présenté publiquement ses résultats trimestriels. L'exercice fut compliqué pour l'entreprise qui a dévoilé de légères pertes, alors que les marchés s'attendaient à de plus copieux bénéfices.
Pour son baptême du feu, Rovio a fait très fort, mais malheureusement pas dans le bon sens. Lorsqu'une entreprise présente pour la première fois ses résultats trimestriels après une introduction en bourse, les marchés attendent au moins une chose : des chiffres montrant qu'elle poursuit la bonne stratégie.
Un trimestre décevant
Sur le troisième trimestre de 2017, Rovio annonce un chiffre d'affaires de 70,7 millions d'euros, en hausse de 41 % sur un an. Malgré cela, le reste des constantes vitales de l'entreprise est en chute libre. L'EBITDA atteint 6,1 millions d'euros contre 8,5 millions un an plus tôt, tandis que le bénéfice opérationnel ne s'élève qu'à 1,6 million d'euros, soit 70 % de moins que l'an dernier. Pire encore, les 3,9 millions d'euros de bénéfice net enregistrés l'an dernier laissent place à 800 000 euros de pertes.
Sur les neuf premiers mois de l'année, le bilan est par contre un peu plus coloré. Les revenus ont bondi de 74 % en un pour atteindre 223,2 millions d'euros, avec un EBITDA de 46 millions d'euros contre seulement 19,5 millions d'euros lors du bilan précédent. Le résultat net est lui aussi en hausse de 67 %, à 12, 6 millions d'euros.
Dans le détail, on notera que la majeure partie des revenus issus de la branche jeux vidéo du groupe provient de seulement cinq titres : Angry Birds 2, Angry Birds Evolution, Angry Birds Blast, Angry Birds Friends, et Battle Bay
Chercher de l'audience, ça coûte cher
Si les bénéfices ont autant fondu, c'est parce que Rovio a choisi d'accélérer ses investissements dans « l'acquisition d'utilisateurs ». Autrement dit, dans la publicité pour ses jeux. En diffusant régulièrement et sur diverses plateformes, l'éditeur qui s'est converti au free-to-play tente donc d'amener un public toujours plus dense sur ses titres, en espérant que certains des nouveaux arrivants craquent pour quelques micro-transactions.
Sur les trois derniers mois, Rovio a ainsi dépensé 22,2 millions de dollars, soit 35 % des revenus de sa branche jeux vidéo. L'an dernier à la même période, il n'était question que de 5,4 millions d'euros, ou 12 % des recettes du secteur. Est-ce que ces investissements publicitaires portent leurs fruits ? Pour faire court : non.
Dans le détail on note assez aisément que la hausse brutale des dépenses ne s'accompagne pas d'une progression favorable de l'audience des jeux de l'éditeur. Au total, Rovio comptait ainsi 10,7 millions d'utilisateurs quotidiens uniques en moyenne (DAU) au dernier trimestre, contre 12,6 millions un an plus tôt. Sur le nombre d'utilisateurs mensuels uniques, le constat est le même. On passe de 102,8 millions l'an dernier à 79,5 millions aujourd'hui.
La tendance est d'ailleurs la même aussi bien pour les cinq jeux générant le plus de revenus pour l'éditeur, que pour le reste de son catalogue. On notera tout de même une légère éclaircie pour les titres formant le fond du classement, puis qu'ils ont regroupé 6,1 millions d'utilisateurs quotidiens entre juillet et septembre, contre 5,7 millions lors des trois mois précédents.
La monétisation s'améliore
Il y a toutefois un point sur lequel Rovio s'améliore, et lui permet de tirer ses revenus vers le haut : sa capacité à convaincre les joueurs de dépenser de l'argent pour ses titres free-to-play. Il y a un an, on comptait tout juste 435 000 joueurs payants sur l'ensemble de son catalogue, on en dénombre aujourd'hui 584 000. La part de ces joueurs provenant des titres du top 5 est quant à elle constante, autour de 82 %.
En plus de faire grimper le compteur des joueurs payants, Rovio est parvenu à leur faire dépenser davantage d'argent. Le revenu moyen par utilisateur payant unique (ou MARPPU, un acronyme un peu barbare) est ainsi passé de 26,7 euros l'an dernier sur les jeux du top 5, à 32,4 euros.
Fait remarquable, il apparait que la popularité du jeu n'influe que marginalement sur le panier moyen des joueurs. Sur les titres en dehors du top 5 de Rovio, le MARPPU s'élève ainsi à 33,4 euros, soit 1 euro de plus que pour les titres générant le plus de recettes.
Dans l'ensemble, les revenus rapportés au nombre d'utilisateurs quotidiens (ARPDAU) sont eux aussi en nette progression, avec cette fois-ci une différence plus marquée entre les titres les plus populaires et les autres. Dans le top 5, l'ARPDAU est ainsi passé de 6 à 12 centimes en l'espace d'un an, et de 3 à 7 centimes sur le reste du catalogue.
Raclée en bourse
De tous ces chiffres, les marchés ont principalement retenu que la stratégie d'acquisition d'utilisateurs de Rovio fonctionnait mal. Certes, elle lui permet de maintenir ses audiences, mais ce n'est pas suffisant au vu des sommes engagées, qui ont quadruplé en l'espace d'un an. « Si ça vous coûte plus cher de capter un nouvel utilisateur que ce qu'il souhaite dépenser chez vous, c'est un très mauvais modèle d'affaires » résume un peu vite un analyste à nos confrères du Financial Times.
En bourse, la réaction des investisseurs a été franche et brutale. Le cours de l'action Rovio a dévissé de 21,5 % lors de la séance d'hier à Helsinki et ne rebondit que d'un point aujourd'hui. De quoi faire fondre la valorisation de l'éditeur à environ 725 millions d'euros, soit 19 % de moins que lors de son introduction en bourse... le 2 octobre dernier.
Rovio perd des plumes en bourse, les marchés doutent de sa stratégie
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Un trimestre décevant
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Chercher de l'audience, ça coûte cher
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La monétisation s'améliore
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Raclée en bourse
Commentaires (6)
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Abonnez-vousLe 24/11/2017 à 16h02
« Si ça vous coûte plus cher de capter un nouvel utilisateur que ce qu’il souhaite dépenser chez vous, c’est un très mauvais modèle d’affaires » résume un peu vite un analyste à nos confrères du Financial Times.
C’est pourtant un bon résumé de l’état d’esprit des gens qui doivent investir (ou désinvestir) " />
Le 24/11/2017 à 17h31
Et si on passait les applis de Rovio dans Exodus Privacy ? " />
Le 25/11/2017 à 11h12
Sauf si le client (le payeur) n’est pas l’utilisateur…
Le 25/11/2017 à 11h23
En même temps, que croyaient-ils ?
Un jeu, même avec des mises à jour et de nouveaux contenus, finit par lasser. D’autant plus s’il est bardé de publicités. Angry Birds et ses clones sont légèrement en perte de vitesse, et je pense que quelque chose de similaire va arriver pour Candy Crush ou je ne sais quel est le dernier jeu à la mode.
Le 27/11/2017 à 09h47
Pokemon Go ? " />
Le 27/11/2017 à 12h41
Par exemple, oui " />