La plateforme de « e-pétitions » du Sénat, prévue pour janvier, se dévoile
La pétition vient en mangeant
Le 17 décembre 2019 à 16h25
6 min
Droit
Droit
Le Sénat devrait ouvrir d’ici quelques semaines une plateforme de pétitions en ligne, qui permettra notamment de demander l’inscription d’une proposition de loi à l’ordre du jour. Le dispositif s'annonce toutefois très verrouillé.
Gérard Larcher, le président de la Haute assemblée, avait promis qu’elle ouvrirait « à l’automne ». Il faudra finalement attendre le mois prochain pour que la plateforme de pétitions du Sénat voit le jour.
Le Luxembourg a en effet annoncé la semaine dernière que ce portail (lancé pour l’instant « à titre expérimental ») serait opérationnel « en janvier 2020 ».
Désormais, les citoyens pourront transmettre des pétitions aux sénateurs via un site dédié, afin que ces derniers s’en saisissent. « Toute pétition ayant recueilli 100 000 signatures sera transmise à la conférence des présidents » a ainsi décidé le Bureau du Sénat, jeudi 12 décembre. Mais transmission ne sera pas forcément toujours synonyme d’examen en séance... Loin de là.
Un seuil de signataires finalement doublé
En septembre dernier, lors de sa traditionnelle conférence de presse de rentrée, Gérard Larcher avait expliqué que cette plateforme permettrait « à chaque citoyen de proposer l'inscription d'un texte législatif à l'ordre du jour du Sénat ou de créer une mission de contrôle sénatoriale ».
Avant de préciser : « Les pétitions recueillant un nombre de signatures autour de 50 000 seront examinées par la conférence des présidents, qui décidera de la suite à donner, si les conditions de recevabilité sont remplies. Et cela sera public ! »
Le Bureau du Sénat en a cependant décidé autrement, puisque le seuil de soutiens a été fixé à 100 000. Soit le double de ce qui avait été évoqué par Gérard Larcher. Pourquoi un tel revirement ? « C'est un choix du Bureau », nous a laconiquement répondu le Palais du Luxembourg.
Il se pourrait que les sénateurs aient voulu se caler sur les « e-pétitions » qui seront bientôt mises en œuvre à l’Assemblée : l’idée est qu’à compter de 100 000 signatures, un débat soit organisé en commission. Et qu’au-delà de 500 000 soutiens, les discussions aient lieu en hémicycle.
Une procédure en deux étapes
Sollicité pour de plus amples informations, le Sénat explique que la procédure se déroulera en deux temps.
Première étape : le dépôt de la pétition. Avant d’être publiée sur la plateforme du Sénat, toute pétition sera soumise à un « contrôle de recevabilité ».
Seront notamment interdites :
- Les pétitions diffamatoires, injurieuses, obscènes, discriminatoires, agressives, négationnistes, révisionnistes, pornographiques, incitant à la violence ou à la haine, etc.
- Les pétitions « susceptibles de s’apparenter à une forme de propagande ou de prosélytisme ».
- Les pétitions portant atteinte aux droits de la propriété intellectuelle de tiers (marques, droits d’auteur…).
- Les pétitions portant atteinte au respect dû à la vie privée ou au droit à l’image d’un tiers.
- Les pétitions portant atteinte à la présomption d’innocence ou au secret de l’instruction.
- Les pétitions « comportant un contenu à caractère publicitaire ou promotionnel, des sollicitations commerciales ou petites annonces de toute nature ».
- Les « pétitions redondantes d'un même auteur ».
Le titre de la pétition ne devra pas dépasser les 150 caractères, et le texte de la pétition elle-même les 10 000 caractères, espaces compris. Les « pièces jointes textuelle en format pdf » seront acceptées (dans une limite de 20 Mo), mais pas les vidéos.
« Ce contrôle porte essentiellement sur la forme », commente-t-on au Sénat. L’institution s’engage d’ailleurs « à apporter une réponse quant à la recevabilité d'une pétition et, le cas échéant, à la publier sous quinze jours ».
Deuxième étape : le recueil des soutiens. Sous couvert d’avoir été validée par les services du Sénat, chaque pétition devra réunir 100 000 soutiens dans un délai de six mois.
« Toutes les personnes majeures » pourront signer une e-pétition, qu’elles soient (ou non) inscrites sur les listes électorales, indique-t-on au Palais du Luxembourg. Pour s'authentifier, les utilisateurs devront utiliser FranceConnect.
Même validées, des pétitions aux suites potentiellement très variables
Même une fois atteint ce cap de 100 000 signatures, rien ne garantira qu’un débat ne soit organisé en hémicycle.
On distingue néanmoins deux cas de figure. Soit la pétition est d’ordre législatif (faire évoluer une loi, introduire une réforme, etc.), auquel cas la commission compétente (culture, lois, finances...) sera saisie. À charge ensuite pour ses membres d’y donner les suites qu’ils jugeront opportunes : présentation d’un rapport, suivie d’un débat en séance publique, renvoi à un ministre ou au Défenseur des droits, classement sans suite, etc.
Selon la Haute assemblée, « tout sénateur » pourra malgré tout reprendre une pétition « sous forme d’une proposition de loi ». « La conférence des présidents statuera sur son inscription à l’ordre du jour », poursuit l’institution. Or on le sait : face à l’embouteillage de textes, il est bien souvent très difficile pour les parlementaires de voir leurs textes examinés en hémicycle, faute de « niches » disponibles...
Des missions de contrôle dont la création dépendra de la conférence des présidents
Deuxième possibilité : si la pétition tend à instaurer une mission de contrôle (sur un sujet précis, tel la fraude fiscale), la commission compétente devra effectuer un second « contrôle de recevabilité ». Ceci afin de vérifier notamment que la pétition « ne porte pas sur un sujet traité par le Sénat au cours des douze mois précédents ».
La conférence des présidents conservera ensuite « toute latitude pour décider ou pas de la création d’une mission de contrôle, en précisant, le cas échéant, son objet ». Cette décision ne sera « pas susceptible de recours », nous précise la Haute assemblée.
Bref. Bien que le Sénat ait opté pour un seuil de soutiens relativement bas (en comparaison par exemple des 4,7 millions de signatures exigées dans le cadre du référendum d’initiative partagée), ce droit de pétition « revivifié », dixit Gérard Larcher, devrait rester suffisamment verrouillé pour éviter les débordements.
Même si ces e-pétitions pourraient déboucher sur des mesures législatives intéressantes, les parlementaires garderont de fait la main sur la majeure partie du dispositif.
La plateforme de « e-pétitions » du Sénat, prévue pour janvier, se dévoile
-
Un seuil de signataires finalement doublé
-
Une procédure en deux étapes
-
Même validées, des pétitions aux suites potentiellement très variables
-
Des missions de contrôle dont la création dépendra de la conférence des présidents
Commentaires (9)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 17/12/2019 à 16h40
Chouette, le cannabis va donc bientôt devenir légal !
Le 17/12/2019 à 17h04
Pourquoi ne pas appliquer ces même critères de recevabilités à l’ensemble des lois soumises ?
Le 17/12/2019 à 18h09
Pourquoi pas, perso verrait bien :
* Attribution de pouvoir de sanction de la cour des comptes.
* Cnil et CADA plus de moyen et de pouvoir de sanctions.
* Mise à mort Hadopi.
Etc… " />
Le 17/12/2019 à 18h39
Le 18/12/2019 à 07h00
Le 18/12/2019 à 08h10
on parle bien du même ‘Sénat’ :
(G. Larcher) . « Le régime des Sénateurs sera adapté*…….”
https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/le-regime-de-retraite-des-senat…
* et non-pas appliqué….tel-quel " />
Le 18/12/2019 à 09h24
Ce que je retient, c’est pour être bien verrouillé, c’est bien verrouillé " />
Le 18/12/2019 à 11h41
Après ta proposition , cela devrait les détendre." />
Le 23/12/2019 à 14h06
interdites, Les pétitions « susceptibles de s’apparenter à une forme de propagande ou de prosélytisme »
wikipedia “Le dictionnaire historique de la langue française d’Alain Rey signale que le mot a été introduit en français comme antiquité hébraïque, et que dès le XVe siècle, le mot « prosélyte » se dit d’une personne récemment gagnée à une cause. Par extension, ce mot s’applique en dehors du champ de la religion et de la spiritualité pour parler du zèle déployé pour convertir quelqu’un à ses idées.”
et
“Cependant, Syndicats et partis politiques continuent jusqu’à la fin des années 1970 à faire figurer dans leurs organigrammes des sections « propagande », jusqu’à ce que l’expression communication politique remplace ce terme”