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Démarches administratives en ligne : des abus en masse, attention aux arnaques !

Un « ami » qui vous veut du bien…

Démarches administratives en ligne : des abus en masse, attention aux arnaques !

Vous vendez ou achetez une voiture d’occasion, vous devez changer une pièce d’identité, demander un raccordement à un réseau ? Les démarches se font en ligne et sont généralement gratuites en dehors des timbres fiscaux. Mais, attention, de nombreux sites proposent une « aide payante » et dépassent parfois allègrement les limites autorisées. La DGCCRF tire le signal d’alarme. On vous donne quelques exemples.

Le 05 mars à 10h28

La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), dresse un triste constat (mais qui ne devrait pas surprendre grand monde). « Avec le développement des procédures administratives numériques, de nombreux sites commerciaux proposent de l’aide aux démarches administratives, entretenant parfois la confusion avec des sites officiels et s’affranchissant des obligations du Code de la consommation ».

Une « aide payante », sans service supplémentaire

Ce ne sont pas les services qui manquent : cartes grises, actes de naissance ou de décès, extraits de casier judiciaire, demandes de documents officiels (passeport, carte vitale…), vignettes Crit’Air, raccordement aux réseaux (électrique, eau, gaz)… Les pièges pour les consommateurs sont nombreux.

Pléthore de sites fleurissent sur Internet en faisant payer des démarches normalement gratuites, « sans apporter véritablement de service supplémentaire par rapport aux sites officiels ». La répression des fraudes rappelle que cette activité « souvent très lucrative (elle nécessite un faible investissement et peu de salariés) n’a rien d’illégal, à condition toutefois de ne pas abuser le consommateur ». Il ne faut donc pas entretenir une confusion avec le site officiel où l’on peut effectuer la démarche gratuitement, respecter les droits des consommateurs et « afficher les prix de manière claire ».

Des contrôles ont été menés en 2021 et 2022, avec des résultats inquiétants… mais malheureusement pas surprenants. Sur les 73 sites « proposant une aide payante aux démarches administratives » ciblés par la DGCCRF, « près de 6 établissements sur 10 posaient problème en 2021 contre plus de 50 % en 2022 ». Au total, 40 sites étaient ainsi non conformes.

En 2020 déjà, elle tirait la sonnette d’alarme : « L’enquête a révélé que sur les 41 établissements contrôlés, 25 ne respectaient pas la réglementation et une grande majorité tentait de tromper le consommateur ». Un exemple flagrant : « Un site affichait par ailleurs la gratuité de l’obtention d’une vignette Crit’Air mais sans préciser que leur service coûtait près de 60 euros ».

Différents stratagèmes pour induire en erreur, et faire payer toujours plus

La répression des fraudes s’appuie sur les signalements SignalConso et ceux adressés aux préfectures pour choisir ses cibles. Voici un état des lieux :

« Le design, les couleurs ou la présentation de beaucoup de sites entretenaient la confusion avec les sites officiels : utilisation du bleu, du blanc et du rouge ou de la Marianne officielle de l’État, référence ambiguë aux mairies ou aux préfectures pour des sites de demande de passeports, d’immatriculation ou de certificat de cession de véhicules, confusion avec le site web d’Enedis pour un site d’aide aux démarches de travaux de raccordement électrique…

Ce type de procédés induisait en erreur l’utilisateur, d’autant que l’identité de l’exploitant du site internet ne figurait pas toujours clairement et que le caractère payant de la prestation n’apparaissait qu’en toute fin de parcours, au moment du paiement ».

Pire encore, certains consommateurs se sont vus souscrire à un abonnement (avec engagement, tant qu’à faire) à la place d’une prestation unique. En plus de payer pour un service gratuit, ils se retrouvent à payer plusieurs fois. Dans ce genre de cas, les sites entretenaient sciemment « la confusion sur la nature et le prix de la prestation ».

La DGCCRF pointe aussi du doigt l’absence des informations obligatoires pour les consommateurs, « comme leur possibilité d’exercer leur droit de rétractation même s’ils ont accepté un commencement d’exécution immédiate du service, voire leur refusaient explicitement ce droit dans les conditions générales de vente ». La possibilité de saisir le médiateur de la consommation en cas de litige, ainsi que ses coordonnées, étaient aussi souvent absentes.

73 contrôles, 40 non conformes et cinq amendes

Pour résumer : 73 contrôles, 40 sites non conformes, mais avec quelles sanctions ? Les cas les moins graves (non précisés) ont eu des avertissements, ils sont onze au total. La DGCCRF a également adressé 23 injonctions de mise en conformité, six procès-verbaux pénaux et sept procès-verbaux administratifs. Finalement, cinq amendes ont été distribuées pour un montant allant de 14 400 à 130 000 euros, « pour sanctionner les manquements les plus graves pour le consommateur ».

La DGCCRF prévient : elle va renouveler ses contrôles en 2024 pour les sites faisant l’objet de signalements des consommateurs. Elle en profite pour donner quelques conseils : « les consommateurs ont la possibilité de vérifier l’existence de sites officiels de démarches administratives (recensés sur service-public.fr) et qui, en dehors des timbres fiscaux demandés pour certaines démarches ou documents, sont gratuites pour effectuer les démarches ».

Une promesse déjà faite par le passé, en 2022 par exemple : « Eu égard au surcout que le recours à ces sites peut engendrer pour les consommateurs, au taux d’anomalie élevé constaté ainsi qu’au flux continu de création et de fermeture rapide de sites internet monétisant les démarches administratives, la DGCCRF poursuivra ses contrôles dans ce secteur ». En plus de poursuivre les contrôles, peut-être faudrait-il intensifier les sanctions et augmenter le montant des amendes pour être davantage dissuasif, car la situation ne semble pas saine en ce début d’année 2024.

Les « liens sponsorisés » Google comme porte d’entrée

Pour le service des immatriculations (carte grise), une seule adresse officielle : l’Agence nationale des titres sécurisés ou ANTS. Problème, lorsque l’on recherche « carte grise » sur le moteur de recherche Google (le plus utilisé en France), on tombe en premier sur des liens sponsorisés. Il s’agit de sites payants pour apparaitre dans les premières positions, avant le site officiel.

Le site officiel est en troisième, quatrième, voire cinquième position suivant les cas. Comme le rappelait il y a quelques mois Gaël Mancec, juriste NTIC chez Germain Maureau, « Google, avant d’être un moteur de recherche, c’est un annonceur. Et il discrimine de moins en moins les résultats naturels des résultats payants ». Résultat des courses, le consommateur peut plus facilement se retrouver sur des sites « alternatifs » proposant une « aide » payante.

Les premiers liens publicitaires renvoient vers des services clamant fièrement être habilités par l'État ou le ministère de l’Intérieur. On retrouve sinon des formules similaires ou même la Marianne officielle, les couleurs bleu, blanc et rouge et même une image FranceConnect non cliquable.

Sur le site du Service Public, il est expliqué que « l'habilitation est une autorisation d'accès au système d'immatriculation des véhicules (SIV) ». En conséquence, « ce site permet de réaliser les démarches d'immatriculation et d'obtention de la carte grise pour le compte d'un particulier ». Quant à l’agrément du Service Public, également mis en avant par certains, il permet de « percevoir les taxes et la redevance liées à l'immatriculation pour le compte du Trésor public ». Il faut être habilité pour être agréé, mais il est possible d’être simplement habilité.

Un seul affiche en petit, tout en haut, une précision utile pour le consommateur : « Carte grise en ligne depuis 2009 - indépendant de l'Administration, agréés et habilités par le Ministère de l'Intérieur et le Trésor Public. Possibilité d'effectuer vos démarches sans frais supplémentaires, renseignez-vous sur service-public.fr ».

Service Public à la rescousse, pensez ANTS pour les « titres »

Comme proposé par la DGCCRF, le mieux est de vous rendre sur le site du Service Public (site officiel de l’administration française). Il vous proposera un lien vers le bon service (officiel). Pour les immatriculations, permis de conduire, carte d’identité et passeport, c’est sur le site de l’ANTS que ça se passe. Un site en « .gouv.fr », que seule l’administration française peut utiliser.

L’Afnic, pour rappel, « surveille les enregistrements [et] s'intéresse à certains termes problématiques ». C’est notamment le cas de ceux en rapport avec l’ANTS (Agence nationale des titres sécurisés), les amendes, l’URSSAF et la carte vitale.

Les noms de domaines en « -gouv.fr » ne sont plus autorisés depuis longtemps pour éviter la confusion avec les sites officiels. Reste qu’ils sont largement mis en avant par Google, contre rémunération.

[caption id="attachment_130060" align="aligncenter" width="800"] Site officiel de l’ANTS pour les immatriculations[/caption]

Commentaires (10)

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En fait, si l'on utilise un bloqueur de pubs, ces liens sponsorisés n’apparaissent pas et on a moins de chance de tomber sur une arnaque. D'ici à ce que la volonté de Google, avec le Manifest V3, de bloquer les bloquers de pubs, favorise les arnaques ...

(comment fait-on une quotation en markdown ici ? J'ai tenté le truc officiel et ça ne marche pas)
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"40 sites non conformes et 5 amendes"

J'y vois une incitation à continuer.
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+1.
Ça, et si l'intégralité des sites des services de l'État pouvait enfin être en .gouv.fr, il suffirait d'enseigner aux gens que si c'est pas gouv.fr, c'est pas le vrai. Ca limiterait grandement la confusion.
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La migration est en cours, mais ça prendra probablement du temps :
systeme-de-design.gouv.fr République Française

Et ce n'est pas la panacée car on pourra toujours avoir du .gouv.fr.abc & co.

Ça serait surtout bien que Google fasse le ménage dans ses annonces et que Chrome ne soit plus le navigateur le plus utilisé (cf la problématique sur les bloqueurs de pubs)
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C'est pas du tout le travail de Google de juger de la légalité de l'activité d'un site Web. Eventuellement ils pourraient déréférencer suite à des signalements (vu qu'ils tiennent bien une liste de sites de phishing pour Chrome, mais sans obligation légale et puis est-ce du phishing ce genre de site ?), mais il faudrait voir qui devrait signaler, et en dehors du droit d'auteur, je sais pas si c'est courant.
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Pour moi, quand il y a :
- absence de .gouv.fr dans l'URL du site
et
- habilitation service public
- agrément service public

ou équivalents, cela signifie que ce n'est pas un site officiel. On peut donc les éviter.
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Le screenshot est marrant quand même, le seul site officiel c'est un nom vraiment chelou (ANTS ?) avec un sous-sous domaine XD

cartegrise.gouv.fr serait plus clair :p
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Ca me rappelle ce service qui envoie des lettres de résiliation à ta place. 1,49€ pour la démarche, c'est pratique, tu t'occupes de rien, tu rédiges pas de lettre, tu ne vas pas à la poste... Mais en fait ça t'inscris automatiquement à un abonnement de 30€ / mois avec préavis de 3 mois.
Et au final, ils envoient même pas la lettre.
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A noter que l'ANTS a changé de nom pour devenir France Titre

legifrance.gouv.fr République Française
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Avec mublock, pas de problème : plus de réponses sponsorisées, donc pas d'arnaque.

Démarches administratives en ligne : des abus en masse, attention aux arnaques !

  • Une « aide payante », sans service supplémentaire

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  • 73 contrôles, 40 non conformes et cinq amendes

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