Droit à l’erreur : les amendements « à suivre » sur l’e-administration
Attention à la démarche
Le 23 janvier 2018 à 10h08
8 min
Droit
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L’Assemblée nationale entame aujourd’hui l’examen, en séance publique, du projet de loi « Darmanin » sur le droit à l’erreur. Les députés ont déposé pour l’occasion plusieurs centaines d’amendements, dont certains concernent de près le numérique.
Fin des appels surtaxés vers les administrations (Allocations familiales, services des impôts, etc.), relance du programme « Dites-le-nous une fois », utilisation de la blockchain dans le cadre la dématérialisation des actes d’état civil... La commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi « pour un État au service d’une société de confiance » a démontré la semaine dernière que le texte porté par le ministre de l’Action et des comptes publics, Gérald Darmanin, avait vocation à permettre de nombreuses réformes en matière de modernisation de l’action publique.
À l’approche des discussions dans l’hémicycle, qui dureront toute la semaine, Next INpact a sélectionné différents amendements « à suivre ». Ils concernent aussi bien la mise en place d’une carte d’identité électronique que l’introduction d’une dispense de télédéclaration de revenus pour les personnes résidant en « zone blanche », en passant par l’instauration d’une liste de suivi des démarches administratives que le gouvernement doit dématérialiser.
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E-administration : toujours proposer une option humaine. Alors que le projet de loi sur le droit à l’erreur entend graver dans le marbre l’objectif de 100 % de démarches administratives dématérialisées à l’horizon 2022, les députés de La France Insoumise souhaitent que « les usagers puissent obtenir un rendez-vous physique avec un agent du service public en cas de besoin » (741). « L’égalité devant le service public est un principe constitutionnel qui implique que chaque citoyen ait un droit d’accès égal au service public » font valoir ces élus.
Tableau de suivi de la dématérialisation des démarches administratives. La députée Laure de La Raudière, rejointe par une dizaine de parlementaires UDI-Agir, propose que l’exécutif mette en ligne, « de façon lisible et transparente », une « liste de l’ensemble des démarches administratives », assortie de « leur niveau de dématérialisation » (412). L’objectif : permettre aux citoyens de savoir quelles procédures sont (ou doivent devenir) réalisables via Internet, conformément aux objectifs gouvernementaux.
Suivi de dossier obligatoire pour les démarches en ligne. La majorité a de son côté déposé un amendement visant à ce que chaque usager puisse « consulter l’état de sa situation administrative et de l’avancement du traitement de ses démarches et demandes », sur Internet (1046). « Un État au service d’une société de confiance implique que la puissance publique fasse preuve de transparence envers les usagers des services publics », estime-t-on dans les rangs de La République en Marche.
Des explications sur le « bug » de la dématérialisation des cartes grises. Les parlementaires continuent de pilonner le gouvernement suite aux difficultés rencontrées ces derniers mois par les usagers qui sont désormais contraints d’utiliser un téléservice pour leurs demandes de cartes grises et de permis de conduire. Une bonne partie du groupe LR réclame ainsi un rapport « sur les dysfonctionnements constatés suite à la dématérialisation de l’obtention des cartes grises, sur les moyens mis en œuvre pour remédier à ces défaillances et sur l’accompagnement des usagers par l’administration » (63).
Gratuité des renseignements administratifs du 39 39 et du 34 00. Alors que les députés ont souhaité, la semaine dernière en commission, que tous « les services de l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics qui en dépendent » mettent à la disposition du public un numéro d’appel « non surtaxé », les députés Nouvelle Gauche voudraient préciser que cette tarification au prix d’un appel local prévaut également pour « tous les services de renseignements administratifs par téléphone » (568). Ces élus évoquent surtout le cas du 39 39, qui fournit des informations plutôt généralistes (logement, consommation, droit du travail...), ainsi du 34 00, qui apporte des réponses aux questions relatives aux titres sécurisés – de type carte d’identité ou permis de conduire. Selon eux, cette réforme « serait la moindre des choses quand dans le même temps, le ministère de l’Économie et des finances parle d’une économie de plus de 60 millions d’euros liée à la dématérialisation des feuilles d’impôts, des passeports, des permis de conduire... »
La fin des appels surtaxés (à destination des services publics) repoussée à 2021 ? Le gouvernement souhaite de son côté repousser de deux ans et demi la réforme votée la semaine dernière en commission (1079). « Son application immédiate susciterait des difficultés juridiques et économiques dans la mesure où elle viendrait se heurter à l’exécution de contrats en cours, se justifie l’exécutif. Il est donc nécessaire de donner du temps aux services de l’État et à ses établissements publics pour mettre en œuvre cette exigence. » Le gouvernement demande par ailleurs à ce que les collectivités territoriales soient exclues du dispositif (1087).
Généralisation de l’inscription en ligne sur les listes électorales. Le député Patrick Hetzel, suivi par une trentaine de députés LR, souhaite que le gouvernement présente un rapport sur « la mise en place systématique de la dématérialisation des inscriptions sur les listes électorales » (149). Une réforme qui fait figure de serpent de mer, mais qui devrait pourtant être traitée dans le cadre de la dématérialisation de toutes les démarches administratives.
Dispense de télédéclaration de revenus dans les « zones blanches ». Alors qu’à partir de l’année prochaine, tous les contribuables auront en principe l’obligation de déclarer leurs revenus sur Internet, le député Pierre Cordier revient à la charge et réclame l’instauration d’une « dispense » pour les personnes résidant dans des « zones blanches » (19). Cette exception prévaudrait jusqu’en 2030 et concernerait aussi l’obligation de télépaiement. Jusqu’ici, le gouvernement a toutefois toujours rappelé qu’une dérogation était prévue pour les contribuables ayant préalablement indiqué à l’administration fiscale « ne pas être en mesure de souscrire cette déclaration par voie électronique ».
Des parlementaires qui lorgnent sur les nouvelles technologies
Carte d’identité électronique, le retour ? Une quarantaine de députés Modem réclame un rapport « sur les modalités de la mise en place d’une carte d’identité numérique qui permettrait au citoyen ou à une entreprise d’être identifié par l’ensemble des services de l’État et de concentrer un maximum de données administratives le ou la concernant » (662). Ce serait pourtant oublier que le gouvernement vient tout juste de confier des travaux sur ce dossier à Valérie Peneau, de l’Inspection générale de l’administration (voir notre article).
Levée de restrictions sur la biométrie. De la même manière qu’en commission, Patrick Hetzel (LR) propose que les entreprises (ou même l’État) puissent accéder et utiliser les empreintes digitales de Français, telles que collectées lors de la confection de la carte d’identité ou du passeport électronique, « à des fins autres que l’authentification de l’état civil ». Chaque individu concerné devrait préalablement fournir son « consentement explicite » (148). Le rapporteur avait pourtant prévenu l’intéressé que cet amendement, qui reprend une proposition de loi de 2014, aurait plutôt dû être discuté dans le cadre du projet de loi sur le RGPD – qui arrive en commission aujourd’hui.
Entrouvrir les portes de l’état civil à la blockchain. Sans surprise, Laure de La Raudière a redéposé son amendement visant à ce que l’État puisse expressément recourir à la technologie blockhain (ou « chaînes de blocs ») dans le cadre de la dématérialisation – expérimentale – des actes d’état civil des Français de l’étranger (385 et 755). L’élue, qui est attendue au tournant par le rapporteur et le gouvernement, est désormais rejointe par une quinzaine de parlementaires (voir notre article).
Lever les obstacles au programme « Dites-le-nous une fois ». Après avoir réussi à faire adopter en commission un premier amendement visant à faciliter l’échange d’informations entre administrations, Laure de La Raudière revient à la charge avec trois nouveaux amendements. Elle propose tout d’abord de limiter les cas dans lesquels un acteur public peut demander à déroger à ce principe (754). La députée souhaite ensuite obliger le gouvernement à prendre deux décrets d’application (attendus depuis plusieurs années) directement au travers de ceux prévus par la future loi Darmanin (170 et 384).
Les débdats ne devraient pas débuter avant 16 h, cet après-midi. Ils se poursuivront au fil des prochains jours – potentiellement jusqu'en début de semaine prochaine.
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Commentaires (1)
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Abonnez-vousLe 23/01/2018 à 22h49
L’idéale serait de l’inclure dans les cours pour les générations à venir.