Fusée Vega : l’Europe valide (enfin) SSMS, son service de lancement partagé pour petits satellites
Ariane 6 aura droit à MLS
Le 07 septembre 2020 à 09h46
6 min
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Le dernier succès de Vega permet de valider le système SSMS, un « couteau-suisse » pour envoyer des dizaines de petits satellites dans l’espace. Il comprend plusieurs pièces venant s’assembler comme des Lego, pour une grande modularité. Ariane 6 est aussi pensée dès le début pour le « rideshare » avec MLS.
Enfin diront certains ! Le lancement de la mission VV16 s’est déroulé sans encombre il y a quelques jours. Elle était initialement prévue pour mars, mais avait été décalée au mois de juin à cause de la pandémie liée à la maladie Covid-19. Elle a ensuite « été reportée à plusieurs reprises suite à des conditions météorologiques défavorables au lancement », explique le centre spatial guyanais.
Ce lancement revêtait une double importance pour Arianespace : c’était le premier décollage de Vega depuis le cuisant échec de la mission VV15 en juillet 2019, conduisant à la perte de la charge utile. Deux mois plus tard, la cause probable était identifiée : « une défaillance thermo-structurale dans le dôme avant du moteur Zefiro 23 » et le retour en vol prévu pour 2020.
Malgré les 14 succès consécutifs précédents, Arianespace n’avait donc pas droit à l’erreur pour sa 16e mission,car deux échecs de suite auraient été une catastrophe pour l’image de la fusée.
Mais VV16 était aussi importante pour une autre raison : cette mission devait valider le système modulaire SSMS pour envoyer de petits satellites en orbite, un marché d’avenir que l’Europe ne souhaite pas laisser passer. La mission est d’ailleurs aussi appelée SSMS PoC Flight. S’agissant d’un vol de qualification, il était financé en partie (montant non précisé) par l’Union européenne dans le cadre de son programme Horizon 2020.
Arianespace veut « adresser de nouveaux besoins du marché »
Finalement, la fusée s’est envolée sans encombre du Port spatial à Kourou le 3 septembre à 3h51 du matin. Une fois la mission terminée, l’heure était aux congratulations : « Ce vol marque l’efficacité et la rapidité avec laquelle l’industrie, sous la direction de l’ESA en tant qu’Autorité de qualification du système de lancement Vega, a implémenté les mesures et actions correctives recommandées par la Commission d’enquête indépendante ».
Les 53 satellites ont également été déployés comme prévu, notamment grâce au SSMS (Small Spacecraft Mission Service). Pour Daniel Neuenschwander, directeur du transport spatial à l’Agence spatiale européenne (ESA), celui-ci « ouvre la porte à un accès à l’espace de routine et bon marché pour les petits satellites, une nouvelle approche qui montre que [l’ESA] adresse de nouveaux besoins du marché ».
SSMS s’inscrit dans le cadre de « l’initiative LLL (Light satellites, Low cost, Launch opportunities) » de l’Agence. Elle avait été décidée par le Conseil de l’Agence spatiale européenne en 2016, avec un objectif plus ambitieux que le seul lanceur Vega : « préparer la voie à des services de routine pour les petits satellites à bord des lanceurs européens Vega/Vega-C et Ariane 6 ». Les deux prochaines générations de fusées européennes sont donc également concernées.
SSMS pour Vega, MLS pour Ariane 6
L’ESA explique que « le dispenseur SSMS est une structure modulaire et légère en fibre de carbone conçue pour envoyer dans l’espace de multiples charges utiles de petite taille et être configurée peu avant le lancement pour embarquer un nombre variable de satellites de différentes tailles ».
En mai 2018, l’AFP expliquait – en se basant sur des déclarations du PDG d'Arianespace, Stéphane Israël – que « SSMS devait permettre de mettre en place jusqu'à neuf satellites de 100 - 150 kg et, au bas de la structure, des conteneurs pouvant emporter jusqu'à 72 nano-satellites, soit 81 satellites au total ».
Un des avantages pour les « petits » passagers est aussi de s’affranchir des « contraintes liées au fait d’être une charge utile secondaire aux côtés d’un satellite beaucoup plus grand ». Comme c’est le cas depuis des années, la question de la pollution spatiale est anticipée : « Le dispenseur sera désorbité une fois les satellites déployés pour éviter de créer des débris spatiaux supplémentaires ».
Dans le cadre de la mission VV16, Vega emportait « sept microsatellites d’un poids de 15 à 150 kg ainsi que 46 CubeSats (nanosatellites) [de 21 clients, ndlr] pour insertion sur deux orbites héliosynchrones, à respectivement 515 et 530 km d’altitude ». Le dernier satellite a été largué environ 104 minutes après le décollage.
De manière plus générale, le système SSMS est pensé pour le lancement de petits satellites dont la masse varie entre 1 kg (CubeSat) et 500 kg (microsatellite).
Sur Ariane 6, cette fonctionnalité prendra le nom de MLS (Microsat LaunchShare), « pensé par rapport à un passager principal classique, un satellite d'un poids important, qui serait complété par des passagers auxiliaires, quelques petits satellites et des micro, des nano-satellites en conteneur […] L'idée serait d'avoir jusqu'à six positions occupées soit par des petits satellites jusqu'à 250 kg, soit par des conteneurs permettant de déployer plusieurs cubesats ».
SSMS : une conception dans le « style Lego »
Pour proposer une telle modularité, l’Agence spatiale européenne dispose d’un « arsenal » de plusieurs pièces pour refaire l’agencement intérieur avant chaque lancement. De la bouche même de l’ESA, c’est dans le style des Lego avec des modules d’assemblage baptisés Hex , Rod, Plat, Tower, Column et Webs.
Plusieurs d’entre eux peuvent être utilisés simultanément afin de séparer, isoler, surélever, orienter… les petits satellites. Une image valant dans le cas présent au moins mille mots, voici quelques exemples d’organisation interne via SSMS :
Arianespace n’est pas la seule société sur le créneau des lancements partagés, alias « rideshare ». Il y a maintenant plus de trois ans, l’Inde battait un record (a priori toujours valable aujourd’hui) avec 104 satellites d’un seul coup (dont un de 714 kg).
SpaceX n’est évidemment pas en reste, notamment avec ses lancements de Starlink par paquets de 60, mais il laisse parfois quelques places à des tiers. La société d’Elon Musk a également déjà lancé 64 satellites (49 Cubesats et 19 microsatellites) de 34 clients différents fin 2018 ; à bord d’une fusée dont c’était le troisième vol.
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Commentaires (1)
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Abonnez-vousLe 09/09/2020 à 20h26
Les modules d’assemblage en fin d’article ressemblent à des pièces de Kerbal Spase Program.