À la recherche des trous blancs dans l’Univers
C’est trou blanc, n’est-ce pas ?
Les trous noirs, tout le monde ou presque connait et arrive à se faire une idée de ce que c’est. Aujourd’hui, on va parler des trous blancs qui, selon la théorie de la gravitation quantique à boucles, seraient l’évolution des trous noirs. Reste maintenant à les observer, pas une mince affaire.
Le 09 février à 09h25
9 min
Sciences et espace
Sciences
La première question qui vous vient certainement à l’esprit est : qu'est-ce qu'un trou blanc ? Comme leur nom l’indique, c’est l’exact opposé d’un trou noir : « les trous blancs expulseraient matière et lumière sans jamais en absorber », explique le Journal du CNRS. S’il est impossible de s’échapper d’un trou noir, il serait donc impossible de rentrer dans un trou blanc, troublant n’est-ce pas ?
De « simples curiosités mathématiques » ?
Il s’agit d’une hypothèse, plus ou moins crédible selon les scientifiques, et pour beaucoup « ces astres exotiques ne seraient que de simples curiosités mathématiques ». Néanmoins, selon le Journal du CNRS, « certains scientifiques commencent à croire très sérieusement à leur existence car ils sont parvenus à élaborer un scénario convaincant pour expliquer leur formation : d'après eux, les trous blancs constituent le stade ultime de l'évolution des trous noirs ».
Pour le CNRS, la détection d’un trou blanc « établirait la gravité quantique et pourrait expliquer l’origine de la matière noire ».
Puisqu’on n’est pas à une supposition près, le Big Bang pourrait être un trou blanc. Sur ce sujet, Jacques Fric, actuel vice-président de la Commission Cosmologie de la Société Astronomique de France, a publié en 1997 une traduction des travaux de Philip Gibbs portant sur le Big Bang, les trous noirs et les trous blancs.
Le trou blanc, une « version symétrique en temps » d’un trou noir
On peut y lire une différence fondamentale entre trou noir et Big Bang. La singularité du second « se trouve dans le passé de tous les évènements de l’Univers, alors que la singularité d’un trou noir se trouve dans leur futur ».
Ainsi, le Big Bang « ressemblerait alors plus à un "trou blanc" qui est la version symétrique en temps (le temps est inversé) d’un "trou noir" ». Problème, d’après la relativité générale classique, « un trou blanc ne saurait exister pour la bonne raison qu’il ne peut pas être créé, du fait que son modèle symétrique (temps inversé) le Trou noir ne peut pas être détruit. Sauf, bien entendu, s’ils sont "éternels" ». De la physique à la philosophie, il n’y a parfois pas grand-chose…
Un trou noir, c'est facile à expliquer. Un trou blanc par contre…
Revenons à nos moutons. Pour les trous noirs, les scientifiques n’ont aucun mal à expliquer leur formation (effondrement d’une étoile) et ce phénomène est parfaitement décrit par les équations de la relativité générale d’Einstein. De plus, on a depuis quelques années maintenant des images de trous noirs. C’était une vraie révolution dans le monde de la cosmologie.
La gravitation quantique à boucles à la rescousse
Pour les trous blancs, « il n'existe pas de mécanisme simple qui permet d'expliquer leur naissance », reconnait le physicien italien Carlo Rovelli. Si on en parle aujourd’hui, c'est qu’avec d'autres chercheurs, il est à l’origine « du scénario de formation des trous blancs ».
Bien que les trous blancs puissent être décrits par les lois de la relativité générale, les chercheurs font appel à une autre théorie bien plus récente : la gravitation quantique à boucles. Elle a été « développée à la fin des années 1980 par l'Américain Lee Smolin et Carlo Rovelli », précise le CNRS.
« Il s'agit d'une des tentatives les plus abouties pour réconcilier la théorie de la relativité générale d’Einstein et la physique quantique », une quête du Graal ultime pour les scientifiques qui pourraient ainsi avoir une théorie unique (de l’infiniment petit à l’infiniment grand).
De la déformation infinie de l'espace-temps aux quantas
Que les puristes me pardonnent d’avance les approximations qui vont suivre. Avec un trou noir, la matière se concentre de plus en plus sur un tout petit point, formant pour finir une singularité « où la densité d'énergie et la courbure de l'espace-temps deviennent infinies ». Ces « infinis » sont les limites des lois de la relativité générale.
Dans la gravitation quantique à boucle, l’espace est constitué de quantas, des grains primitifs/minuscules, mais avec une taille finie, c’est le point important. L’espace ne peut ainsi pas se diviser à l’infini et il « est impossible de descendre sous la barre des 10⁻³⁵ mètre », ajoute le CNRS. Lorsqu’on arrive à la singularité, cette théorie impose que la matière ne peut pas se concentrer en deçà de cette limite.
« Il se produit alors un changement fondamental. L'espace-temps génère en quelque sorte une force répulsive d'origine quantique qui s'oppose à l'effondrement et fait rebondir la matière », explique Carlo Rovelli.
Autoreverse galactique : l’espace-temps s'inverse
Accrochez vos ceintures pour la suite, c’est pire qu’une descente de Kingda Ka : le fonctionnement de l’espace-temps s'inverse, « permettant à la matière qui auparavant se contractait d'être désormais expulsée ». Dans cette théorie, les trous noirs deviennent donc des trous blancs ; un scénario « crédible » pour le CNRS. Attention, cela ne veut pas dire qu’il correspond à la réalité.
Le trou blanc a aussi l’avantage de résoudre le « paradoxe de l'information » mis en avant par Stephen Hawking. Pour schématiser, dans l’Univers l’information (au niveau quantique) est toujours conservée même au gré des explosions d’étoiles, de choc des galaxies… sauf dans les trous noirs où elle « disparait » puisque rien ne peut en ressortir. La transformation en trou blanc libère toutes les informations du trou noir, fin du paradoxe. Encore une fois, il ne s’agit ici que de théorie.
C’est le moment de revoir Interstellar
C’est bien beau cette théorie, mais on devrait avoir déjà vu des trous blancs illuminer très fortement l’Univers ! Pas forcément. Un trou noir déforme l’espace et le temps. Ceux qui ont vu le film Interstellar comprennent de quoi il s’agit : plus on s’approche d’un trou noir, plus le temps s’écoule doucement par rapport à un observateur extérieur. Quelques minutes sur place peuvent correspondre à des heures, et encore ce n’était pas dans le trou noir.
Imaginez maintenant la densité de la singularité d’un trou noir sur le point de se transformer en trou blanc, et donc la déformation de l’espace-temps qui en découle : « le temps du rebond, qui n’excède pas quelques millisecondes pour le trou noir lui-même, peut correspondre à plusieurs milliards d'années pour un observateur éloigné », explique Aurélien Barrau du laboratoire de physique subatomique et de cosmologie. On peut ainsi ne pas encore avoir vu de trou blanc, car, « dans notre espace-temps, ils n'ont pas encore eu le temps » de se développer.
Des trous noirs « pourraient déjà avoir entamé leur transformation »
Dans tous les cas, il n’y a aucune chance de voir les plus gros trous noirs se transformer, car le temps que cela nous arrive est « largement supérieur à l'âge de l'Univers ». Fin de partie pour cette catégorie d’astres. Mais il existe aussi des « petits » trous noirs « qui pourraient déjà avoir entamé leur transformation ». Pour le CNRS, il s’agirait forcément de trous noirs primordiaux – mais jamais observés pour le moment – nés juste après le Big Bang.
Mais comment observer un trou blanc et être certain que ce n’est pas un autre phénomène de l’Univers. Aurélien Barrau a une hypothèse : « D'après mes calculs, l'explosion libérerait un flot de photons gamma, sous la forme de flashs intenses et brefs. Il n'est donc pas impossible que certains sursauts gamma observés, très rapides et très énergétiques, viennent de l'explosion d'un trou noir en trou blanc ».
Attention, tous les trous blancs ne font pas d’énorme feu d’artifice pour fêter l’événement. Certains d'entre eux pourraient être « de minuscules et paisibles trous blancs, imperceptibles car n'émettant quasiment plus de rayonnement et dotés d'une espérance de vie très longue ».
La gravitation quantique à boucle à « le vent en poupe »
Tout ceci n’est qu’hypothèse pour le moment, mais la confirmation de leur existence serait une avancée majeure : « Non seulement elle prouverait l'existence de ces astres mais, en confirmant la prédiction de la gravitation quantique à boucles, elle permettrait pour la première fois aux astronomes d’établir la nature quantique de l'espace-temps ».
Le CNRS conclut enfin en expliquant que la théorie de la gravitation quantique à boucle a « le vent en poupe par rapport à d’autres théories de gravitation quantique, comme la théorie des cordes » car « ses prédictions convaincantes ne s'arrêtent pas à l'existence des trous blancs ».
À la recherche des trous blancs dans l’Univers
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La gravitation quantique à boucle à « le vent en poupe »
Commentaires (15)
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Abonnez-vousLe 09/02/2024 à 10h12
Ca permet d'approfondir un peu le sujet.
Le 09/02/2024 à 10h18
Le 09/02/2024 à 12h32
Ça a l'élégance d'expliquer l'expansion de l'univers et une origine possible de l'univers car la notion de néant avant le Big Bang est par définition un non sens, pour reprendre l'analyse d' Etienne Klein.
En parallèle, d'autres chercheurs se sont penchés sur la topologie des trous noirs pour établir s'il était théoriquement possible de les traverser sans y laisser sa peau (lignes iso qqch).
Le 09/02/2024 à 13h18
Merci pour le tour de montagnes russes !
Le 09/02/2024 à 14h27
J'apprécie vraiment beaucoup vos articles sur ces sujets. Je m'arrête pour une fois pour le dire.
Un vrai régal de vous lire. Merci encore.
Le 09/02/2024 à 14h30
Modifié le 09/02/2024 à 14h47
Cela devrait nous ramener à un peu plus de modestie.
[HUMOUR]
Ça va faire plaisir aux racistes suprémacistes de savoir qu'ils sortent (peut-être) d'un trou blanc.
[/HUMOUR]
Le 09/02/2024 à 14h55
Le 09/02/2024 à 15h03
Le 10/02/2024 à 10h56
Le 10/02/2024 à 13h52
N'oublions pas que Guerlain vient d'apporter une nouvelle preuve de l'existence des trous du cul, avec sa théorie hémorroïdaire quantique des crèmes à cordes bouclées.
Comme on le sait :
- ils ont toujours existé
- certains disparaîtraient (là, il reste un doute !)
- de nouveaux se créent régulièrement
Le 10/02/2024 à 15h47
Le 11/02/2024 à 12h41
Et donc qu'il faudrait dissocier la notion d'univers de la notion de "notre univers", qui est déjà présenter comme univers observable d'ailleurs !
Je ne parle pas ici des univers parallèles
Le 11/02/2024 à 21h21
Une vidéo en complément de Balade mentale :
YouTube
Le 13/02/2024 à 06h15
"Dans ma jeunesse, on parlait de "fontaines blanches"
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