PixelFed, un embryon d’alternative libre à Instagram
Souriez, vous êtes open sourcés
Le 15 juin 2018 à 14h36
6 min
Internet
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Le réseau social fédéré Mastodon inspire d'autres projets. Parmi eux, PixelFed, une tentative de concurencer Instagram, en fournissant une version respectueuse de la vie privée. Encore à ses tous débuts, il ne manque pas d'ambition. Nous en parlons avec son développeur, Daniel Supernault.
En février 2017, le monde découvrait Mastodon, une alternative libre à Twitter. Fondée sur des serveurs fédérés, la plateforme est censée montrer les possibilités du web au-delà des grands services commerciaux. Un an plus tard, elle passait le million d'internautes inscrits à ses différentes instances. De quoi inspirer d'autres services.
À la mi-avril, le développeur canadien Daniel Supernault annonçait la création de PixelFed, une alternative à Instagram, sur le même principe. « Je compte m'inspirer des erreurs d'Instagram et offrir une alternative qui privilégie la vie privée aux profits » nous assure le concepteur.
Derrière la plateforme, le même protocole de fédération de serveurs que Mastodon, ActivityPub, et la volonté d'interconnecter ces univers. Lancée en bêta technique le 31 mai, elle compte quelques milliers d'inscrits, malgré ses (très) nombreuses limites.
Une première version minimale, focalisée sur le design
La communication du projet coche toutes les cases du libre. L'avancement est chroniqué par Daniel Supernault sur Mastodon, et il fallait en passer par un canal IRC pour s'inscrire en avance à cette bêta. Des projets sont aussi annoncés dans les tickets sur GitHub. Il faut donc fouiller et tâtonner pour découvrir certains détails et l'état des fonctionnalités.
À la mi-avril, le concepteur a d'abord mis en ligne une première capture de publication, reprenant le format d'Instagram. C'est son principal argument : un mimétisme avec le service de Facebook, sur une base open source.
« J'ai eu l'idée du projet le 15 avril, quand j'ai écrit les premières lignes de code et enregistré les noms de domaine. Je me suis focalisé sur le partage de photos, à la fois à cause du succès d'Instagram et parce que je ne trouvais pas d'alternative viable » nous conte le développeur de 28 ans.
Proposé uniquement en anglais, via une instance pixelfed.social (le profil de Supernault), la plateforme est pour le moment limitée. Aujourd'hui, elle permet d'envoyer des photos (individuelles ou en albums), d'apposer des filtres, de commenter des publications et de suivre des utilisateurs ou hashtags.
L'ensemble singe Instagram, dont les filtres photo, importés en CSS. Les éléments déjà en place sont soignés, à l'exception notable de la mise en ligne de photos. Les parties vides ou « Coming soon » sont encore nombreuses, principalement dans les paramètres, encore bien vides.
Le profil de Daniel Supernault sur PixelFed
Des bases à consolider
Le projet a aussi été influencé par Mastodon. « Il m'a inspiré de plusieurs manières. J'ai commencé un projet similaire quand Eugen a commencé Mastodon et, même si je n'ai jamais fini le mien, j'ai beaucoup appris de son projet de la communauté qu'il a formée. Je n'utilise pas son code, mais j'ai implémenté certains modèles de design similaire » assure Supernault.
Malgré l'interface « Instagram », le service reprend effectivement des caractéristiques de Mastodon, dont l'emphase sur la découverte de contenus, les avertissements de contenu (content warning) et, bien entendu, l'emphase sur la fédération d'instances. Sans parler d'un développement inclusif.
Le chemin est encore long, comme en témoigne ce ticket récapitulatif. En dehors d'éléments vides, le service renvoie régulièrement des erreurs à une simple mise en ligne de photos. Il n'est pas possible de changer son image de profil, de signaler un contenu offensant, d'être notifié ou d'envoyer un message privé. La prise en compte de certains changements n'est pas immédiate, et l'interface de programmation (API) pour applications tierces est encore balbutiante.
Pour autant, le logiciel évolue rapidement. Il y a quelques jours, le premier album photo a été mis en ligne et les publications vidéo sont en chemin.
« Je suis passé de 40 abonnés le 17 avril à 1 207 le 25 mai [via les comptes @dansup et @pixelfed sur Mastodon]. Je ne m'attendais pas à un tel retour. Le projet a attiré beaucoup d'intérêt et j'ai réalisé que je ne pouvais pas publier des captures d'écran pour toujours, donc je me suis fixé une deadline » déclare le développeur.
Le développement prend plusieurs heures par jour à son concepteur, qui a abandonné certains de ses clients pour ce projet. S'il dit mieux travailler sous la pression, fixant la publication de la première bêta un mois et demi après l'annonce, il craint tout de même le surmenage. C'est son principal défi, estime-t-il.
Une interface prometteuse mais bien vide
Une importation d'Instagram à venir
PixelFed n'est pourtant pas la seule tentative d'Instagram fédéré. Fontina, Ownstagram ou encore Zinat se sont aussi lancés sur ce créneau. Ce que Supernault a découvert après avoir créé et annoncé sa propre initiative.
Comptent-ils joindre leurs forces ? « Je me suis rapproché des développeurs de Fontina et Zinat, pour travailler ensemble, mais ça n'a mené à rien dans la mesure où nous utilisons des langages différents. J'ai proposé d'aider le projet Fontina pour son interface et expérience utilisateur, ce à quoi son développeur a été réceptif, donc on verra ! » répond le concepteur de PixelFed.
PixelFed sera fédérable avec les autres réseaux fondés sur ActivityPub, les membres de l'un pouvant suivre et interagir avec ceux des autres, même seules les publications contenant des images seront récupérées.
Seule une interface web existe aujourd'hui. Des applications mobiles seraient en développement, le logiciel étant en principe compatible avec l'API de Mastodon ou Pleroma. La plateforme, à ses balbutiements, cherche encore son identité graphique. Son développeur a lancé un concours de logos, dont les cinq entrées les mieux classées sont rémunérées.
À terme, Daniel Supernault doute que sa plateforme devienne compatible avec Instagram. Il nous promet tout de même un import des photos depuis le service propriétaire, via sa fonction d'export de données, lancée fin avril pour respecter le RGPD. Notons que PixelFed ne propose pas encore de paramètres de vie privée, l'ensemble des contenus étant pour l'instant public.
Pour le moment, ce projet est un hobby pour Supernault, qui espère tout de même le développer à plein temps, soit via une campagne de financement participatif, des dons ou des plateformes comme Patreon ou Liberapay. Deux semaines après son lancement, la plateforme compte près de 750 inscrits et près de 3 000 statuts. Des débuts prometteurs, pour un projet adoubé par le concepteur de Mastodon.
PixelFed, un embryon d’alternative libre à Instagram
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Une première version minimale, focalisée sur le design
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Des bases à consolider
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Une importation d'Instagram à venir
Commentaires (6)
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Abonnez-vousLe 15/06/2018 à 14h40
Intéressant …
Le 15/06/2018 à 15h07
Comme si il n’y avait pas assez de photos de chats comme ça sur Mastodon… " />
Le 15/06/2018 à 21h03
Un projet à suivre, c’est sûr.
Le 16/06/2018 à 20h31
Je trouve super qu’il y ait de plus en plus de projets de ce genre. C’est le seul moyen de limiter l’utilisation des services fermés des grosses entreprises. En plus avec les protocoles de réseaux sociaux du W3C, ces services-là peuvent communiquer entre eux de manière standard.
Le 16/06/2018 à 21h11
En cadeau, ce qui semble être la première photo de chat de PixelFed " />
Le 17/06/2018 à 07h23