Après consultation, l’ANSES actualise son rapport sur les risques sanitaire liés à la 5G
De bons retours, d’autres… surprenants
Le 04 mars 2022 à 14h44
10 min
Société numérique
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Comme on pouvait s’en douter, l’ANSES a récolté de nombreux commentaires lors de sa consultation publique sur les risques sanitaires liés à la 5G. Des ajustements ont été apportés au rapport, mais les enseignements et les conclusions restent les mêmes. L’Agence prépare une foire aux questions pour tenter de calmer le jeu.
L’année dernière, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail publiait un long et touffu rapport sur les effets potentiels de la 5G sur la santé. L’ANSES arrivait à la conclusion qu’il n’y avait « pas de risques nouveaux pour la santé au vu des données disponibles ».
Pour les fréquences déjà utilisées (700 à 2 600 MHz), l’arrivée de la 5G ne change rien par rapport aux 4G, 3G et 2G : les risques sont les mêmes. Dans la nouvelle bande des 3,5 GHz, quelques études sont disponibles, avec la conclusion que de nouveaux risques sanitaires sont « peu probables ». Par contre, les données et les études étaient « insuffisantes pour conclure à l’existence ou non d’un risque pour la santé » dans les 26 GHz.
L’ANSES précisait aussi qu’il s’agissait d’un rapport en version « bêta ». Une consultation publique était ouverte dans la foulée « afin de recueillir les commentaires éventuels de la communauté scientifique et des parties prenantes intéressées ». L’Agence se laissait la possibilité de modifier et compléter son rapport « après la prise en compte des commentaires reçus lors de cette consultation ».
L’Agence a terminé la compilation des retours (certains surprenants) et la mise à jour de son analyse. Dans l’ensemble, le rapport reste le même : « Les précisions apportées suite à l’analyse des contributions et la prise en compte des mesures d’exposition récentes confortent les conclusions initiales de l’expertise ».
La conclusion ne change donc pas : « En l’état des connaissances, l’Agence estime peu probable que le déploiement de la 5G entraine de nouveaux risques pour la santé, comparé aux générations de téléphonie précédentes ».
Plus de 200 commentaires de 42 contributeurs
L’ANSES avait mis en ligne un formulaire « pour déposer des commentaires associés à des sections précises du rapport d’expertise et de l’avis ». De plus, pour « faciliter ce dépôt pour les contributeurs, mais aussi pour accélérer leur analyse et traitement par l’ANSES, l’Agence a rendu possible l’option de commenter directement le rapport et l’avis dans les fichiers au format PDF ». Il était évidemment demandé de citer les références bibliographiques des éventuelles sources citées afin de permettre de les vérifier.
203 commentaires ont ainsi été reçus de 42 contributeurs différents, et ils ont tous « fait l'objet d'une analyse ». La majorité provient de particuliers (23), suivi de loin par les associations et ONG (8) et enfin les autres entités comme des entreprises. Sur les plus de 200 commentaires, 33 ont été transmis par l’intermédiaire du formulaire, 122 directement dans le rapport et 48 (30 en français, 18 en anglais) dans l’avis.
14 contributions « annexes » également prises en compte
L’Agence ajoute que « 14 contributions annexes ont été reçues sous la forme de fichiers PDF [d’une longueur variable de 1 à 72 pages, ndlr], ne respectant cependant pas les formats de dépôt prévus ». Malgré cela, ces contributions ont été consultées et, « lorsque des remarques pertinentes ont été formulées […] elles ont été prises en compte dans les nouvelles versions du rapport d’expertise et de l’avis ».
L’ANSES explique par contre que « l’hétérogénéité des formats de ces contributions, mais aussi de leur contenu, ne permet pas de les inclure dans le tableau récapitulatif des commentaires et réponses associées ». Elle ajoute que « par ailleurs, plusieurs de ces contributions, dont certaines ont été rendues publiques, s’écartent très sensiblement d’apports scientifiques. Ainsi, les commentaires non constructifs, concernant notamment la démarche scientifique de l’ANSES, sa déontologie, ainsi que la probité et les compétences de ses experts, n’ont pas été considérés ».
Cela n’est quoi qu’il en soit pas du gout de Phonegate Alert NGO qui a justement fait un retour dans un document de 48 pages. L’association indique que, si l’ANSES « n'observe toujours pas de risques pour la santé », c’est « peut-être tout simplement par ce qu'elle a volontairement exclue de la "consultation publique" pour d'obscures raisons, 14 contributions PDF ». L’Agence affirme pourtant le contraire puisqu’elle dit avoir bien pris en compte ces remarques lorsqu’elles étaient pertinentes.
La tristitude de certains commentaires
Les commentaires reçus (.pdf) méritent d’ailleurs que l’on s’y attarde quelques minutes. On commence par un Hall of fame des retours les plus surprenants et/ou hors sujet. Sachant que le rapport de l’ANSES ne porte que sur la seule question des risques sanitaires.
On commence de suite par un particulier qui va droit au but, sans citer la moindre source : « Dangereux selon de nombreux scientifiques de renom ». Un autre n’a visiblement pas compris le principe de la consultation : « j’ai du consulté un orl depuis qq semaines j ai désormais des acouphènes ».
On continue avec un autre particulier : « Bonjour. Quand la "petite" 5G est arrivée dans mon environnement je l'ai senti de suite. Elle est beaucoup plus pénétrante. Il m'est arrivé de faire des malaises dans les rues qui sont dans l'axe des antennes ». Pour rappel, l’ANFR permet à tout un chacun de demander gratuitement des mesures de niveau d’expositions aux ondes. La démarche est expliquée ici.
Viennent ensuite les éternelles reproches contre la 5G : « Je suis contre cette depense colossale inutile Vous pensez que les 690 millions de personnes qui souffrent de faim dans le monde se preoccupent de la 5 g Qui va anéantir le reste de la population pat des cancers et plus On n en a pas besoin ».
L’ANSES ne pouvait pas non plus passer à côté de la guerre de la couverture : « La 5G n'apportera aucune avancé à la vie des français. Il faut apporté le réseau dans les zones blanches. la 4G est largement suffisante pour tous les usages raisonnés. La 5G va entrainé une surconsommation de numérique et donc d'électricité en total contradiction avec les enjeux écologiques et climatiques actuels ».
Plus que des retours constructifs, c’est pour certains un défouloir : « Selon moi, l'avis de l'ANSES concernant la 5G, n'est pas un avis, c'est juste un pare-vent au cas ou le vent mauvais pour elle se lève. Tout repose sur les informations communiqués à l'ANSES pas les industriels, point à la ligne, dégagez, il n'y a rien à voir... C'est une arnaque, voir une allégeance de plus de la part de l'ANSES comme pour les pesticides... »
Certains flirtent même avec le complotisme : « La prolifération des antennes 5G et l’exposition des populations naturelles végétales animales et humaines pour servir les intérêts financiers des plus gros et la frénésie de contrôle des populations par les gouvernements pourris de conflits d’intérêts est obscène. »
Les modifications suite aux commentaires
Quelques petits ajustements ont néanmoins été apportés au rapport suite à d’autres commentaires, mais rien qui ne change sa conclusion comme nous l’avons déjà expliqué. C’est le cas des « choix de la Pologne et de la Lituanie en matière de valeurs limites d'exposition réglementaires ».
De plus, « le texte a été précisé concernant les valeurs limites plus basses adoptées par certains pays, elles s'appliquent effectivement aux expositions aux sources éloignées du corps. Concernant l'intermittence des signaux, le texte a été clarifié ».
Une foire aux questions en approche
L’ANSES fait également deux annonces intéressantes. Tout d’abord, elle « engagera en 2022 un travail d'analyse des lignes directrices récemment publiées par l'Icnirp afin notamment d'évaluer dans quelle mesure elles prennent en compte les recommandations précédemment formulées par l'ANSES à l'égard des enfants, ou encore l'évolution récente des technologies ».
La Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants (ICNIRP pour les anglophones) est une ONG internationale chargée de déterminer et publier des limites d'exposition aux champs électromagnétiques utilisés par un grand nombre de technologies et d'appareils connectés, dont le téléphone cellulaire.
Ensuite, une personne soulève des questions sur « d’éventuelles conséquences sur la faune et la flore ». Elles sont jugées « pertinentes » par l’Agence, mais ne « figuraient pas dans la demande adressée à l'ANSES », et ne sont donc pas abordées dans le présent rapport. Elles « pourraient être investiguées à l'avenir par l'ANSES, dans le cadre d'une approche globale consistant à évaluer les effets éventuels des champs électromagnétiques sur la biodiversité, ou certains organismes vivants peu rapportés dans les travaux d'évaluation des risques ».
L’ensemble des commentaires – conformes ou non aux modalités de dépôt – « a fait apparaître plusieurs préoccupations communes ». En plus des réponses déjà apportées et des modifications de son rapport sur les risques sanitaires, l’Agence a synthétisé une série de questions : « Des réponses seront publiées ultérieurement sous la forme de "questions / réponses" ».
L’ANSES persiste et signe dans ses conclusions
Quoi qu’il en soit, l’ensemble des commentaires ne font que conforter les conclusions initiales de l’agence. Les voici en version « 2022 » :
- « Avec le déploiement de la technologie 5G dans des bandes de fréquences d’ores et déjà utilisées par les technologies 3G et 4G, comprises entre 700 MHz et 2,1 GHz, ou dans la bande de fréquence 3,5 GHz, les niveaux globaux d’exposition aux champs électromagnétiques seront comparables ou légèrement supérieurs à ceux des technologies existantes. Il est peu probable que ce déploiement entraîne de nouveaux risques pour la santé, comparé aux résultats des expertises sur les générations de téléphonie précédentes ;
- Concernant la bande de fréquences 26 GHz, qui n’est pas encore exploitée en France pour le déploiement de la 5G, l’exposition se différencie par une pénétration beaucoup plus faible des ondes. Pour autant, les données sont à l’heure actuelle trop peu nombreuses pour conclure à l’existence ou non d’effets sanitaires ;
- Il est nécessaire de poursuivre la production de données, en particulier pour suivre l’évolution de l’exposition des populations au fil de l’extension du parc d’antennes et de l’augmentation de l’utilisation des réseaux 5G. De façon plus générale, l’acquisition de connaissances nouvelles, notamment sur les liens entre expositions et effets sanitaires, reste également essentielle. En effet, si les travaux successifs de l’ANSES sur les radiofréquences, sur lesquels cette dernière expertise s’appuie, indiquent qu’il n’existe pas à ce jour de preuve d’effet sanitaire lié aux usages numériques courants, d’autres effets comme le développement de cancer, l’altération du fonctionnement cérébral ou de la fertilité continuent de faire l’objet de travaux ».
En complément de ses conclusions initiales, l’Anses souligne aussi dans son avis actualisé « l’importance d’identifier au plus tôt les impacts environnementaux et sociétaux du numérique, que la technologie 5G va probablement accélérer ».
Après consultation, l’ANSES actualise son rapport sur les risques sanitaire liés à la 5G
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Plus de 200 commentaires de 42 contributeurs
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14 contributions « annexes » également prises en compte
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La tristitude de certains commentaires
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Les modifications suite aux commentaires
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Une foire aux questions en approche
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L’ANSES persiste et signe dans ses conclusions
Commentaires (2)
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Abonnez-vousLe 04/03/2022 à 15h18
C’est un festival les commentaires dans le PDF, merci pour l’ANSES pour le fou-rire
Le 04/03/2022 à 17h50
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loverat.La méthodologie ne s’apprend pas dans une consultation publique : je suis surpris…