En décembre, la Federal Trade Commission déposait plainte pour abus de position dominante contre Facebook. Le procès était d’autant plus attendu que le géant pouvait voir le ciel s’assombrir des deux côtés de l’Atlantique depuis un moment.
Le juge fédéral en charge de l’affaire à Washington, James Boasberg, a douché les espoirs de la FTC : quelle que soit la puissance détenue par Facebook, les avocats de la Commission ont échoué à démontrer ce qu’était un réseau social et comment ils avaient estimé la part de marché de l’entreprise à 60 %.
« L’incapacité de la FTC à offrir le moindre indicateur ou la moindre méthode utilisée pour calculer la part de marché de Facebook rend son assertion « d’au moins 60 % » trop spéculative et dénuée de fondements pour continuer », a déclaré le juge.
Deuxième coup dur pour l’accusation, le juge a rejeté une autre plainte dans une décision séparée : le procureur général avait attendu trop longtemps avant de se pencher sur les rachats d’Instagram et WhatsApp, respectivement effectués par Facebook en 2012 et 2014.
Chez Facebook bien sûr, le temps est au beau fixe : « Nous sommes heureux que les décisions d’aujourd’hui reconnaissent les défauts dans la plainte du gouvernement contre Facebook. Nous nous battons équitablement chaque jour pour mériter le temps et l’attention des gens et nous continuerons à fournir de très bons produits aux personnes et entreprises qui utilisent nos services ».
Les décisions du juge sont bien une défaite importante pour le gouvernement, et pour la FTC en particulier. Bien qu’elle ne soit pas responsable du résultat car venant tout juste d’arriver à la tête de la Commission, Lina Khan – connue pour ses vives positions antitrust – aura probablement à cœur de rectifier le tir.
Car rien n’est encore perdu. Le juge a laissé 30 jours à la Commission pour revoir sa plainte et expliquer aussi bien sa définition d’un réseau social que la méthode employée pour calculer cette part de marché. Sans ces informations élémentaires, les avocats ne pourront pas démontrer l’élément central de leur plainte : la distorsion de la concurrence qu'entraîne la masse imposante de Facebook.
L’affaire est suivie de très près aux États-Unis, notamment par les membres du Congrès. Politico cite notamment les cas des sénateurs républicains Josh Hawley et Ken Buck, qui ont exprimé leur « profonde déception » face à la décision du juge.
Pour Ken Buck en particulier, l’affaire est une preuve supplémentaire que « le Congrès a besoin de fournir des ressources et outils supplémentaires » pour la lutte antitrust contre « les sociétés Big Tech s’engageant dans une conduite anti-compétitive ».
Si Facebook doit respirer pour le moment, le danger est loin d’être écarté. Il existe désormais un consensus au sein du Congrès sur le problème que présentent des entreprises au pouvoir si important qu’elles semblent pouvoir échapper à toute législation. Le spectre d’une frappe bipartisane n’est pas à écarter, dans le sillage du fameux rapport qui torpillait les GAFAM l'automne dernier.
Commentaires