La Chine stocke les puces états-uniennes et tente de débaucher à l’étranger
Un paquet de chips
La Chine tente d'anticiper les nouvelles restrictions et sanctions dont elle pourrait faire l'objet en achetant massivement des semi-conducteurs aux États-Unis. Elle cherche aussi à débaucher les ingénieurs experts en la matière, aussi bien à Taïwan, en Corée du Sud que dans les pays occidentaux.
Le 29 novembre à 10h10
5 min
Économie
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D'après des données douanières consultées par le South China Morning Post, la Chine a importé pour plus de 1,11 milliard de dollars de circuits intégrés en provenance des États-Unis en octobre, soit une augmentation de 60 % par rapport à la même période de l'an passé.
Au cours des dix premiers mois de l'année, la Chine a, au total, importé pour 9,61 milliards de dollars de puces électroniques en provenance des États-Unis, soit une augmentation de 42,5 % par rapport à l'année précédente.
Cet appétit soudain intervient alors que les États-Unis et l'Europe tentent d'empêcher la Chine de pouvoir accéder aux technologies occidentales les plus sensibles. L’administration Biden envisage de sanctionner 200 autres fabricants chinois de puces et Donald Trump pourrait également renforcer les restrictions à l'exportation de puces et de GPU, relève Neowin.
Or, et paradoxalement, « sans la demande de la Chine, il est difficile pour la production de puces d'être rentable et durable », estime Liang Yan, professeur d'économie à l'université Willamette, dans l'État américain de l'Oregon, qui note que le pays représente environ un tiers de la demande mondiale de semi-conducteurs.
Des salaires chinois supérieurs aux salaires occidentaux
De nombreuses entreprises chinoises tentent de débaucher les meilleurs ingénieurs dans des domaines tels que les semi-conducteurs avancés et l'intelligence artificielle, rapporte de son côté le Wall Street Journal.
Les chasseurs de tête chinois se concentreraient sur plusieurs pôles technologiques, notamment Taïwan, certaines régions d'Europe et la Silicon Valley. Certaines masquent leur origine chinoise en créant des entreprises locales afin d'éviter d'attirer l'attention des autorités, ou en travaillant avec des chasseurs de têtes basés à Singapour et à Hong Kong.
En 2017, un plan gouvernemental chinois pour le développement de l'IA avait appelé à attirer les talents les plus « pointus », y compris les « meilleurs scientifiques internationaux » dans des domaines tels que l'apprentissage automatique, la conduite automatique et les robots intelligents.
Et ce, souligne le Wall Street Journal, alors que le financement public des entreprises chinoises leur permet d'offrir des salaires supérieurs à ceux que peuvent payer les entreprises occidentales.
Jusqu'à 12 ans de prison et 3 millions de dollars d'amende
À Taïwan, où se trouve TSMC, le plus grand fabricant de puces en sous-traitance au monde, les autorités auraient commencé à constater une augmentation du braconnage de talents chinois et du vol de secrets commerciaux vers 2015, relève le journal économique américain.
Le problème serait tel que le pays a adopté en 2022 de nouvelles règles interdisant à quiconque de divulguer à des pays étrangers des technologies essentielles à la sécurité nationale et à la compétitivité industrielle de Taïwan. Les contrevenants risquent jusqu'à 12 ans de prison et une amende pouvant atteindre l'équivalent d'environ 3 millions de dollars.
Taïwan, qui applique déjà des règles strictes en matière de recrutement chinois, a également accusé, en septembre dernier, huit entreprises technologiques de Chine continentale de menacer sa compétitivité en débauchant illégalement des talents de l'île.
Entre 2020 et juillet 2024, a calculé le Wall Street Journal, le ministère taïwanais de la Justice a enquêté sur environ 90 cas de débauchage de talents, la plupart liés à l'électronique et aux semi-conducteurs.
Des débauchages qui intéressent aussi les services de renseignement
Le problème ne concerne pas que Taïwan. En Corée du Sud, un ancien cadre de Samsung Electronics a ainsi été accusé d'avoir obtenu illégalement les plans d'une usine de puces de son ex-employeur pour en construire une copie en Chine.
L'an passé, le directeur général de la société californienne de semi-conducteurs FemtoMetrix avait déclaré au Congrès que les secrets commerciaux de son entreprise avaient été volés par trois de ses employés partis créer une société de semi-conducteurs en Chine, emportant avec eux des milliers de fichiers de l'entreprise.
À l'automne dernier, l'entreprise allemande Zeiss SMT a découvert que Huawei tentait de débaucher certains de ses ingénieurs, en les bombardant d'e-mails, appels téléphoniques et messages LinkedIn, leur offrant jusqu'à trois fois leur salaire.
Ses miroirs spécialisés constituent, en effet, l'une des pièces maîtresses des systèmes EUV du néerlandais ASML, le leader mondial dont les technologies sont interdites à l'export en Chine. Celles de Zeiss sont, elles aussi, considérées comme tellement avancées que son siège est interdit à la plupart des visiteurs, note le Wall Street Journal.
L'entreprise s'était émue auprès du gouvernement allemand de ses tentatives agressives de débauchage, entraînant l'ouverture d'une enquête de la part d'un de ses services de renseignement.
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