Qwant nous détaille sa stratégie pour conquérir l’Europe et s’intègre au Fairphone 2
La Suisse puis... le monde
Le 16 juin 2017 à 12h21
8 min
Internet
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Le moteur de recherche français vient de lancer son édition suisse, avec des serveurs d'anonymisation sur sol helvète. Le service s'appuie en partie sur les langues régionales pour cibler les utilisateurs, en affichant un respect de la vie privée en ligne avec les smartphones de Fairphone, qui a annoncé une intégration prochaine.
Avant-hier, le moteur de recherche français Qwant présentait sa version suisse, Qwant.ch, censée adapter le service aux besoins helvétiques en maintenant la promesse de respect de la vie privée. Presque une contorsion pour une entreprise qui affirme ne pas utiliser d'information personnelle pour diriger les internautes, même pas leur adresse IP.
Il s'agit surtout d'une étape de plus dans une logique régionale, après l'adaptation du moteur à plusieurs langues locales en France et au Royaume-Uni, comme nous l'affirme son PDG Éric Léandri. « C'est l'archétype de ce qu'on veut faire avec Qwant : de la régionalisation et de la contextualisation par zone, avec du multi-langue » détaille-t-il.
18,5 millions d'euros investis en février
Aujourd'hui, la jeune pousse affiche une croissance importante, avec un financement idoine. En février, elle a levé 18,5 millions d'euros auprès de la Caisse des dépôts (15 millions) et d'Axel Springer (3,5 millions), ce dernier étant présent au capital depuis 2014. Qwant nous affirme disposer aujourd'hui d'environ 40 millions d'euros de liquidités.
L'an dernier, 2,6 milliards de recherches auraient été effectuées, le moteur s'attendant à en accueillir plus de quatre milliards en 2017. Les revenus par publicité et affiliation « vont très bien » avec une croissance à deux chiffres des revenus chaque mois, se félicite Léandri, qui ne va pas dans plus de détails. Il s'attend à être « à l'équilibre en fin d'année et positif début d'année prochaine », malgré le passage de 70 employés actuellement à 150 en fin d'année.
L'entreprise vient d'ouvrir un bureau en Allemagne et mise sur une européanisation pays par pays, en décentralisant une partie de son infrastructure dans chacun d'eux.
Les langues régionales comme moyen de ciblage
Avec le lancement en Suisse, Qwant expérimente déjà la localisation des serveurs chargés de l'anonymisation des adresses IP des internautes directement dans son pays. Cette solution permet d'éviter que l'IP d'un utilisateur ne se balade sur divers opérateurs de transits ou autres réseaux potentiellement indiscrets.
Le moteur de recherche dit ne disposer des adresses IP complètes, chargeant ses pares-feu de les hasher et saler. « On a déposé des serveurs, dans un datacenter sous une montagne, avec nos pares-feu et nos systèmes d'anonymisation. Ils font ensuite appel à l'index, qui est toujours en France » résume Léandri. Un système qu'elle se voit bientôt étendre à l'Allemagne et à l'Italie.
Pourquoi la Suisse ? « Ils parlent français, allemand et italien. Ce sont nos trois index forts aujourd'hui. La Suisse est beaucoup plus petite que ces trois pays, ce qui nous offre une rapidité d'index bien meilleure et permet de mener tous les tests que l'on veut dans les trois langues principales aujourd'hui » répond l'entreprise.
Le but de Qwant est de contextualiser fortement ses réponses en fonction de la version et de la langue choisie par l'utilisateur. Du côté des sites, il s'appuie sur leur langue et leur extension (.bzh, .corsica, .ch...) pour les faire remonter. « C'est intéressant de sortir en Corse des sites en .corsica que d'autres sites en .com » estime le moteur, qui s'est associé à des registrars et gestionnaires de « points » pour découvrir plus facilement ces sites.
La Suisse est composée de cantons avec des besoins parfois très précis, comme le romanche, une langue qui serait parlée par 60 000 habitants. « Le romanche n'est pas activé parce que notre traducteur était nul » note Eric Léandri, qui a lancé un appel aux talents avant-hier.
Une multitude de langues
En France, le moteur est disponible en français, basque, breton, catalan et corse. L'alsacien doit bientôt suivre. Au Royaume-Uni, l'anglais est accompagné de l'écossais, du gallois et de l'irlandais. Autant de points d'ancrage pour situer les internautes, qui doivent tout de même choisir explicitement ces versions. « Soit on commence à tricher, soit on continue et à nous de faire savoir » que l'option existe, tranche Léandri, qui voit bien certains clients (comme Cozy Cloud) le retenir à l'avenir.
La régionalisation « n'est pas décivise mais importante. Sur la Suisse, on pense vraiment que cette manière de pratiquer la protection [via des serveurs locaux] est un plus par rapport à n'importe qui sur le marché », affirme le patron du service, qui s'affiche en défenseur des langues régionales.
Ce choix amène quelques besoins sur Qwant Junior, la version du moteur destinée aux jeunes. Des demandes de régionalisation ont été effectuées par des écoles en Bretagne, en Corse et dans le pays basque. Officiellement, dans ce dernier, qui pose des soucis particuliers à Qwant. Lancé il y a quelques semaines, « Qwant en basque est encore peu utilisé à cause de deux, trois petites erreurs de l'algorithme ». Avec trois variantes (basque, espagnole et française), il serait encore difficile de créer une version unique, affirme la société.
Quand Xaphir arrive, Qwant la joue mégadonnées
Cette dernière a de la concurrence sur le créneau des moteurs de recherche respectueux de la vie privée. Le mois dernier, Xaphir émettait la même promesse, après des années de conception. La société a levé dix millions d'euros et dit employer 35 personnes à Epinal. L'une des bases du moteur est la présentation des résultats en mosaïque, que l'internaute filtre jusqu'à trouver précisément ce qui l'intéresse.
Quel regard porte Qwant sur ce nouveau venu ? « C'est bien. Demain, on montre ce qu'on fait avec des milliards de données, que ce soit dans la réalité augmentée, l'intelligence artificielle ou le speech-to-text... Donc parler c'est bien, avoir des données c'est mieux. Tant qu'il n'y a pas de données, tout ce qu'ils racontent ne sert à rien » répond-il, évoquant l'essai malheureux de Qwant Mosaic, fondé sur un principe similaire.
L'entreprise vante ses capacités d'extraction de données, qui permettent entre autres de trier les actualités et d'écarter les spams, la violence et la pornographie de Qwant Junior. « Ce sont des calculs massifs en millièmes de seconde, je doute que des 2cv fassent ça » tance son patron, qui a récemment noué un partenariat avec NVIDIA sur le sujet.
Fairphone 2, cartographie et paiement en ligne
Ces derniers jours, Qwant a surtout montré les muscles au salon Viva Technologies, qui se tient actuellement à Paris. Elle multiplie les démonstrations en réalité augmentée et virtuelle, montre son implication dans des causes humanitaires et quelques nouveautés concrètes.
Le moteur vient de s'associer au fabricant de smartphones libres Fairphone, qui se veut respectueux des hommes et de l'environnement, le moteur étant intégré aux smartphones Fairphone 2. La société montre ses capacités d'indexation dynamique des vidéos, pour la recherche dans leur contenu. Lancé l'an dernier, Qwant Music doit aussi évoluer, via un travail commun avec l'Ircam, déjà responsable d'un projet blockchain avec la Sacem.
📽interview Olivier Hebert, CTO de @Fairphone qui revient sur l'annonce de partenariat avec Qwant #VivaTech pic.twitter.com/aRcyO19CWz
— Qwant FR (@Qwant_FR) 16 juin 2017
Le moteur annonce aussi l'arrivée d'un futur Qwant Maps, garanti sans pistage, avec des informations contextuelles, des événements récents et « toutes les informations de votre ville ». Des services pour entreprises doivent aussi être proposés.
Il est aussi question de Qwant Pay, calqué sur les nombreux services fournis par les géants du Net, qui doit simplifier les transactions sur le web à partir de l'application du moteur. Un projet est lancé avec la société Icare sur une bague connectée, permettant des paiements sécurisés.
Passage aux énergies renouvelables
Enfin, la jeune pousse annonce aussi un partenariat avec Akuo Energy pour qu'elle ne consomme plus que des énergies renouvelables. Elle intègre la World Alliance for Efficient Solutions avec Solar Impulse. Notons la large mise en avant de la plateforme de financement de projets vers AkuoCoop pendant la conférence de presse et en page d'accueil du moteur de recherche, lancé par son partenaire commercial.
Début juin, le serveur annonçait que l'ensemble de la consommation de ses serveurs est compensée, après avoir publiquement regretté le poids de son activité l'an dernier. Une tendance que l'entreprise n'est pas la seule à suivre, Google ayant par exemple promis de n'utiliser que de l'énergie propre cette année.
Qwant passe intégralement en énergie renouvelable. #Qwant #QwantGreen #VivaTech pic.twitter.com/xqCwaHXlRz
— Guillaume Champeau (@gchampeau) 15 juin 2017
Qwant nous détaille sa stratégie pour conquérir l’Europe et s’intègre au Fairphone 2
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18,5 millions d'euros investis en février
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Les langues régionales comme moyen de ciblage
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Une multitude de langues
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Quand Xaphir arrive, Qwant la joue mégadonnées
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Fairphone 2, cartographie et paiement en ligne
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Passage aux énergies renouvelables
Commentaires (30)
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Abonnez-vousLe 19/06/2017 à 09h21
Oui, et ? T’as regardé ce qu’on trouve sur leur github ? les extentions et l’instant answer, c’est tout. Rien sur le front de qwant par exemple, alors même que ça avait était promis en février dernier :/
Le 19/06/2017 à 20h51
ça dépend de quoi on parle :
de la nationalité juridique de la société ou de son activité économique.
Par exemple, on peut dire que Renault-Nissan est une société néerlandaise, que Renault est une société française, et que Renault-Nissan est une entreprise multinationale (d’un point de vue économique).
Orange est une société française (juridiquement) et une entreprise Euro-Africaine (économiquement).
Le 19/06/2017 à 21h02
Et la société Wiko (siège social: Marseille) est-elle française, bien que filiale à 95% du groupe Tinno (Shenzhen - Chine) ?
Un peu comme le club sportif du PSG qui est Parisien bien que appartenant au Qatar " />
Le 20/06/2017 à 04h52
Le cas des holdings est effectivement un peu plus particulier vu qu’elles sont systématiquement montées dans un pays permettant aisément l’optimisation fiscal.
La question peut aussi se poser avec Ferrari : depuis sa séparation avec FCA, le groupe est enregistré au Pays bas. Peut-on encore considérer que c’est un constructeur italien bien que son activité y soit toujours ?
Dans le cas du message que tu citais, je restais uniquement au niveau de la nationalité de l’entreprise via son pays de création.
Le cas Wiko est assez difficile à dire (en même temps je ne prétend pas être expert en droit des affaires, loin de là…), mais toutes les sources disent que c’est une marque française. L’entreprise est française, et la marque commerciale aussi. A l’inverse, par exemple, de Google qui est une marque américaine bien qu’implantée en France via sa filiale Google France (qui elle est une entreprise française).
Donc dans l’idée, j’aurais plus envie de partir de la marque que de son activité économique, même si les deux sont intimement liés.
Le 20/06/2017 à 13h45
Le 16/06/2017 à 12h27
L’écossais et le gaëlique? C’est pas un peu la même chose? Ca ne serait pas le gaëlique/écossais et le gallois plutôt?
Le 16/06/2017 à 12h36
j’allais faire la même remarque !
irlandais = gaélique d’irlande.
il y a aussi un gaélique écossais, mais par défaut gaélique=irlandais.
Je pense qu’il s’agit du gallois, c’est la langue celtique la plus parlée." />tu as raison
édit : j’ai oublié le scots, et le cornique mais le cornique est une langue morte en réapparition donc ça ne compte pas.
Le 16/06/2017 à 12h36
Toujours rien niveau ouverture du code source de la part de qwant du coup ?
Le 16/06/2017 à 12h48
je viens d’essayer : en zone géographique grande-bretagne tu as le droit à l’anglais, au gallois et à l’écossais
en zone géographique irlande, tu n’as que l’anglais.
Le 16/06/2017 à 12h50
Dommange que Qwant ne soit pas du tout à l’écoute des suggestions qui leur sont faites.
Les bugs d’interface ne sont jamais résolus.
Le 16/06/2017 à 13h04
Vivement l’Espéranto et le patois marnais. " />
Sinon, vu que Qwant est une entreprise française, quelles conséquences sur la vie privée en France avec les récentes déclarations de notre cher président ?
Le 16/06/2017 à 13h15
Effectivement c’est corrigé merci " />
Le 16/06/2017 à 13h33
ça fait vraiment plaisir de voir qu’il y a de l’investissement dans les services respectueux, donc un marché et un public.
Le déballage de nos vies privées n’est pas une fatalité, quoi qu’en pensent certains.
Le 16/06/2017 à 13h40
Je les utilise depuis quelques mois (sur iOS et W7) et, sauf recherche vraiment spécifique, j’en suis plutôt satisfait.
Le 16/06/2017 à 14h02
Le 16/06/2017 à 14h07
Le 16/06/2017 à 14h36
Je continue d’utiliser Qwant par “conviction” mais faut admettre que des fois il patine, j’attends plus de 15 sec pour avoir un résultat de recherche… C’est pas un drame me direz-vous, mais comparé aux centièmes de sec de chez Google, la différence est nette.
Par contre un Qwant Maps serait le bienvenu en effet !
Le 16/06/2017 à 14h48
Le 16/06/2017 à 15h10
Le 16/06/2017 à 16h44
Le 16/06/2017 à 17h17
ça s’améliore, effectivement. La force de google, c’est aussi les recherches spécialisées genre google scholar / google patents / … Y a-t-il un “google code”?
EDIT: entendu un moteur de recherche qui ciblerai uniquement le code (github / stackoverflow / …)
Le 17/06/2017 à 08h05
C’est moins chauvin mais j’aime bien duckduckgo. Rapide et efficace.
C’est vraiment rare que je ne trouve pas dans duckduckgo et que je trouve dans google.
Le 17/06/2017 à 10h48
Citroën 2CV ? J’avoue ne pas être sûr de comprendre non plus..
Le 17/06/2017 à 12h20
DDG utilise les services de Google (en les anonymisant), logique d’y trouver la même pertinence.
A l’inverse, Qwant se fait sa propre base de résultats.
Le 18/06/2017 à 01h39
Pour être très exacte on dira que c’est une entreprise franco-allemande, du coup (française à 80% et allemande à 20% si j’ai bien lu l’actionnariat).
Néanmoins, on comprend que pour des raisons de “marketing” il est meilleur de parler d’entreprise européenne (par opposition aux USA quoi).
Le 18/06/2017 à 01h47
GitHub
Le 18/06/2017 à 11h13
Le 18/06/2017 à 14h00
Qwant est une entreprise française, enregistrée au RCS de Paris et hébergée en France.
Le fait que des entreprises et investisseurs étrangers aient des parts dedans ne retire en rien sa nationalité primaire, sinon ça reviendrait à dire que Bugatti est allemand car appartenant à V.A.G.
Alors que la société et son usine sont basées en Alsace (même si on a toujours un doute avec eux " />).
Le terme “entreprise européenne” est plus pour de l’image qu’autre chose…. Comme le conglomérat Airbus qui reste avant tout basé en France (siège opérationnel) et aux pays bas (siège social, on se demande pourquoi tiens).
Je ne pense pas qu’il puisse y avoir des entreprises répondant du droit communautaire.
Le 18/06/2017 à 14h09
Rectification : le statut juridique “société européenne” existe bel et bien.
Le 18/06/2017 à 14h44