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Au CERN, le Grand collisionneur de Hadrons s’améliore avant de reprendre du service

Les scientifiques dans les starting-blocks

Au CERN, le Grand collisionneur de Hadrons s’améliore avant de reprendre du service

Le 28 mai 2021 à 14h55

Alors que la troisième période d’exploitation du Grand collisionneur de hadrons va débuter, les travaux continuent bon train. De nombreuses améliorations ont été apportées au cours des derniers mois, certaines plus délicates que d’autres. Même si les travaux ne sont pas encore terminés, la haute luminosité est déjà en ligne de mire.

Depuis fin 2018, le Grand collisionneur de Hadron (LHC) du CERN est dans son deuxième long arrêt technique (LS2)… et quand on parle d’un arrêt long ce n’est pas galvaudé. Après plusieurs reports pour cause de pandémie mondiale, « le nouveau calendrier du LS2 prévoit ainsi la circulation dans le LHC des premiers faisceaux tests fin septembre 2021 ».

Mais il faudra encore attendre plusieurs mois pour que les expériences du LHC – ATLAS, CMS, ALICE et LHCb – « puissent, elles aussi, mener à bien leur programme d’améliorations ». Ainsi, la troisième période d’exploitation du LHC devrait débuter en mars 2022.

Du « vieux » Synchrotron à protons au tout jeune FASER

Depuis le début de l’année, les travaux préparatoires au réveil du « monstre » se déroulent dans les coulisses. En mars – après une révision complète de deux ans – le Synchrotron à protons (ou PS), « le plus ancien des accélérateurs du CERN », se réveillait et accélérait son premier faisceau.

Il est situé au centre du complexe du CERN et « alimente en faisceaux de particules le Grand collisionneur de hadrons (LHC), mais aussi plusieurs des principales installations du CERN, notamment l'usine d'antimatière et la zone Est ». Pour en arriver là, d’importantes améliorations ont été effectuées sur le PS vieux de 60 ans pour le « préparer à une luminosité plus élevée (qui est un indicateur du nombre de collisions) ».

CERN Synchrotons protons Un nouvel aimant à septum après son installation dans le Synchrotron à protons. Crédits : CERN

Quelques semaines plus tard, le détecteur FASER (Forward Search Experiment) était « mis en place dans le tunnel du LHC […] Il fait actuellement l'objet de tests et sera prêt à acquérir des données l'année prochaine ». Son but est d’« étudier les interactions des neutrinos de haute énergie et découvrir de nouvelles particules légères interagissant faiblement ». L’enjeu est important pour le CERN :

« L'existence de ces nouvelles particules est prédite par de nombreux modèles au-delà du Modèle standard, qui s'efforcent de résoudre certaines des plus grandes énigmes de la physique, comme la nature de la matière noire, et l'origine de la masse des neutrinos. »

C’est aussi à cette époque (mi-mars) qu’un changement symbolique a eu lieu : « Les clés du LHC, qui, depuis plus de deux ans, étaient en la possession des équipes chargées des interventions dans le cadre du LS2, ont été reprises par le groupe Opérations ».

FASER CERN Détecteur FASER. Crédits : CERN

Un vide toujours plus important, entre autres changements

En mai, une étape cruciale du LS2 était atteinte avec la mise en place de « la plus grande amélioration du système de vide du faisceau de l’expérience depuis la première exploitation de CMS en 2008 ». Cet élément mesure pas moins de 36 mètres de long et il est très fragile. C’est là que « les faisceaux du LHC entrent en collision au point d’interaction ». C’est l’un des derniers éléments de l’expérience à être installé avant la fermeture du détecteur.

L’air de rien, ce changement impose de « nombreuses exigences en matière de physique, de vide et d’intégration ». Tout d’abord, la configuration du tube de faisceau change : un nouveau groupe de pompage de vide est installé plus loin du détecteur, à 16 m du point d’interaction afin de « faciliter la maintenance ».

Le tube de faisceau doit pouvoir atteindre une « pression ultime de 10⁻¹¹ millibars » durant les tests d’étanchéité, ce qui est « extrêmement plus faible que la pression sur la Lune », affirme le CERN. Il faut en effet créer de l’ultravide, qu’il est « indispensable d’obtenir à l’intérieur de la ligne de faisceau d’un collisionneur de particules afin d’éviter les collisions entre les particules en circulation et les molécules de gaz résiduelles ». Cela créerait du bruit de fond et altérerait la durée de vie du faisceau ; rien de bon pour la science.

Autre élément important du nouveau faisceau : réduire les doses de rayonnements reçues par le personnel. « Le nouvel alliage d’aluminium utilisé pour le tube de faisceau réduit la radioactivité induite d’un facteur 5 par rapport à l’acier inoxydable dont était fait l’ancien tube de faisceau », indique le CERN.

Faisceau CERN Installation de la nouvelle ligne de faisceau dans le détecteur CMS en avril 2021. Crédits : CERN

Un détecteur à 13 milliards de pixels

Enfin, le dernier date de cette semaine avec la mise en place d’un « trajectographe interne amélioré » dans le détecteur ALICE : « Les deux tonneaux du plus grand détecteur à pixels jamais construit ont été descendus dans la caverne et sont prêts pour la mise en service ».

Les chiffres sont impressionnants : « Avec ses 10 m² de surface active de silicium et près de 13 milliards de pixels, le nouveau détecteur ITS [Inner Tracking System, ndlr] est le plus grand détecteur à pixels jamais construit ». Il « contribue à l'identification des particules issues des collisions plomb-plomb à hautes énergies enregistrées à ALICE ».

Le CERN explique que « l'insertion du cœur du détecteur ALICE autour du tube de faisceau requiert une précision chirurgicale ». Il ajoute que l'installation s'est déroulée en deux temps, les deux tonneaux ont été installés à deux mois d’intervalle. Le tonneau externe est le premier installé, mais c’est la partie « facile ».

L’installation du tonneau interne est en effet bien « plus complexe du fait de sa position à proximité immédiate du tube de faisceau ». Mais tout est bien qui finit bien : « après une semaine intense consacrée aux opérations d'insertion et de rassemblement des deux moitiés, se prolongeant souvent tard dans la soirée, cette manœuvre délicate a été achevée le 12 mai au soir ». Les tests préliminaires confirment que tout s’est déroulé sans anicroche.

Trajectographe CERN Les deux tonneaux du trajectographe. Crédits : CERN

Y’a plus qu’à… avant de préparer le HL-LHC pour 2027

Désormais, « les dernières étapes avant l'acquisition de données au LHC sont l'installation, prévue pour le prochain mois, du dernier des sous-détecteurs d'ALICE restant à installer dans le détecteur (le détecteur FIT), et une phase globale de mise en service qui commencera en juillet », explique le CERN.

Le deuxième long arrêt avait pour objectif de « consolider, d'entretenir et d'optimiser le complexe d’accélérateurs afin de le rendre plus puissant et fiable en vue de la réalisation de découvertes ». La mission est en passe d’être accomplie, mais ce LS2 a fait bien plus selon Marzia Bernardini, responsable de la section Organisation, planification et appui (OSS) :

« Le deuxième long arrêt a fédéré les équipes autour d'un projet commun, en particulier lorsque les circonstances exigent un remaniement constant du calendrier. Le LS2 nous a permis de mieux nous comprendre en nous écoutant les uns les autres et en argumentant afin de trouver des solutions communes. Nous avons mis notre égo de côté au service de l'intérêt général. »

LS2 est aussi une « étape incontournable pour permettre au LHC d'atteindre des niveaux d'énergie sans précédent lors de la future phase de haute luminosité, qui ouvrira la voie à de nouvelles découvertes ». Il s’agira alors du LHC à haute luminosité (ou HL-LHC), mais c’est une autre histoire puisqu’il ne devrait pas entrer en service avant fin 2027, après le troisième long arrêt technique (LS3) de 2025 à 2027. Le HL-LHC génèrera alors dix fois plus de collisions.

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« Le deuxième long arrêt a fédéré les équipes autour d’un projet commun, en particulier lorsque les circonstances exigent un remaniement constant du calendrier. Le LS2 nous a permis de mieux nous comprendre en nous écoutant les uns les autres et en argumentant afin de trouver des solutions communes. Nous avons mis notre égo de côté au service de l’intérêt général. »



Wooow… Ça fait rêver…



Si notre Démocratie (pour encore combien de temps ?) pouvait fonctionner toujours comme ça…



…Mais, surtout en période d’élections, notre stupidité semble toujours reprendre le dessus… /:
:craint:

Au CERN, le Grand collisionneur de Hadrons s’améliore avant de reprendre du service

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